Miser sur le collectif, c’est payant!

Par Didier Bert | 18 mars 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Seulement 12 % des conseillers québécois détiennent un permis dans la discipline de l’assurance collective de personnes. Pourtant, ceux qui ajoutent cette corde à leur arc y trouvent des avantages indéniables. À condition de s’y prendre de la bonne manière.

Le cumul de disciplines individuelles et collectives permet d’abord au conseiller d’être en position de répondre à l’ensemble des besoins des propriétaires d’entreprise. « Mes clients bénéficient d’un guichet unique pour toutes leurs questions d’assurance et pour leurs placements », illustre Patrice Beaudoin, conseiller en assurance et rentes collectives, conseiller en sécurité financière et planificateur financier à Boisbriand.

Cette position est également une force face à la concurrence. « Cela évite qu’un autre conseiller entre dans la relation », résume Francis Frappier, propriétaire de Finexia, à Saint-Jean-sur-Richelieu, conseiller en sécurité financière, conseiller en assurances et rentes collectives et représentant en épargne collective. « Mais le lien tissé avec les produits individuels est toujours plus fort, poursuit-il. On connaît la conjointe et les enfants du client. Il a rempli un long questionnaire pour son assurance invalidité… alors qu’en collectif on se limite à deux ou trois questions pour vérifier l’assurabilité. »

Quels permis ?

L’ASSURANCE COLLECTIVE REGROUPE TROIS TITRES :

  • Le conseiller en assurance et rentes collectives peut offrir des produits et des services-conseils relatifs aux régimes d’assurance et de rentes collectives. Il doit avoir réussi les quatre cours obligatoires de l’assurance collective.
  • Le conseiller en régimes d’assurance collective de personnes ne peut offrir que des produits et des services-conseils relatifs aux régimes d’assurance collective. Il doit avoir réussi les trois cours obligatoires des régimes d’assurance collective.
  • Le conseiller en régimes de rentes collectives de personnes ne peut offrir que des produits et des services-conseils relatifs aux régimes de rentes collectives. Il doit avoir réussi les troi s cours obligatoires des régimes de rentes collectives.

Davantage d’informations sur le site de l’AMF : www.lautorite.qc.ca > Section pour les professionnels > Devenir un professionnel > Assurances > Assurance collective de personnes.

MULTIPLIER LES VENTES

Ce positionnement permet aussi de réaliser des ventes croisées. « Quand un propriétaire d’entreprise aime mon travail, il peut me demander de mettre en place un régime collectif pour ses employés », illustre Francis Frappier.

Et cela fonctionne en sens inverse… « Quand les liens de confiance sont établis avec des décisionnaires d’entreprise, on peut aborder les stratégies de planification personnelle », détaille Denis Antonelli, président de Groupe Conseil Antonelli et Morel, à Rosemère, qui cumule les titres de conseiller en assurance et rentes collectives et conseiller en sécurité financière. En devenant le conseiller personnel du gestionnaire, « le représentant sécurise sa position comme intermédiaire spécialisé dans le domaine de l’entreprise », ajoute M. Antonelli.

Et quand le propriétaire de l’entreprise accorde sa confiance au représentant pour l’assurance collective, il devient une véritable référence qui lui donne accès aux membres du personnel. « Les gens se disent que si leur patron fait confiance à ce représentant, c’est qu’il est bon, témoigne Patrice Beaudoin. Dans les PME, c’est facile de connaître tout le monde. Et quand on a de nombreux clients dans la même entreprise, cela devient impensable de changer de conseiller pour le collectif. » Cette position rend la responsabilité du conseiller encore plus grande, prévient M. Beaudoin, car si un problème se présente, tout le monde sera au courant.

DES REVENUS RÉCURRENTS

Autre bonne nouvelle, chaque contrat en assurance collective octroie une rémunération récurrente qui peut être aussi importante d’une année à l’autre, alors que le représentant en produits individuels voit les revenus de chaque contrat décroître dans le temps. Auprès des PME, le représentant est le plus souvent payé en commissions pour la mise en place et le suivi des régimes d’assurance collective. Il faut aller dans les grandes entreprises pour voir des régimes de rentes collectives, payés en honoraires, précise Michèle Frenette, présidente-fondatrice de GRMF, à Boucherville, conseillère en assurance et rentes collectives spécialisée dans les régimes de retraite collectifs.

