Cinq leçons pour se lancer en affaires

17 février 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Il n’y a pas de miracle: les conseillers indépendants qui réussissent ont investi beaucoup de temps et d’énergie dans leur entreprise. Selon notre site jumeau Advisor.ca, les 10premières années en affaires dans l’industrie du conseil financier peuvent se révéler précaires. «Quatre-vingt pour cent des gens qui se lancent dans cette profession abandonnent au cours des cinq premières années», dit Mark Halpern, de la firme IllnessProtection.com.

Intéressé de savoir comment les conseillers indépendants peuvent s’en sortir, Advisor.ca a questionné une demi-douzaine de professionnels aguerris. Leurs commentaires, remarques et suggestions peuvent se résumer en cinq leçons.

  • Prospectez votre marché naturel, mais élargissez-le

Les conseillers qui débutent leur carrière ont le réflexe de solliciter les membres de leurs familles. Bien que l’entourage immédiat puisse constituer une réserve intéressante de prospects, ce n’est peut-être pas une bonne idée de nouer une relation d’affaires avec eux. «Ils peuvent vous aider à bâtir vos actifs, mais vous devez les traiter comme des clients, non pas comme papa, maman ou votre petit frère. Ce n’est pas évident. Ils risquent d’être des clients difficiles», souligne Ron Harvey, planificateur financier à IPG Ottawa Central.

Si vous tenez absolument à servir votre parenté, attendez d’être établi dans le métier et assurez-vous que ce sont les membres de votre famille qui font les premiers pas pour obtenir vos conseils.

Dans ces circonstances, où les conseillers qui débutent peuvent-ils trouver leurs clients? Jeannette Brox, planificatrice financière au Groupe Investors, dit qu’elle a choisi de rencontrer ses prospects en personne dans des salons du placement, au cours de séminaires qu’elle organisait et dans des centres commerciaux où elle plantait ses kiosques. Elle s’efforce de trouver des clients avec qui elle partage des affinités, car, estime-t-elle, cela favorise le développement des relations à long terme. Une fois ces clients dénichés, Jeannette Brox sollicite systématiquement les membres de leur famille.

Pour sa part, Ron Harvey a publicisé ses services dans son réseau de partenaires d’affaires. «Ces personnes contacts pourraient ne jamais être vos clients. En revanche, ils peuvent vous référer des personnes qui, elles, le deviendront.»

Développer une clientèle à partir de rien, ou presque, exige qu’on se construise une carapace. «Si vous prenez un refus comme un échec personnel, vous allez échouer», note Bob Thomson, directeur régional à la maison Edward Jones. Jeune conseiller, Bob Thomson assistait un vétéran qui lui disait: «Si tu rencontres 2000 prospects en personne au cours des 12 prochains mois, tu n’échoueras pas.» Bob Thomson l’a pris au mot et a effectué ces 2000 contacts en six mois. Et il est en affaires depuis.

  • Trouvez un mentor et écoutez ses conseils

«Les dix premières années dans ce métier sont une période d’apprentissage. Si vous le pouvez, trouvez un mentor qui peut vous apprendre tous les tenants et aboutissants de la profession», suggère Jeannette Brox. Elle souligne que c’est justement un mentor qui l’a dirigée dans le domaine de la planification financière. Au départ, elle était comptable, mais elle ne se sentait pas heureuse. Son mentor lui a fait remarquer qu’elle avait des aptitudes pour la vente. Elle est alors devenue représentante pour un distributeur de téléphones mobiles, où elle a assez rapidement gravi les échelons. Finalement, en raison de son passé de comptable, elle s’est trouvée à régler les questions fiscales de ses collègues !

Son mentor lui a indiqué qu’elle devrait peut-être songer à la planification financière, domaine qui combine souvent vente et conseil. Jeannette Brox l’a écouté. Au bout de quelques mois, elle a constaté que c’était ce qui la passionnait réellement.

Mark Halpern, lui, a toujours su qu’il travaillerait dans le secteur des services financiers. Il cherchait un mentor qui le guiderait dans l’établissement de son commerce. On lui avait recommandé le nom d’une personne reconnue pour son intégrité et son professionnalisme. Le premier contact fut difficile, le mentor lui signifiant plutôt rudement qu’il n’avait pas de temps à lui consacrer.

