Papy-boomers

Par Michel Mailloux, du Collège des professions financières | 1 août 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Homme âgé, pensif, assis sur une chaise dans la pénombre.
Photo : Katarzyna Białasiewicz / 123RF

Avez-vous des clients vulnérables? La réponse est probablement oui! Est-ce que votre responsabilité peut être mise en cause? La réponse est certainement oui!

Deux études pancanadiennes ont quantifié l’ampleur de la maltraitance à l’égard des personnes aînées vivant à domicile. Elles remontent à la fin des années 1980 et 1990. La première rapportait que 4 % des personnes aînées vivant à domicile se voyaient infliger au moins une forme de maltraitance par leurs proches. Dans la seconde, cette proportion grimpait à 7 %.[1]

Il est difficile d’établir le pourcentage de personnes aînées maltraitées pour différentes raisons. Soulignons, par exemple, que plusieurs sont peu enclines à demander de l’aide. Différents motifs expliquent cette situation, tels que la peur des répercussions d’une dénonciation, les sentiments de honte, de culpabilité, d’humiliation, de tristesse et de colère, la dépendance à l’égard de la personne maltraitante, la perte d’autonomie, la méconnaissance de la maltraitance, la résignation ou la banalisation, la méconnaissance des ressources d’aide et la méfiance à les utiliser, la protection de l’honneur de la famille, etc.

Si vous y réfléchissez quelques minutes, vous trouverez sûrement quelques cas de maltraitance dont vous avez entendu parler dans votre cercle d’amis ou dans votre famille. Prenez quelques minutes pour y penser.

L’Institut de la statistique du Québec évaluait en 2018 que l’on retrouvait 1 553 112 personnes de 65 ans et plus dans la province. Si le taux de prévalence de la maltraitance est encore de 7 %, il y aurait donc 108 718 aînés maltraités à l’heure actuelle.

En raison du vieillissement de la population, donc de l’augmentation du poids démographique des aînés, le nombre de personnes maltraitées ira en augmentant, et ce, même si la prévalence de la maltraitance demeure inchangée. Ainsi, vers 2024, avec 2 000 000 individus de 65 ans et plus, on parlerait de 140 000 cas de maltraitance.

Selon la littérature scientifique, les types de maltraitance les plus répandus demeurent la maltraitance financière et la maltraitance psychologique. La maltraitance financière fait l’objet d’une attention particulière de la part de nombreux intervenants depuis plusieurs années. L’Autorité des marchés financiers nous demande justement aux conseillers d’avoir une politique face à la maltraitance financière.

Les données recensées par la Ligne Aide Abus Aînés depuis sa mise en activité, le 1er octobre 2010, tendent à confirmer les résultats tirés de la littérature scientifique. Les chiffres qui suivent constituent un bilan statistique des appels qui ont été traités par la Ligne du 1er octobre 2010 au 31 décembre 2016.

À la lumière de cette évaluation sommaire, il y aurait eu au Québec, en 2018, 35 580 cas de maltraitance financière et il y en aura, en 2024 près de 45 800. Traduit autrement, il s’agit d’un aîné sur 33, selon les études citées précédemment. Si vous avez un portefeuille de 500 clients aînés, 12 sont, statistiquement, victimes de maltraitance financière.

En 2015-2016, le Curateur public du Québec a traité 130 dossiers au sujet desquels un abus financier était soupçonné.

Sur l’ensemble des appels reçus, 70 % des situations de maltraitance rapportées mettaient en cause une femme aînée, comparativement à 24 % pour un homme.

Les conseillers peuvent faire la différence. Votre client décide-t-il par lui-même ou fait-il systématiquement référence à un tiers lorsque vient le temps de faire un choix? Portez aussi attention aux signes de déclin cognitif, ils pourraient vous mettre la puce à l’oreille. Votre intervention pourrait prévenir de fâcheuses situations.

Agissez!

[1] Les données utilisées tout au long de ce texte proviennent du Plan d’action gouvernemental pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées 2017-2022 et des Perspectives démographiques du Québec et des régions, 2011-2061.

Famille sous un parapluie rouge

Michel Mailloux, du Collège des professions financières

Michel Mailloux, MBA, est planificateur financier et éthicien. Il dirige le Collège des professions financières. Le Collège est un fournisseur autorisé par l’Autorité des marchés financiers pour les formations nécessaires à l’entrée en carrière en assurance de personnes (Programme de qualification en assurance de personnes, ou PQAP). Michel travaille aussi comme intervenant en conformité à travers sa firme Mailloux & associés.