Les associations de consommateurs contre PL 141

Par La rédaction | 17 janvier 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
4 minutes de lecture
Piotr Adamowicz / 123RF

« Si d’emblée le projet de loi 141 permet une meilleure protection des consommateurs, nous croyons plutôt que son adoption présente une détérioration de la situation », affirme Option Consommateurs (OC).

L’organisme, qui a pour mission de promouvoir et de défendre les droits des consommateurs, a uni ses forces à la Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ) pour soulever leurs préoccupations communes au sujet du projet de loi 141. Ces deux organismes ont présenté les problèmes qu’ils ont ciblés dans ce projet de loi lors d’une conférence de presse mardi, et leurs critiques sont nombreuses.

OC et la CACQ craignent surtout une élimination du devoir de conseil. Le projet de loi modifie la définition du personnel qualifié en enlevant le rôle de conseil, ce n’est donc plus un acte réservé seulement aux représentants. Des commerçants, comme les concessionnaires automobiles, pourront ainsi offrir des conseils aux consommateurs sans certification.

« En assurance, les consommateurs sont très vulnérables, car il s’agit de produits très complexes, rappelle Me Annik Bélanger-Kramms. Or, l’obligation de conseil est importante et contribue grandement à protéger les consommateurs. » Si les représentants certifiés sont liés à des obligations, des devoirs de compétence, d’information et de conseil, les vendeurs n’ont pas le même degré de responsabilité.

Les deux associations s’indignent également de l’encadrement insuffisant pour la distribution de produits d’assurance en ligne. Le projet de loi 141 permet à un cabinet d’assurance de vendre des produits d’assurance en ligne du moment qu’il emploie un représentant certifié qui peut pratiquer dans cette discipline. Ainsi, des vendeurs pourraient proposer des assurances à des clients tant qu’un représentant certifié travaille dans leur cabinet.

De plus, il n’y a aucune limite quant au type de produits d’assurance pouvant être vendus en ligne, ainsi même les produits les plus complexes pourraient être distribués par ce canal.

PLUS DE POUVOIR POUR LES ASSUREURS

Les mécanismes de règlement des différends vont-ils profiter aux consommateurs? Pour les organismes de protection, la réponse est négative. « Le projet de loi 141 ne règle pas les problèmes inhérents au système actuel. Soit il ne change rien, soit il empire la situation », affirme Me Annik Bélanger-Kramms.

Ainsi, le projet de loi ne change pas le fait que la médiation ne soit accessible aux consommateurs que si l’assureur y consent. Dorénavant, il impose même le partage des frais entre l’assureur et le plaignant. « Ces mesures sont inacceptables, car elles donnent trop de pouvoir aux assureurs et ne tiennent pas compte des différences économiques entre les parties », s’insurge Christian Corbeil, directeur général d’OC.

Les organismes jugeraient préférable qu’étant donné l’asymétrie économique, la médiation soit offerte aux consommateurs comme c’est déjà le cas dans le domaine des services bancaires.

ABOLITION DES CHAMBRES

OC et la CACQ déplorent également l’abolition de la Chambre de l’assurance de dommage et de la Chambre de la sécurité financière (CSF) pour intégrer leurs activités à celles de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Selon les associations de consommateurs, « on va surcharger un organisme réglementaire qui ratisse déjà très large ».

Me Annik Bélanger-Kramms a fait valoir que l’AMF était déjà responsable de ce qui avait trait à la stabilité de ses entreprises et à l’encadrement des pratiques de marché de ses entreprises. En plus de ces deux mandats, en lui transférant les activités de la CSF, on lui ajouterait une charge plus déontologique. Selon Me Bélanger-Kramms, l’AMF risque de négliger certaines de ses activités, voire de les déléguer.

Selon OC, l’Autorité et la CSF ont un rôle complémentaire et le système actuel fonctionne bien. Si la CSF est intégrée à l’AMF, l’organisme craint un affaiblissement de l’encadrement des représentants au profit de l’encadrement des cabinets. Il prône donc une collaboration plus étroite entre les Chambres et l’AMF.

Les deux organismes des consommateurs ont été convoqués à présenter leur avis et leurs critiques sur le projet de loi 141 à la Commission parlementaire lors des consultations particulières et auditions publiques des 17 et 18 janvier. La CACQ s’exprimera ainsi le 17 janvier et OC le 18.

Plusieurs organisations et experts demandent à être entendus

Plusieurs experts et entreprises, qui préfèrent garder l’anonymat, n’ont pas été invités à se prononcer lors des consultations parlementaires pour le projet de loi 141, malgré leur demande. Ces groupes, qui selon eux conseillent plus de 1,5 million de Québécois, pensent que le ministre des Finances et les membres de la Commission devraient ajouter une journée supplémentaire d’auditions, car cette loi les touche de près.

Comme leur demande ne semble pas être prise en compte, ces intervenants ont décidé de prendre parole d’eux-mêmes, ce vendredi, à Québec.

La rédaction