Stratégies fiscales de fin d’année

Par Nathalie Côté | 17 novembre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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L’année 2018 tire à sa fin, mais il est toujours temps d’optimiser la situation fiscale de vos clients. Voici plusieurs éléments à (re)voir avec eux dans les prochaines semaines!

REER : un grand classique

Idéalement, vos clients cotiseraient à leur régime enregistré d’épargne-retraite (REER) tout au long de l’année. Malheureusement, plusieurs le font seulement dans les 60 premiers jours de l’année. Dans certains cas, c’est une grave erreur.

« S’ils investissent dans le Fonds de solidarité FTQ, ils devraient le faire à l’automne. Comme le nombre d’actions émises chaque année est limité, elles sont souvent indisponibles en février parce qu’il n’en reste plus suffisamment », souligne André Boulais, comptable professionnel agréé et auteur du livre Réduisez vos impôts.

Vos clients qui atteignent 71 ans cette année doivent aussi se dépêcher. « Ils peuvent faire une dernière cotisation au REER en 2018 », rappelle Brigitte Felx, première directrice régionale, stratégie de distribution-entreprise à RBC Gestion mondiale d’actifs.

Leur REER doit en effet être transformé en fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) avant le 31 décembre de l’année où ils atteignent 71 ans. Des retraits obligatoires doivent être effectués ensuite.

Vous pourriez aussi songer à leur faire faire une cotisation excédentaire en décembre s’ils ont travaillé en 2018. « Comme le client ne pourra pas cotiser à son REER en 2019, ça peut être intéressant, souligne David Truong, conseiller au Centre d’expertise de Banque Nationale Gestion privée 1859. Il aura un mois de pénalité à payer, mais il pourra profiter de cette cotisation l’an prochain. »

À l’approche de la retraite, les clients qui investissent dans un REER de conjoint devraient aussi cotiser rapidement. « Pour éviter certaines règles d’attribution, l’argent doit rester dans le REER pour trois 31 décembre consécutifs, vulgarise M. Truong. Donc, si on attend au début de l’année, il faudra patienter plus longtemps pour effectuer un retrait. Car si on retire des sommes plus rapidement, le cotisant devra payer l’impôt plutôt que le bénéficiaire. »

Le REEE de la dernière chance

Ouvrir un régime enregistré d’épargne-études (REEE) pour les enfants est avantageux. Vos clients devraient se dépêcher de le faire, surtout s’ils ont un enfant de 15 ans. « C’est l’âge maximal pour ouvrir un régime et y cotiser si on veut obtenir des subventions durant les années où le jeune aura 16 et 17 ans », précise M. Truong.

Si l’enfant est un peu plus jeune, ouvrir un REEE avant la fin de l’année pourrait lui permettre de récupérer plus de subventions. « Le client peut cotiser pour l’année en cours et pour une année antérieure où il ne l’a pas fait, indique Mme Felx. On peut cotiser seulement pour deux années à la fois. »

Planifier un retrait du CELI

Votre client pense faire un retrait de son CELI prochainement? Mieux vaut l’effectuer avant la fin de l’année plutôt que d’attendre à l’an prochain. « La personne retrouve ainsi son droit de cotisation dès janvier 2019 plutôt qu’en 2020 », note M. Truong.

Pertes en capital : qui perd gagne

Votre client a de l’épargne non enregistrée? Vous devriez vous attarder aux pertes et gains en capital.

« Si je vends un titre qui comporte une perte accumulée, je peux le mettre en contrepartie des gains en capital réalisés durant l’année, résume Mme Felx. Il faut toutefois le faire au plus tard le 27 décembre. » Elle rappelle également que les gains en capital peuvent être reportés, selon les situations.

Dans certains cas, il peut être approprié de créer une perte en vendant un titre pour le racheter ensuite. « Il faut toutefois attendre au moins 30 jours après la date de règlement de la disposition [avant de se le procurer à nouveau] », prévient Mme Felx. Sinon, cela cause une perte apparente, ce qui est fiscalement désavantageux.

