Turbulence des marchés : le temps arrange les choses

Par Daniel Laverdière | 9 mars 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Conseiller analysant le marché boursier.
Photo : Phongphan Supphakankamjon / 123RF

Le mois de décembre 2018 a été pénible pour l’indice S&P/TSX, avec une baisse du rendement total (RT) de 5,4 %. La montée de 1,4 % de novembre avait donné un peu d’espoir après trois mois dans le rouge (-0,8 % en août, -0,8 % en septembre et -6,3 % en octobre). Une triste fin d’année qui se conclut par une baisse de 8,9 % sur les 12 mois de 2018… Mais concentrer son attention sur ces courtes périodes fait perdre toute la perspective de l’effet du temps.

Le graphique 1 montre que cette volatilité est assez récurrente. Chaque point rouge représente un rendement mensuel. Les pertes entre 5 et 10 % ne sont pas si exceptionnelles. Toutefois, la dernière à être survenue avant celle d’octobre 2018 était de -6,1 %, en mai 2012.

Certains points sautent aux yeux, comme les sévères corrections de mars 1980 (-17,6 %), octobre 1987 (-22,5 %), août 1998 (-20,1 %) et septembre et octobre 2008 (-14,4 % et -16,7 %). Les « mois terribles » semblent survenir aux 10 ans, quoiqu’aucune baisse semblable n’ait été observée pendant les 23 ans précédant mars 1980.

Parfois, les baisses s’accumulent sur plusieurs mois, comme l’indique le graphique 2. La courbe bleue représente l’évolution de l’indice S&P/TSX (rendement total, sur l’axe de droite) et les lignes rouges illustrent les plus grandes pertes observées à partir d’un point de départ donné (axe de gauche).

Autrement dit, ­est-ce que l’indice a descendu à la fin d’un mois sous la valeur de départ, c’­est-à-dire le moment où l’investisseur est entré sur le marché ? ­Si oui, quelle a été la pire baisse depuis cette date (appelée « plus petite valeur connue par la suite » dans le tableau) ? ­Les déconvenues plus importantes sont repérables par un déclin visible de la courbe bleue et des lignes rouges très élevées.

Ces diminutions s’étendent à l’occasion sur plusieurs mois (de septembre 2000 à octobre 2002), alors que d’autres fois, tout se passe plus rapidement (de juin 2008 à mars 2009). Quelques sommets ont mené à des baisses importantes après quelques mois. Novembre 1973 (-35 %), juillet 1981 (-39 %), septembre 2000 (-43 %) et juin 2008 (-43 %) ont été des débuts de séquence très désagréables pour les investisseurs.

L’absence de lignes rouges signifie qu’à partir de ce début de mois, l’investisseur n’a jamais vu son capital descendre sous son dépôt initial. On comprend que ces dates coïncident avec des creux de marché. Investir pendant un creux est le rêve de tout un chacun mais, malheureusement, ce n’est qu’après coup que l’on peut savoir si l’on a frappé au bon moment.

On peut toutefois se consoler en constatant l’effet du temps. L’investisseur émotif a tendance à entrer sur les marchés lors des bonnes nouvelles et à ressortir quand tout va mal, ce qui ampute énormément son rendement.

Le graphique 3 illustre la situation de deux grands malchanceux : celui qui a investi son capital au début de septembre 2000 (Laurel) et l’autre en juin 2008 (Hardy). Laurel a vu son capital baisser graduellement de 43 % pour ensuite finalement remonter, avec une moyenne annuelle de 3,95 % (courbe verte) à la fin de 2018. Hardy, pour sa part, a subi cette même baisse de 43 % plus radicalement, mais son rendement moyen atteignait néanmoins 2,77 % (courbe noire) lorsque 2018 s’est terminée. Ces deux rendements, positifs malgré les baisses notables des quatre derniers mois de 2018, illustrent que l’effet du temps peut atténuer même les pires synchronisations.

Bien entendu, ces graphiques illustrent les performances en faisant abstraction des frais de gestion. Il faut alors faire les ajustements appropriés aux résultats.

Le planificateur financier pourrait utiliser ces graphiques pour accompagner un épargnant qui cherche à comprendre l’effet du temps sur ses placements. Toutefois, bien que les données utilisées reflètent fidèlement le comportement du S&P/TSX (rendement total) de 1957 à 2018, les marchés financiers demeurent imprévisibles. En juin 1993, les ­Canadiens remportaient une 24e coupe ­Stanley depuis 1916.

Une moyenne d’une coupe aux trois ans… ­La disette qui subsiste depuis est une façon imagée de rappeler que le passé n’est pas garant de l’avenir!

Daniel ­Laverdière, A.S.A., ­Pl. Fin., est directeur principal, Centre d’expertise, ­Banque ­Nationale ­Gestion privée 1859.


• Ce texte est paru dans l’édition de mars 2019 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Daniel Laverdière