Ramener son client sur un terrain plus rationnel

Par Didier Bert | 12 novembre 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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5. Manquer d’expérience Séduits par les résultats des investisseurs à succès, les investisseurs moins expérimentés tendent à suivre leurs conseils. Mais leurs transactions surviennent toujours avec un certain retard, quand les premiers ont déjà fait leur argent. « La plupart des gens ont un comportement moutonnier, avec effet d’entraînement, qui peut se traduire par un excès de spéculation », constate William André Nadeau.

Manquant d’expérience et d’informations, l’investisseur néophyte n’a pas de vision à long terme du marché. Il va donc se fier aux comportements des autres investisseurs, oubliant sa stratégie initiale ou refusant de travailler à mieux connaître ses titres.

La raison cède alors la place à l’émotion. À ce moment, « si le conseiller est lui-même très émotif, le client va l’être aussi, par mimétisme. Il est impossible d’être plus calme que son conseiller », soutient Sébastien Trudel. Le conseiller doit alors prendre suffisamment de recul. « Si les médecins pleuraient avec tous leurs patients, ils ne seraient pas eux-mêmes. Ils doivent comprendre pour pouvoir aider », souligne M. Nadeau.

En préservant sa rationalité, le conseiller peut jouer pleinement son rôle auprès de son client. Pour devenir zen, l’investisseur doit être engagé dans la gestion de son portefeuille, affirme M. Trudel. « Il doit comprendre que gérer son portefeuille, ça ne revient pas seulement à faire des transactions. Cette opération facile se ferait en deux clics et pour pas cher ! Mais le conseiller apporte une valeur ajoutée en aidant son client à établir la quantité de risque dans son portefeuille, et en l’aidant à tenir bon par la suite », recommande M. Trudel.

6. Se murer dans le silence Vous n’avez plus de nouvelles d’un client dont les placements se révèlent affligeants. Si vous craignez de l’appeler ou même de voir son nom s’afficher quand le téléphone sonne, vous êtes déjà « dans une spirale anticommunicationnelle », comme l’appelle l’auteur Sébastien Trudel. De son côté, le client commence à remettre en question toute sa politique de placement. Il se demande s’il ne devrait pas vendre tous ses titres. Le malaise devient profond. Ces signes devraient au contraire vous inciter à communiquer davantage avec le client, croit M. Trudel.

« On doit devenir incontournable quand le marché s’effondre : on se demande qui appellera le premier en cas de problème, affirme M. Trudel. C’est au conseiller de le faire; il doit sentir que le client a besoin d’être conforté »

« Durant la crise financière, certains avaient tellement peur de téléphoner à leurs clients qu’ils les ont perdus à ce moment-là, souligne Sylvain B. Tremblay. Pour d’autres, la crise a été une occasion de gagner des clients. Ils étaient capables de les appeler et de leur expliquer qu’ils pouvaient profiter de la baisse pour acheter, par exemple. »

7. Ne pas reconnaître ses erreurs Il est plus facile de se vanter de ses bons coups que de parler de ses pertes majeures. C’est humain, mais cette attitude empêche les investisseurs de tirer les leçons de leurs expériences.

En vantant ses bons résultats, l’investisseur irrationnel a aussi tendance à se les approprier. « On s’attribue à soi-même les bons coups, et au marché, les mauvais », note Jean-Sébastien Michel. Résultat : l’investisseur ne veut plus croire qu’il peut échouer. Il tardera donc à vendre un actif qui tend à se dévaloriser.

Le conseiller peur aider le client à prendre conscience de son comportement. « C’est important de savoir qu’on ne retient que nos bons coups et qu’on oublie nos moins bons. Cette prise de conscience nous permet d’avoir un regard introspectif, de prendre conscience de nos erreurs et de mesurer leurs conséquences », croit Sébastien Trudel.

Cependant, les clients sont de plus en plus conscients des mauvais coups qu’ils font, affirme Sylvain B. Tremblay. « Ils en parlent plus ouvertement. Avec la claque reçue en 2008, les gens se sont ouverts. Ils ont été vaccinés pour un certain temps. Mais il suffirait de six mois d’euphorie pour qu’ils oublient. »


Cet article est tiré de l’édition de novembre du magazine Conseiller.

Didier Bert

Didier Bert est journaliste indépendant. Il collabore à plusieurs médias sur les thèmes de l’économie, des finances et du droit.