L’inflation totale pourrait bientôt atteindre 6 %

31 juillet 2008 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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L’inflation totale selon l’Indice des prix à la consommation (IPC) aux États-Unis atteindrait 6 % dans les six prochains mois, selon un nouveau rapport de Marchés mondiaux CIBC.

L’économie américaine n’a pas connu un tel taux d’inflation depuis les années 1990 et cette situation n’avait alors duré que quatre mois. La dernière période prolongée pendant laquelle l’inflation a progressé aussi rapidement aux États-Unis remonte à 1982. Le deuxième choc pétrolier de l’OPEP avait alors entraîné une période de stagflation.

Selon Jeff Rubin, économiste en chef à Marchés mondiaux CIBC, le marché craint que la flambée des prix de l’énergie mène à une inflation trop importante. Avec l’évolution des taux de salaire et sa prise en compte dans des clauses d’inflation, M. Rubin s’attend à ce que les taux d’intérêt augmentent. Dans son rapport, il signale qu’en 1990, le taux d’inflation atteignait 6 % et le rendement des fonds de la Réserve fédérale approchait de 7,5 %, soit plus de trois fois leur niveau actuel.

« Nous nous attendons à ce que la Réserve fédérale hausse ses taux d’intérêt d’au moins 200 points de base d’ici la fin de l’année prochaine », souligne-t-il.

Sur une note plus positive toutefois, le niveau actuel des prix pourrait aider de nombreux travailleurs américains dans leurs négociations. « Les coûts d’expédition ayant monté en flèche du fait que le prix du baril de pétrole se maintient au-delà de 100 $, la capacité concurrentielle de la Chine, qui était auparavant la menace absolue sur l’échiquier mondial, perd de la vigueur de jour en jour. » Cette situation pourrait ramener les indemnités de vie chère sur la table des négociations en Amérique du Nord, surtout dans les secteurs bien représentés par les syndicats, comme celui de la sidérurgie. M. Rubin soutient que les prix élevés de l’énergie redonnent aux travailleurs du secteur manufacturier américain le pouvoir de négocier qu’ils n’avaient plus depuis une dizaine d’années, afin d’exiger des hausses salariales justifiées par la hausse des prix de l’essence.

Par ailleurs, le rapport indique que, malgré la récente baisse mondiale du cours du pétrole, les pressions liées à l’approvisionnement continueront d’entraîner les prix du brut à la hausse. Cette situation entraînera des coûts plus élevés pour le consommateur, à la pompe, au supermarché ou sur le compteur d’électricité.

Le Moyen-Orient accroîtra sa consommation de pétroleM. Rubin a rappelé qu’en raison de l’explosion de la demande de pétrole et du ralentissement de la production au Moyen-Orient, les exportations de brut provenant de cette région ont diminué de plus de 700 000 barils par jour en 2007. Le rapport de la Banque prévoit une nouvelle réduction des exportations de l’ordre de un million de barils par jour dans les quatre prochaines années.

Par ailleurs, M. Rubin explique que la consommation au Moyen-Orient a crû d’environ 300 000 barils par jour. Cette hausse est attribuable aux fortes subventions à la consommation d’énergie, qui permettent aux automobilistes de ne payer qu’environ 10 % du prix mondial, mais aussi à la croissance rapide de la demande d’électricité générée par des ressources « qui font l’objet de subventions encore plus importantes que celles accordées pour la production d’électricité par le pétrole et le gaz ». Grâce à ces subventions, les consommateurs de cette région paient entre le quatorzième et la moitié de la facture d’électricité d’un foyer nord-américain moyen.

Le Moyen-Orient ne possède aucune centrale électrique alimentée à l’énergie nucléaire ou au charbon et que sa capacité hydroélectrique est restreinte. Il doit donc se rabattre sur des usines alimentées par des combustibles fossiles. Depuis 2002, la consommation d’électricité de la région a progressé de plus de 6 % par an, atteignant actuellement 320 000 barils de pétrole par jour. Puisque l’Arabie saoudite veut tripler sa capacité en énergie électrique d’ici 2020 et que d’autres territoires comme Dubai, dont la demande d’électricité connaît la plus forte poussée de la région (15 % par année), abandonnent le gaz naturel, ressource rare, pour le pétrole, la consommation d’électricité continuera à monter deux à trois fois plus vite que dans les pays de l’OCDE.

La forte croissance de la population et de l’économie ont également accentué les besoins d’eau douce dans la région. La consommation d’eau en Arabie saoudite est présentement sept fois plus élevée que le niveau viable : la consommation des Émirats arabes unis et du Koweit dépasse respectivement de 15 et 22 fois le niveau de réalimentation naturelle. Cette situation entraîne un besoin urgent d’usines de dessalement qui consomment beaucoup d’énergie. Selon la Banque mondiale, avec un volume annuel additionnel de 50 à 60 milliards de pieds cubes d’eau nécessaire d’ici 10 ou 15 ans au Moyen-Orient, le dessalement pourrait à la longue nécessiter un million de barils de pétrole par jour.

Selon M. Rubin, bien que l’OPEP ait récemment nié toute responsabilité par rapport à la hausse des prix du pétrole, les fortes subventions de la consommation de pétrole par le cartel continueront de réduire les exportations de la région. Cette situation fera à son tour grimper les prix du pétrole et l’inflation.