Payer les études postsecondaires avec l’assurance vie

Par David Truong | 13 mai 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : Antonio Guillem / 123RF

Le régime enregistré d’épargne-études (REEE) est l’instrument par excellence pour financer les études postsecondaires grâce à ses subventions. Lorsqu’on a maximisé non seulement le REEE, mais aussi les autres régimes enregistrés, on épargne généralement dans un compte non enregistré. Or, certains prétendent qu’une police d’assurance vie peut servir d’outil d’épargne pour les études en utilisant la valeur de rachat comme source de financement. Est-ce une stratégie à envisager?

La valeur de rachat est généralement offerte avec l’assurance vie entière avec participation. Le calcul de cette valeur est basé sur la composante épargne. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte. En règle générale, plus le titulaire de la police a cotisé au contrat, plus la valeur de rachat éventuelle sera élevée.

Toutefois, accéder à la valeur de rachat n’est pas sans conséquences fiscales. Si le produit de disposition, soit la valeur de rachat, est plus élevé que le coût de base rajusté (CBR), l’excédent sera imposable dans les mains de l’assuré. Le CBR est calculé ainsi : les primes versées au contrat moins le coût net d’assurance pure1, qui augmente à mesure que la personne avance en âge puisque les taux de mortalité prescrits croissent également.

Pour bien comprendre, imaginons une fille née en 2018 qui est assurée pour un montant de 100 000 $. Il s’agit d’une assurance vie entière avec participation dont la prime est de 453 $ par année, payable en 20 ans. À ce moment, la valeur de rachat s’établira à 7 236 $ selon le barème de participation actuel, dont 4 743 $ sont garantis, et le CBR sera de 8 612 $.

Rachat partiel ou total

Le rachat est la méthode la plus simple pour avoir accès à la valeur de rachat. Dans notre exemple, il n’y aurait aucune répercussion fiscale pour un rachat total ou partiel, puisque le CBR excède la valeur de rachat. Pour un rachat partiel, le CBR est considéré au prorata du rachat. Dans ce cas, le CBR sera réduit du montant du rachat, ce qui fait que tout rachat futur pourrait être imposable puisque le CBR sera moins élevé que la valeur de rachat.

Toutefois, un retrait de toute la valeur de la police entraîne sa terminaison. Comme l’objectif principal d’une assurance vie en est un de protection, mettre fin au contrat n’est pas souhaitable. Un retrait partiel serait permis, mais la valeur de rachat croîtrait moins rapidement.

Avance sur police

Une avance est un prêt que l’assureur consent jusqu’à la valeur de rachat, moyennant des intérêts. Ces intérêts peuvent être payés ou capitalisés, mais le montant du prêt ne peut jamais excéder la valeur de rachat. Les remboursements ne sont pas assujettis à la taxe sur les primes d’assurance et les intérêts peuvent être déduits, sous certaines conditions.

Toutefois, l’avance est considérée comme une disposition du point de vue fiscal. Ainsi, si le CBR est moins élevé que la valeur de rachat, la partie excédentaire du prêt sera imposée dans les mains de l’assuré.

Dans notre exemple, une avance sur police n’aurait aucune conséquence fiscale, puisque le CBR excède la valeur de rachat. Mais si les intérêts sont capitalisés, le titulaire devra s’assurer que le prêt n’excède pas la valeur de rachat pour éviter de mettre fin à la police.

Hypothèque mobilière

L’hypothèque mobilière consiste à obtenir une marge de crédit auprès d’une institution financière, moyennant intérêts, en donnant la police d’assurance vie en garantie. Le montant de l’emprunt peut aller jusqu’à la valeur de rachat de la police. Le paiement des intérêts est géré par l’institution financière et n’a aucun lien avec les primes de la police d’assurance vie. Cette démarche peut entraîner des frais supplémentaires. Comme il ne s’agit pas d’une disposition, il n’y aurait pas de répercussion fiscale.

Cette option ne serait pas envisageable dans notre exemple étant donné la valeur de rachat minime obtenue en contrepartie des démarches administratives et des frais exigés.

Quelle rentabilité?

Bien que la valeur de rachat soit accessible, la rentabilité de cette stratégie dépend de plusieurs variables, dont la croissance de l’épargne dans la police. Dans une assurance vie entière avec participation, cela dépend des participations versées au contrat et, comme les rendements, les participations ne sont pas garanties.

En se référant toujours à notre exemple, une autre option serait d’investir la prime de 453 $ dans un compte non enregistré et de souscrire une assurance vie temporaire 20 ans avec un capital de 100 000 $.

Avec un rendement de 4 %, un taux d’imposition pour le parent de 40 % et une prime annuelle de 158 $ pour l’assurance temporaire, le montant accumulé net serait de 7 529 $ après 20 ans, un montant plus élevé que la valeur de rachat de 7 236 $.

Utiliser la valeur de rachat d’une assurance vie pour financer les études postsecondaires des enfants n’est donc pas recommandé. Évidemment, si les participations sont plus élevées, la valeur de rachat pourrait être plus intéressante que l’épargne traditionnelle. Mais l’assurance sert d’abord à couvrir un risque financier, et non à épargner.

David Truong, CIWM, Pl. Fin., M. Fisc., est conseiller, Centre d’expertise, Banque Nationale Gestion privée 1859.

1 Coût net de mortalité du contrat pour chaque année, représentant la portion de la prime liée au capital-décès.


• Ce texte est paru dans l’édition de mai 2019 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

David Truong

David Truong, CIWM, Pl. Fin., M. Fisc., est Président, Banque Nationale Planification et Avantages sociaux inc.