Pour vérifier si ces stratégies valent la peine pour vos clients, ce dernier suggère d’effectuer des simulations avec un logiciel d’impôt.

Crédits et déductions

Il existe un grand nombre de crédits et déductions d’impôt. Pour les réclamer, vos clients doivent cependant avoir conservé leurs reçus!

En voici quelques-uns dont vous pourriez leur parler.

  • Crédit d’impôt RénoVert : la période d’admissibilité a été prolongée jusqu’au 31 mars 2019. « Pour en bénéficier en 2018, les travaux doivent avoir été exécutés et payés dans l’année », indique M. Boulais.
  • Frais médicaux : rappelez à vos clients que les soins doivent avoir été acquittés et reçus durant l’année. « Inutile de payer d’avance son traitement d’orthodontie de trois ans, cite en exemple M. Boulais. La personne pourra réclamer seulement la portion effectuée dans l’année. »
  • Déduction pour le matériel informatique : certaines dépenses d’entreprise pour le matériel informatique ne peuvent pas être déduites entièrement la première année, elles doivent être amorties sur plusieurs années. Le gouvernement a bonifié l’amortissement en 2018. Les entrepreneurs peuvent désormais déduire un pourcentage plus élevé de leurs dépenses dès la première année et donc économiser davantage d’impôt. « Si l’amortissement me donne 1 000 $, je vais avoir droit à un supplément de 60 %, soit 600 $ de plus en déduction », illustre M. Boulais. Un travailleur autonome qui doit renouveler son équipement devrait donc le faire avant le 31 décembre pour en profiter.
  • Crédits pour les aînés : « Une personne de 70 ans ou plus pourrait être admissible au crédit d’impôt pour maintien à domicile », souligne M. Boulais. Cela couvre des services comme l’installation d’un abri d’auto, l’aide d’une infirmière, des repas offerts par un organisme, etc. Les frais communs de condominium sont aussi admissibles, mais il faut demander un relevé au syndicat de copropriété. Pour les personnes ayant un problème de mobilité, le crédit pour l’accessibilité domiciliaire pourrait aussi couvrir certains travaux.
  • Crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation : « Le fédéral offrait déjà un crédit de 750 $. Le Québec lui a emboîté le pas avec un crédit équivalent en 2018 », signale M. Boulais.
  • Don : offrir une somme d’argent à un organisme de charité permet de réclamer les crédits d’impôt fédéral et provincial.

Les différentes stratégies fiscales peuvent être relativement complexes. Les experts suggèrent de faire appel à un comptable ou un fiscaliste au besoin. Vous pourrez ainsi mieux guider vos clients.

Attention : changements!

Certaines nouveautés fiscales pourraient chambouler les stratégies de fin d’année habituelles de vos clients entrepreneurs et professionnels. En voici deux.

  • Verser des dividendes au conjoint et aux enfants : cette mesure demeure possible, mais les règles ont été resserrées. « Le conjoint doit travailler en moyenne au moins 20 heures par semaine pour l’entreprise pour recevoir des dividendes, précise le comptable André Boulais. Il est très difficile d’en verser aux enfants de 18 à 24 ans. Ils doivent pratiquement travailler à temps plein dans l’entreprise de manière continue. Il faut être très vigilant. »
  • Utiliser la méthode de la comptabilité fondée sur la facturation : « Avant, il était possible d’inscrire dans la comptabilité une réserve pour les travaux en cours non facturés, explique M. Boulais. Plusieurs professionnels y avaient recours. Cette possibilité a été éliminée. Le montant que les entreprises avaient déjà dans leur réserve pourra être réparti sur cinq ans à partir de 2018. » Si vos clients utilisaient cette méthode, ils doivent s’attendre à payer plus d’impôt.

Pour aller plus loin


• Ce texte est paru dans l’édition de novembre 2018 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Nathalie Côté