Sommes-nous des concurrents ou des alliés?

18 septembre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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andreypopov / 123RF

Depuis des mois, le scandale des pratiques douteuses de certaines banques, couplé à l’apparition de sondages concluant que les conseillers sont des vendeurs qui ne tiennent aucunement compte des intérêts des clients, fait couler beaucoup d’encre et donne une mauvaise image de notre profession. Comment agir positivement?

En tant que conseiller, que pensez-vous de cette affirmation d’Erica Johnson, journaliste de la CBC, qui nous met tous dans le même panier :

« […] fait en sorte que l’industrie ignore les intérêts des clients et les dirige vers les produits les plus chers tout en soutirant des milliards aux clients chaque année ».

J’ignore ce qui peut amener une journaliste à affirmer une telle chose. Aurait-elle enquêté sur chacun des 90 000 conseillers du Canada? Tout n’est pas parfait, mais n’exagérons pas.

Les pratiques douteuses

Je suis le premier à reconnaître que certains problèmes restent à corriger.

Par exemple : le nombre incalculable de titres utilisés par les conseillers. Cela entraîne une certaine confusion, nous le savons tous.

Que pensez-vous de celui-ci : « conseiller en planification financière, analyse de la qualité »? C’est un vrai poste, affiché dans une offre d’emploi publiée sur LinkedIn, mais… je ne saurais vous expliquer avec exactitude quelles sont les tâches de cet employé!

Au total, le document de consultation 33-404 recensait 48 titres différents pour désigner un conseiller qui gère les investissements de ses clients. Au moins, je sais que les autorités réglementaires se saisissent du problème.

Sans vouloir prendre la défense des institutions financières, je peux difficilement croire que les pratiques douteuses soulevées par la CBC, notamment les quotas d’ouverture de comptes à découvert, sont courantes. Il se pourrait que certains conseillers jouent le jeu de leur employeur, mais nous avons tous un code de déontologie à respecter, qui a préséance sur tout ce qu’un directeur des ventes peut exiger.

Qui plus est, si vous êtes planificateur financier, le principe directeur numéro 1 de vos normes déontologiques laisse entendre qu’il n’est pas possible de vous imposer des objectifs de vente pour des produits spécifiques :

« Le rôle du planificateur financier est de guider et d’éclairer le client par un jugement professionnel objectif en ayant toujours en tête l’intérêt de celui-ci. Il doit faire preuve d’objectivité lorsqu’il donne des conseils ou des informations et éviter les situations de conflit entre son intérêt et celui du client. »

Nous savons que les institutions financières veulent faire des profits. D’accord. Mais pour y parvenir, deux choses sont nécessaires : une clientèle fidèle à long terme, qui reconnaît la plus-value des services offerts, et, surtout, une clientèle qui améliore d’année en année sa santé financière. Oui, je parle de long terme, mais d’un long terme extrêmement rentable.

Pousser un client à se procurer une carte de crédit doit être rentable à très court terme, mais en réalité, une institution financière qui fixe de tels objectifs à ses employés ne s’aide pas. Ne serait-il pas plutôt préférable d’enseigner de bonnes habitudes d’épargne à ce même client pour qu’il puisse investir des montants importants à long terme? En toute logique, on peut croire que c’est aussi l’orientation stratégique qu’ont adoptée les banques citées dans « l’étude sérieuse de la CBC ».

Le vrai problème

Toute cette mauvaise publicité fait mal aux conseillers. J’entends de temps à autres des clients : « c’est pareil partout », « je le savais » ou « on sait bien, vous voulez faire le plus d’argent possible ».

Notre profession doit redorer son image et les seuls qui peuvent y parvenir sont… les conseillers eux-mêmes.

Comme moi, vous connaissez plus que quiconque la valeur du conseil. Ceux qui ont déjà livré un chèque d’assurance à une veuve, mère de jeunes enfants, aidé un travailleur autonome à prévoir sa retraite, ou encore planifié l’achat d’une maison avec une jeune famille comprennent mieux que quiconque l’importance de nos services.

Nous avons besoin de lancer une campagne d’éducation auprès du public et des médias pour expliquer que, s’il existe des cas isolés de conseillers aux pratiques douteuses, la grande majorité d’entre nous, peu importe le réseau pour lequel nous travaillons, avons les intérêts des clients à cœur.

Cette campagne d’éducation, nous sommes les seuls à pouvoir la réaliser. Mais pour y arriver, nous devons nous voir comme des alliés.

Si chacun des 32 000 titulaires de permis inscrits à la Chambre de la sécurité financière prenait le temps d’expliquer la valeur du conseil à chacun de ses clients, nous améliorerions notre image et nous nous aiderions mutuellement.

Imaginez le programme d’une première rencontre-client bâti comme suit :

  • Présenter mon organisation
  • Exposer la valeur du conseil au Québec
  • Comprendre vos préoccupations financières
  • Établir vos priorités
  • Expliquer ma rémunération
  • Annoncer les prochaines étapes

Imaginez 32 000 professionnels qui parlent de la valeur du conseil à cinq personnes par semaine : vous m’aidez et je vous aide. Tout le monde est gagnant. Vous contribuez à améliorer l’image de notre industrie.

Les conseillers ont un rôle crucial à jouer pour aider les Québécois à améliorer leur santé financière, leur patrimoine et, surtout, leur plan de protection en cas de coups durs. Nous devons nous engager dans cette campagne de sensibilisation; l’avenir des Québécois en dépend.

Qui profiterait d’un tel message véhiculé par 32 000 personnes? Qui profiterait d’un resserrement des règles pour éliminer les pratiques douteuses comme celles rapportées depuis plusieurs mois?

La réponse est simple : notre industrie, et donc nos clients, actuels et futurs.