Après la réticence, la satisfaction

Par Pierre-Luc Trudel | 28 octobre 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Depuis de nombreuses années déjà, Ghislaine Boisvert, gestionnaire administrative à la Clinique dentaire des Vallées de l’Outaouais, souhaitait offrir une solution d’épargne-retraite à ses employées. C’est finalement la venue du régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) qui l’a convaincue de passer à l’action. Et malgré une période d’appréhension, l’expérience s’est jusqu’à maintenant révélée des plus positives.

ConseillerPME : La planification de la retraite des employées était-elle une préoccupation importante au sein de votre entreprise avant la mise sur pied du RVER? Ghislaine Boisvert : On a souvent eu de grosses discussions avec les employées au sujet de la planification de la retraite et je ressentais depuis longtemps le besoin de mettre en place un régime d’épargne-retraite pour sensibiliser le personnel. Certaines employées travaillaient chez nous depuis près de 20 ans sans avoir mis d’argent de côté et ressentaient beaucoup d’insécurité. Pourtant, j’ai toujours pensé qu’elles méritent toutes une belle retraite.

Pourquoi avoir opté pour le RVER? Plusieurs éléments ont joué en sa faveur, notamment sa grande flexibilité. Je trouvais intéressant que ni les employés ni l’employeur n’aient l’obligation de contribuer, mais que l’inscription soit tout de même automatique. Le fait que la cotisation de l’employeur soit immobilisée et non soumise aux charges sociales, contrairement au régime enregistré d’épargne-retraite (REER) collectif, représente également un net avantage à mon avis. C’est ce qui a fait pencher la balance du côté du RVER.

Comment les employées ont-elles réagi à l’arrivée du RVER? Lorsque j’avais voulu implanter un REER collectif il y a quelques années, il y avait eu une certaine résistance des employées, qui craignaient une perte de revenu. Elles avaient déjà trouvé que la mise en place du régime d’assurance collective avait diminué le montant de leur paie. Je préférais donc y aller tranquillement pour ne pas les brusquer. Cela dit, maintenant que les employées ont compris et apprivoisé le RVER, elles sont très satisfaites et fières de voir l’argent qu’elles ont réussi à accumuler en seulement cinq mois. Étant donné que les cotisations sont non imposables, elles voient peu d’impact sur leur paie.

Les participantes ont-elles conservé le taux de cotisation par défaut ou bien décidé de personnaliser leur niveau de contribution? Quelques-unes ont conservé l’option par défaut de 2 % du salaire, une personne a opté pour un montant plus élevé et six autres ont choisi de verser un montant fixe après avoir élaboré leur budget. Mais dès l’année prochaine, je suis convaincue que bon nombre d’entre elles vont augmenter leur taux de cotisation.

Si l’inscription n’avait pas été automatique, comme dans le cas d’un REER collectif par exemple, pensez-vous que la participation aurait été aussi forte? Je pense qu’au moins trois employées qui ont conservé le taux de cotisation par défaut n’auraient peut-être pas fait l’action de s’inscrire si ça n’avait pas été un régime à adhésion automatique. Seules quelques employées, dont les conjoints cotisaient déjà à un régime de retraite ou à un REER, ont décidé de se désinscrire.

Offrez-vous une cotisation de contrepartie aux versements des employés? Pas à l’heure actuelle, mais j’aimerais beaucoup que ce soit le cas. C’est dans les plans. On verse déjà des bonus à nos employées chaque année. Donner ces bonus sous forme de cotisations dans le RVER est une piste que nous envisageons. Mais c’est certain que, d’une façon ou d’une autre, l’employeur va contribuer éventuellement.

Quel a été le plus grand défi dans le processus d’implantation? Je dirais que, au début, les employées me posaient beaucoup de questions et j’ai réalisé que je n’étais pas forcément assez bien préparée pour y répondre. Elles s’interrogeaient beaucoup au sujet des choix de placements, mais ce n’est pas vraiment mon rôle de les aider à ce sujet-là. Heureusement, j’ai pu les diriger vers le service à la clientèle de notre assureur (Manuvie), ce qui les a grandement rassurées.

Pensez-vous que le RVER va vous permettre d’être plus concurrentiel en tant qu’employeur? Dans la région d’Ottawa, il y a beaucoup de fonctionnaires avec de très bons avantages sociaux. J’ai d’ailleurs déjà perdu de très bons employés parce que l’offre d’avantages sociaux de la clinique était trop faible. Je pense que le RVER va nous permettre de nous démarquer par rapport aux autres PME et nous aider à attirer et conserver notre personnel.

Quels conseils donneriez-vous à une PME qui veut mettre sur pied un RVER pour ses employés? Ne pas attendre à la dernière minute, histoire d’éviter les pénalités potentielles! À ce sujet, je trouve que le gouvernement devrait agir un peu plus et mieux informer les PME concernant la loi sur les RVER. Personnellement, je n’ai rien reçu de leur part. Sinon, je considère aussi qu’il est important de faire affaire avec un assureur solide et de demeurer prudent face au grand nombre de sollicitations de la part des courtiers. Finalement, si c’était à refaire, je me préparerais beaucoup mieux à répondre aux questions du personnel et à leur communiquer les bonnes informations.

Jusqu’à présent, vous tracez donc un bilan positif de votre expérience du RVER? Tout à fait, je n’ai pas vu de désavantages pour le moment. Une fois le processus d’implantation complété, le RVER n’apporte pas vraiment de coûts et de charge de travail supplémentaires pour les entreprises. Si ce choix avait existé il y a dix ans, je l’aurais fait. À mon avis, la loi sur le RVER aurait dû être instaurée bien avant. C’est une bonne façon de soutenir et respecter les employés qui se soucient de leur retraite.

Pierre-Luc Trudel