Enfin, pour les représentants qui rêvent d’un travail de jour, l’assurance collective est parfaite. « L’assurance collective, c’est du 9 à 5 », souligne Denis Antonelli. Ce dernier avait commencé sa carrière dans la vente de produits individuels. « Je finissais mes journées tardivement. Et quand je suis devenu père, j’ai voulu être présent pour mes enfants. » Il s’est alors progressivement tourné vers l’assurance collective. « En collectif, on rencontre les prospects à leur bureau. Plus on développe une clientèle de collectif, plus on travaille de jour, et plus on passe de temps avec sa famille. »

DES ÉTAPES À FRANCHIR

Ajouter l’assurance collective à sa gamme de services individuels n’est pertinent qu’à la condition que le représentant détienne déjà une clientèle individuelle de gens d’affaires, soit propriétaires d’entreprise, soit décisionnaires sur le volet collectif. « C’est encore plus vrai au Québec que dans d’autres provinces canadiennes, affirme Denis Antonelli. Ici, on est très porté sur les relations interpersonnelles et la confiance. On ne peut pas entrer dans une entreprise sans y connaître quelqu’un. »

Détenir une clientèle individuelle est d’autant plus important que cela prend du temps avant de parvenir à signer des contrats collectifs. « Il y a beaucoup à gagner si on est patient, si on voit le collectif comme une diversification de son portefeuille déjà établi », poursuit-il.

Sinon, un partenariat avec un autre professionnel, bien placé pour cerner les besoins de l’entreprise sans être en mesure de les combler, peut permettre d’y mettre un pied. « La porte d’entrée peut être le comptable », souligne Michèle Frenette.

SAVOIR S’ENTOURER

Par la suite, le représentant doit rester entouré de professionnels de différents horizons afin de pouvoir répondre aux demandes de ses clients qui, en ajoutant les contrats individuels et collectifs, peuvent requérir de très vastes expertises. Certains collaborent avec des firmes établies, assureurs ou courtiers, qui leur offrent le soutien nécessaire.

Autres alliés des nouveaux représentants en produits collectifs : les assureurs, qui n’hésitent pas à les encourager à ajouter la discipline collective à leur offre de services. C’est d’ailleurs en tant qu’employée d’un assureur que Michèle Frenette a fait ses premières armes dans le domaine. « J’avais débuté en me lançant à mon compte, mais je n’avais pas de réseau de contacts », indique-t-elle. Après 12 années chez cet assureur, elle s’est à nouveau mise à son compte, avec succès cette fois, car bien entourée.

QUID DU PERMIS ?

Bien entendu, des conseillers en produits individuels peuvent se contenter d’établir des partenariats avec d’autres conseillers, spécialisés en produits collectifs, en échangeant des références de clients. Mais le permis en assurance collective présente un avantage certain : « Il est beaucoup plus facile de faire reconnaître son portefeuille de clients au moment de le vendre, plutôt que de n’avoir que des références », souligne Francis Frappier.

Qui dit permis supplémentaire dit aussi unités de formation continue (UFC) supplémentaires. « Ça prend du temps, mais ça vaut la peine », assure Patrice Beaudoin. À condition d’arriver à un volume d’affaires suffisant.

L’opportunité du RVER

Le contexte n’a probablement jamais été aussi favorable aux conseillers en assurance collective. La mise en place du régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) oblige les PME à se doter d’outils d’épargne-retraite pour leurs employés d’ici trois ans : avant le 31 décembre 2016 pour les entreprises comptant plus de 20 employés, et avant le 31 décembre 2017 pour celles employant de 10 à 19 personnes.

Or, « les PME sont rares à offrir des régimes de rentes collectives à leurs employés », observe Francis Frappier.

À qui ce développement soudain du marché profitera-t-il ? Certes, les conseillers en assurance de personnes et ceux en régimes d’assurance collective ont le droit de proposer le RVER aux entreprises jusqu’au 1er janvier 2016. Mais le peu d’empressement des entreprises à mettre en place le RVER laisse présager une activité considérable pour les conseillers en régimes de rentes collectives dès 2016. « Les chefs d’entreprise bougeront quand ils seront au pied du mur, juste avant la date limite, mais ils ont tellement d’autres choses à faire », observe M. Frappier.


• Ce texte est paru dans l’édition de mars 2015 de Conseiller.

Didier Bert

Didier Bert est journaliste indépendant. Il collabore à plusieurs médias sur les thèmes de l’économie, des finances et du droit.