Clients méfiants : mode d’emploi

Par Bernard Viau | 9 octobre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Homme exprimant de la méfiance.

Le mauvais service existe partout, dans notre industrie aussi. Et comme le veut l’adage, chat échaudé craint l’eau froide. Comment regagner la confiance de ce client qui vous parle de ­Vincent ­Lacroix, de celui qui s’est fait vendre un contrat d’assurance qui ne lui convient pas ou de celui à qui on a fait miroiter une retraite dorée et rapide?

­Est-ce ­un ­problème d’assurance?

À l’origine de la méfiance quant aux questions d’assurance, il y a souvent un manque d’explications claires de la part du conseiller précédent.

Par exemple, il y a quelques années, un client de mon unité de service1 m’a appelé pour savoir pourquoi il devait encore payer les primes mensuelles de sa police. On lui avait promis qu’elles seraient couvertes automatiquement par les rendements sur les sommes qu’il y avait déposées il y a 20 ans. La police d’assurance « devait se payer toute seule en 20 ans », un cas classique, que l’on retrouve souvent dans l’assurance vie universelle.

Lorsque vous rencontrez un client suspicieux, la meilleure approche reste toujours la franchise. Si on lui a fait miroiter de faux espoirs, ­dites-le simplement.

Les contrats d’assurance invalidité peuvent aussi être source de mécontentement pour vos clients. Les clauses sont très complexes ; vous le savez, mais pas eux. Avec le temps, ils peuvent en oublier les tenants et aboutissants. Pour agir en amont, vérifiez tous vos contrats d’assurance invalidité avec attention. Si certains risquent de poser problème, il faut rencontrer les clients pour en parler.

Faites attention aux vieilles polices d’assurance. Certains contrats, surtout ceux émis il y a 15 ou 20 ans, incluent des clauses qui entrent en vigueur lorsque le client atteint 65 ans. Il peut donc arriver que le capital assuré baisse, même s’il s’agit d’une assurance vie entière. Si c’est le cas, certaines clauses permettent parfois d’éviter cette diminution. Étudiez attentivement le contrat original. Si votre client ne l’a plus, vous pouvez vous adresser au siège social de l’assureur.

Les prêts accordés sur la valeur de rachat d’une police d’assurance sont parfois des bombes à retardement. La valeur de rachat peut en effet fluctuer en fonction des taux d’intérêt. Si elle baisse, le montant prêté peut aussi diminuer. Le client doit alors rembourser la différence, en plus de payer les intérêts annuels encourus. S’il en est incapable, le capital de son assurance peut être appelé à baisser.

Si votre client a un tel produit, ­assurez-vous de bien lui expliquer comment gérer le prêt. Ses clauses peuvent être difficiles à comprendre et l’assuré ne fait pas toujours le suivi de la fluctuation de la valeur de rachat. Si vous ne l’aidez pas à le faire, il pourrait avoir une surprise désagréable.­

Est-ce ­un ­problème ­de ­placement ?

La méfiance des clients au chapitre des placements provient généralement du piètre rendement, du manque de suivi sur les investissements ou des frais qu’ils découvrent après quelques années.

Encore là, la franchise reste la meilleure attitude. Si les marchés chutent, il faut réexpliquer l’importance de la patience et de garder sa position à long terme pour obtenir des résultats satisfaisants.

De mon côté, j’ajoute que les baisses de rendement affectent aussi mes propres investissements et que j’applique les mêmes solutions.

Si vous voulez reconquérir un client méfiant à cause de ses placements, ­engagez-vous à les réévaluer au moins deux fois par année. C’est très souvent le manque de suivi qui refroidit les ardeurs des clients.

Un piètre rendement ne mine pas nécessairement votre relation avec eux. Cependant, si les marchés boursiers baissent fortement, n’attendez pas et ­contactez-les pour en parler.­

Est-ce ­un ­cas ­de ­fraude ?

Un client qui a été fraudé est évidemment méfiant. Lorsque vous en rencontrez un, ­laissez-le vous en parler. Donnez sincèrement votre avis et ­demandez-lui ensuite s’il accepte de vous faire confiance malgré ce qui est arrivé auparavant. Votre franchise montrera que vous n’avez rien à cacher et aidera le client à se sentir en sécurité ; vous pourriez être surpris du résultat.

«Lorsque vous rencontrez un client suspicieux, la meilleure approche reste toujours la franchise.»

Prévenir ­et ­guérir

Laissez votre ego au vestiaire lorsque vous tombez sur un client méfiant. Il ne vous attaque pas personnellement, c’est votre profession qui ne lui inspire pas confiance étant donné ses expériences passées.­

Écoutez-le, faites preuve d’empathie et cherchez des moyens de mettre la situation en perspective. Par exemple, la ­Bourse évolue selon des cycles : elle monte et descend périodiquement. Ce qui importe, c’est la vision à long terme. Il est toujours bon de le rappeler aux investisseurs, sans tomber dans les explications usées qu’on leur a sans doute servies maintes et maintes fois.

Vous savez quelle est la règle d’or du conseil financier : connaître son client et ses besoins. Lorsque vous achetez ou qu’on vous fournit un bloc d’affaires, il est primordial de vérifier tous les dossiers pour s’assurer que rien ne cloche et prévenir les problèmes.

En faisant affaire avec un conseiller, les investisseurs recherchent une personne de confiance qui les accompagnera dans les méandres des services financiers. Ils ne peuvent pas nécessairement lire tous les petits caractères des contrats : par exemple, certains n’ont pas le temps, ou d’autres n’ont pas les compétences requises pour les comprendre.

Le service que vous offrez est directement lié à la confiance que vous portent les investisseurs, révèle justement une étude du ­Financial ­Planning ­Standards ­Council. Une attitude de vendeur est à proscrire.

Si les seules questions que vous posez à vos clients traitent de l’argent dont ils disposent ou des produits que vous voulez leur offrir, ­attendez-vous à ce qu’ils aient des réticences à votre égard.

S’assurer de bien leur expliquer les clauses et les produits vous attirera automatiquement leur confiance, car vous leur démontrerez concrètement que vous vous souciez vraiment d’eux. Ce service personnalisé est ­peut-être plus coûteux en temps, mais il vous rapportera à long terme.

Bernard ­Viau est conseiller à la retraite.


• Ce texte est paru dans l’édition d’octobre 2018 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Bernard Viau