L’hypothèque inversée : une stratégie à considérer ?

Par David Truong | 17 mars 2022 | Dernière mise à jour le 26 septembre 2023
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Femme utilisant une calculatrice.
Photo : iStock Photo

Plusieurs planificateurs financiers estiment que lorsque les biens à usage personnel comptent pour moins de 25 % des actifs totaux, on peut s’attendre à une retraite confortable. Mais avec la hausse fulgurante des prix de l’immobilier ces dernières années, on peut se demander comment les nouveaux propriétaires atteindront cette cible pour la retraite.

Une solution possible : vendre la propriété et en acheter une plus petite à la retraite. Mais cette solution n’est pas facilement applicable pour tous et implique un changement important de style de vie. Une autre possibilité peu connue du public est l’hypothèque inversée.

SON FONCTIONNEMENT

Une hypothèque inversée donne accès à la valeur nette de sa maison, sans en disposer. Il s’agit d’un emprunt garanti par la résidence. Aucun paiement n’est exigé tant que le propriétaire réside dans la maison. Les intérêts sont ajoutés au montant du prêt, qui augmente ainsi avec le temps au lieu de diminuer.

Le montant du prêt et la fréquence des versements sont établis dans le contrat. L’argent prêté peut être versé en une seule tranche, en plusieurs versements ou un mélange des deux options. Pour éviter que les intérêts ne s’accumulent trop rapidement sur le prêt, on recommande généralement d’étaler les versements.

Tout comme l’hypothèque conventionnelle, les intérêts de l’hypothèque inversée sont capitalisés semestriellement, mais leurs taux sont généralement plus élevés que les taux conventionnels. Ils varient selon le terme choisi (la date de révision), qui peut se situer entre une et cinq années. Le terme correspond donc à la durée du prêt et au taux d’intérêt sur lequel le prêteur et le propriétaire se sont entendus. À la fin du terme, s’il le désire, l’emprunteur pourra rembourser son prêt en totalité sans pénalité ou le renouveler.

L’hypothèque inversée prend fin lorsque survient le premier des événements suivants :

  • le débiteur ou son conjoint cesse de vivre dans la résidence;
  • 180 jours après le décès du dernier conjoint survivant;
  • à la vente de la résidence;
  • à l’arrivée d’une date fixe prédéterminée par les parties.

Puisqu’aucun paiement n’est requis avant la fin du prêt et que les intérêts sont capitalisés à même le prêt, le prêteur voudra s’assurer que le financement accordé demeure plus bas que la valeur de la propriété. Par conséquent, les créanciers offrant ce type de prêt seront habituellement disposés à prêter entre 10% et 55 % de la valeur de la propriété, afin de se protéger au cas où la dévaluation de la propriété, l’obligation de vendre ou l’état de l’immeuble ne viennent affecter de façon importante la valeur de la propriété.

Pour déterminer le montant du prêt, le créancier tient compte de :

  • l’âge des propriétaires (minimum 55 ans);
  • la valeur nette de la résidence et son emplacement;
  • le type de propriété;
  • les taux d’intérêt en vigueur.

Le ratio prêt-valeur (RPV) est le montant maximum du prêt en fonction de la valeur marchande de la propriété. Il est déterminé par le prêteur selon son niveau de risque. En règle générale, plus l’emprunteur est âgé, plus grand sera le RPV accordé sur la propriété.

Parmi les avantages de l’hypothèque inversée, notons que le prêteur n’exige pas d’enquête de crédit ni de qualification par rapport aux revenus.

Le contrat prévoit que le propriétaire s’engage à maintenir sa propriété en bon état, à payer ses impôts fonciers et à détenir une assurance habitation appropriée. Si des réparations majeures sont nécessaires, le propriétaire doit donc en assumer les frais. S’il n’a pas emprunté le montant maximum selon le RPV, le propriétaire pourrait refinancer son prêt hypothécaire inversé pour payer ces frais.

Le contrat exige parfois des réévaluations périodiques de la résidence. Une négligence des propriétaires pourrait faire perdre de la valeur à la résidence, rendant le prêt plus élevé que la valeur de la propriété. Normalement, si le produit de la vente est plus petit que le montant du prêt, il n’y aura pas de recours contre le débiteur pour récupérer la perte. Mais si la situation est causée par de la négligence, il se pourrait que le créancier exige le remboursement des pertes.

Présentement, deux institutions financières offrent l’hypothèque inversée au Canada, soit la Banque HomeEquity et la Banque Équitable. Bien que l’hypothèque inversée offre plusieurs avantages, elle a aussi quelques inconvénients, soit :

  • le taux d’intérêt et le coût d’emprunt sont plus élevés que pour une hypothèque traditionnelle;
  • il y a une pénalité pour paiement anticipé si la résidence est vendue ou si les propriétaires déménagent au cours des trois premières années;
  • diminution importante du patrimoine successoral;
  • frais reliés à l’évaluation de la résidence, à la demande d’ouverture ou de fermeture de dossier ou aux réévaluations périodiques;
  • prise en charge des coûts normaux liés au droit de propriété.

Il est donc important d’évaluer la situation du client avant de lui proposer cette solution.

David Truong, CIWM, Pl. Fin., M. Fisc., est conseiller, Centre d’expertise, Banque Nationale Gestion Privée 1859.

David Truong

David Truong, CIWM, Pl. Fin., M. Fisc., est Président, Banque Nationale Planification et Avantages sociaux inc.