Assurance : l’innovation à travers le chaos

Par Nathalie Côté | 4 avril 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Famille sous un parapluie rouge
Photo : Jirsak / iStock

Des milliards d’objets connectés, des milliers de plateformes de réseaux sociaux, une technologie qui évolue à vitesse grand V… L’industrie de l’assurance vit d’importants bouleversements. Comment tirer son épingle du jeu? Peut-être en créant une startup au sein même des institutions financières, répond un joueur dominant de la scène québécoise.

C’est le pari d’Industrielle Alliance, qui a créé La Zone en janvier 2016. Son slogan : sors de ta zone. Assurer du vin ou des billets de spectacle : pourquoi pas? Le petit groupe multidisciplinaire d’une douzaine de personnes a ainsi pour mission de tester différentes idées sortant des paradigmes traditionnels.

Deux de ses membres ont raconté leur expérience hier dans le cadre d’Insurtech QC, un événement portant sur les technologies dans le domaine de l’assurance, organisé dans le cadre de la Semaine numérique de Québec.

OSER SE TROMPER

Au sein de La Zone, l’échec n’est pas un tabou. « On a échoué souvent au cours de notre première année, indique France Lessard, vice-présidente Projets spéciaux à Industrielle Alliance. Toutes ces expérimentations nous ont permis d’apprendre énormément et de travailler encore mieux. »

Pour les membres de ce club sélect, l’échec est un moyen de cheminer et d’apprendre de ses erreurs. Par exemple, l’idée d’une assurance pour les billets de spectacles et événements, qui aurait permis au client de se faire rembourser si le petit dernier tombait malade le jour de la représentation, semblait bonne. Mais dès le départ, les clients n’ont montré aucun intérêt. Bye bye, assurance billets!

Consulter les clients dès le début fait d’ailleurs partie intégrante du processus de La Zone. « On peut créer une page web [qui explique l’idée derrière le produit] en quelques heures, puis aller s’asseoir avec les gens, par exemple au centre commercial Place Sainte-Foy, raconte Jean-François L’Heureux, conseiller stratégique évolution et tendance à Industrielle Alliance. Là, on recueille les commentaires des clients. » Si l’idée passe le test, les différentes observations amassées permettent de continuer à l’améliorer.

L’équipe de La Zone mise également sur la simplification. « Malheureusement, les clients ne trouvent pas ça si cool que ça, magasiner une assurance, lance Mme Lessard. Suivons les lois et les règlements, mais simplifions les clauses. Les compagnies d’assurance ont-elles besoin de se surprotéger ainsi? [Devant cette multiplication des clauses], le client a l’impression que l’assurance est juste là pour qu’il se fasse avoir. Il ne comprend pas tout [étant donné la complexité des clauses], et s’il comprenait, il aimerait peut-être plus l’assurance. Il faut valider avec les clients ce qu’ils veulent et ce qu’ils comprennent. »

À travers ces expériences naissent de bonnes idées qui finiront par faire leur chemin à travers les différents secteurs d’activité de l’entreprise. Sans vouloir divulguer trop de détails, le groupe révèle travailler activement sur un projet en assurance vie à l’heure actuelle.

L’UNION FAIT LA FORCE

L’entreprise mise également sur des partenariats avec des maisons d’enseignement et des startups. C’est ce qui a mené à la naissance d’Alfred Secure, la première assurance numérique destinée à la couverture du vin. Quelques dizaines de bouteilles précieuses dont la valeur a augmenté ces dernières années sont éligibles à cette assurance.

Mais même lorsque les startups disent très bien connaître leurs clients, l’équipe de La Zone retourne les consulter. « Dans 90 % des cas au moins, lorsqu’on est allés rencontrer les clients, l’idée ne correspondait pas à ce qu’ils recherchaient, explique M. L’Heureux. Une entreprise nous a même demandé d’y retourner une deuxième fois et de nous accompagner tellement elle était convaincue de son idée. On a fait cheminer le projet et il va aboutir, mais l’idée de base n’était pas ce qui convenait présentement. »

Cette validation tout au long du processus permet d’éviter de dépenser une fortune en promotion plus tard pour essayer de vendre un produit qui ne convient pas, fait-il valoir.

« La solution pour y voir plus clair dans ce chaos d’occasions qui se présentent à nous, c’est la connectivité réelle avec le client », résume Mme Lessard.

RÉSISTANCE AU CHANGEMENT

Les entreprises d’assurance étant plutôt traditionnelles de nature, ce changement de culture reste encore à étendre à toute l’organisation. « Est-ce que c’est fait dans l’ensemble de l’entreprise? C’est sûr que non, convient France Lessard. Mais tous les segments y travaillent. »

La vice-présidente Projets spéciaux souligne que même si les innovations de La Zone sont essentiellement numériques, on est loin du jour où les humains ne seront plus nécessaires.

« Pour l’instant, ce sont davantage des outils pour les aider dans leur travail, indique-t-elle. De plus, lorsqu’on parle avec les jeunes de la génération Z, on se rend compte qu’ils veulent parfois se débrouiller seuls, mais désirent encore pouvoir parler à quelqu’un lorsqu’ils en ressentent le besoin. »

Nathalie Côté