Commissions intégrées : la fin approche-t-elle?

Par La rédaction | 11 janvier 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont lancé mardi une consultation de 150 jours sur « les répercussions possibles de l’abandon des commissions intégrées ». Si elles soutiennent que la décision n’est pas encore prise quant à la fin de cette forme de rémunération, elles ne se montrent pas tendre à son endroit.

L’opération a été annoncée dans un communiqué accompagné d’un rapport de 182 pages destiné à informer les professionnels du secteur de l’état de leurs recherches dans ce dossier épineux qui divise la profession. Selon les ACVM, l’objectif est de « recueillir des commentaires sur l’option d’abandonner les commissions intégrées et les effets éventuels d’un tel changement sur les investisseurs et les participants au marché du Canada ».

Plusieurs « éléments probants » montrent que le paiement de ces commissions « soulève des enjeux de protection des investisseurs et d’efficience du marché », ce qui donne à penser qu’« il y a lieu d’envisager une transition vers des mécanismes de rémunération directe dans le cadre desquels l’investisseur versera directement au courtier sa rémunération », avertissent d’emblée les ACVM.

L’INDUSTRIE APPELÉE À COMMENTER

« À notre avis, pour régler ces enjeux, il est nécessaire d’envisager et d’évaluer la transition vers des mécanismes de rémunération directe », confirme le président des ACVM et PDG de l’Autorité des marchés financiers, Louis Morisset. Il se dit toutefois « bien conscient de la nécessité d’évaluer soigneusement les répercussions possibles avant de prendre une décision ».

Compte tenu de l’ampleur du changement envisagé, la consultation sera plus longue que d’ordinaire, indiquent les Autorités, qui invitent les intervenants à formuler des commentaires ou à transmettre des mémoires avant le 9 juin prochain. « Les ACVM prendront en considération les commentaires reçus par écrit […] avant de déterminer les mesures réglementaires à adopter », assurent-elles dans le communiqué.

Les professionnels du secteur sont notamment invités à commenter les points suivants :

  • Quels seraient les effets potentiels de l’abandon des commissions intégrées sur les investisseurs et sur les participants au marché, en particulier sur la prestation et l’accessibilité des conseils pour les investisseurs canadiens ainsi que sur les modèles d’affaires et la structure du marché?
  • Si les ACVM décidaient d’aller de l’avant, quelles seraient les mesures susceptibles d’aider à atténuer les répercussions négatives d’un tel changement?

TROIS PRÉOCCUPATIONS PRINCIPALES

Pour justifier leur souhait « d’aller de l’avant » dans ce dossier, les Autorités pointent « trois principales préoccupations en matière de protection des investisseurs et d’efficience du marché » :

  • selon elles, les commissions intégrées donnent lieu à des conflits d’intérêts qui entraînent un décalage entre les intérêts des gestionnaires de fonds d’investissement, des courtiers et des représentants et ceux des investisseurs;
  • l’intégration des commissions limite la connaissance, la compréhension et le contrôle des coûts de la rémunération des courtiers par les investisseurs;
  • les commissions qui sont versées ne concordent généralement pas avec les services fournis aux investisseurs, jugent-elles.

« CONCILIER L’INTÉRÊT DES INVESTISSEURS ET DES GESTIONNAIRES »

Face à cette situation, les ACVM estiment qu’« il faut envisager de passer à des mécanismes de rémunération directe pour gérer ou atténuer ces enjeux ». Selon elles, l’adoption d’un tel modèle permettrait de :

  • mieux concilier les intérêts des investisseurs et ceux des gestionnaires de fonds d’investissement, des courtiers et des représentants;
  • clarifier l’information sur les services fournis et leurs coûts;
  • faire participer les investisseurs directement au processus de rémunération du courtier et du représentant.

Dans le document qu’elles ont publié, les Autorités rappellent que « toute proposition de réglementation visant à abandonner les commissions intégrées toucherait l’ensemble des fonds d’investissement et des billets structurés offerts au moyen d’un prospectus ou sur le marché dispensé ».

Elles soulignent également que l’abandon de ces commissions « interdirait tout paiement direct ou indirect au courtier par une autre personne que l’investisseur pour l’acquisition ou la détention de titres de fonds d’investissement ou de billets structurés ».

LES HONORAIRES, PAS LA SEULE OPTION

L’abandon des commissions ne signifierait pas que les courtiers et leurs représentants doivent adopter des mécanismes de rémunération à honoraires, ajoutent cependant les ACVM.

« Les mécanismes de paiement direct sont variés et comprennent les commissions d’entrée, les honoraires horaires, les honoraires fixes, les honoraires fondés sur un pourcentage des actifs et tout autre mécanisme approprié où la rémunération n’est pas intégrée dans le produit, mais payée exclusivement par l’investisseur », détaillent-elles.

Le document évalue par ailleurs les conséquences possibles de l’abandon des commissions, tant pour les investisseurs que pour les gestionnaires. Les ACVM estiment qu’une telle option aurait plusieurs effets positifs, dont :

  • l’arrivée sur le marché de nouveaux fournisseurs et distributeurs de produits à faible coût;
  • l’accroissement de la concurrence sur le plan des prix et la diminution des frais de gestion des fonds;
  • un changement d’orientation des recommandations au profit des produits à faible coût;
  • une meilleure concordance entre les frais payés par les investisseurs pour recevoir des conseils financiers et les services que leur offrent les courtiers et les représentants.

« D’après nos recherches, il est peu probable que l’abandon des commissions intégrées se traduise par une importante carence en matière de conseils pour les investisseurs individuels au Canada », affirment les Autorités, répondant ainsi à un argument souvent avancé par les opposants à l’abolition des commissions intégrées.

La rédaction