Mark Halpern a persisté et lui a expliqué le but de sa démarche. Finalement, l’autre a accepté de le rencontrer… un dimanche matin sur une piste de jogging. Mark Halpern a enfilé ses chaussures de course, et au bout de vingt kilomètres, il avait convaincu son mentor de le prendre sous son aile. Grâce à ses conseils, Mark Halpern a pu prendre de bonnes décisions concernant le développement de son entreprise, entre autres celle de cibler le créneau des polices d’assurance contre les maladies graves.

«La première recommandation que je peux formuler à ceux qui débutent dans ce métier est de faire comme moi: trouvez un véritable mentor», dit-il. Il ajoute que, contrairement à l’expérience qu’il a vécue, ce peut être assez facile de découvrir la perle rare. «Les gens qui réussissent dans cette industrie aiment partager les recettes de leur succès.» Il faut commencer par fréquenter les événements, assister à des conférences et devenir membres d’associations professionnelles.

  • Profitez des récessions pour partir en affaires

C’est en 1992, au lendemain de la terrible récession de 1990-1991, que Ron Harvey a entamé sa carrière de planificateur financier. Non seulement l’économie se remettait-elle sur pied de peine et de misère, mais les épargnants avaient encore le douloureux souvenir du krach boursier de 1987. Puis le vent a tourné. Les marchés ont connu de bonnes années en 1993 et en 1994. Les investisseurs ont recommencé à se procurer des produits financiers, au grand plaisir de Ron Harvey.

«Dans ce domaine, la période la plus difficile pour partir en affaires, c’est lorsque les marchés ont connu trois ou quatre bonnes années consécutives. Ceux qui ont commencé en 2006 auront eu plus de fil à retordre que ceux qui se sont lancés en 2009», explique-t-il.

Cynthia Kett a elle aussi établi sa pratique en 1992. Même si elle profitait de six années d’expérience en comptabilité et deux en planification financière au sein d’une institution financière, elle a commencé avec pratiquement aucun client. «C’était au pire moment. Je me demandais comment j’allais gagner ma vie», raconte la cofondatrice du cabinet Stewart & Kett Financial Advisors. À ceux qui désirent partir en affaires, elle leur conseille d’avoir assez d’argent de côté pour affronter deux ou trois années de vaches maigres. Pour réduire ses dépenses, elle partageait son bureau avec des professionnels actifs dans d’autres secteurs. «En plus, ça m’empêchait d’être isolée.À l’époque, ça m’a fait grand bien», dit Cynthia Kett.

  • Développez un créneau

Les conseillers qui s’éparpillent réussissent difficilement à se distinguer de la concurrence. Ils finissent par hériter d’une clientèle bigarrée difficile à servir.

Dès le début, il faut avoir une vision claire des objectifs que l’on veut atteindre et de prendre les moyens d’y arriver. Cynthia Kett a immédiatement ciblé les entrepreneurs fortunés. Mark Halpern a concentré ses efforts sur la distribution de polices d’assurance contre les maladies graves. Dans son cas, le mot «concentration» n’est pas trop fort: il fait connaître ses produits et services par le truchement du marketing direct, du télémarketing, de la publicité radio et d’activités de relations publiques.

Mais, avant d’en arriver là (et de rencontrer son mentor), il acceptait tous les clients qui se présentaient à lui. «J’ai vendu des REER à 25$ par mois, de l’assurance vie temporaire, de l’assurance invalidité et de l’assurance collective. J’étais partout à la fois. Ce n’est que lorsque j’ai focalisé sur mon créneau que mes affaires ont commencé à bien rouler», constate Mark Halpern.

Ron Harvey ajoute qu’il est important de faire le point après six mois, un an, cinq ans et dix ans. L’entreprise est-elle rendue là où l’on croyait qu’elle irait? Quels ont été les succès et les échecs? Y a-t-il lieu de revoir le plan d’affaires? Si oui, pourquoi? Et comment?

Tous les professionnels consultés par Advisor.ca insistent pour dire que les conseillers indépendants doivent s’adjoindre les services d’un adjoint dès qu’ils en ont les moyens. Généralement, cela survient après six ou sept ans de pratique. Un adjoint pourra prendre en charge les tâches administratives qui risquent de noyer les conseillers – et les empêcher de faire leur véritable travail.

  • Soyez patient!

Le succès n’attend pas le nombre des années, dit-on. Il en va de même pour la profession de conseiller indépendant. En effet, rien n’est garanti, ni au départ, ni en milieu de parcours. Ron Harvey a dû patienter cinq ans avant d’avoir l’assurance que sa firme aurait du succès. «Vous ne deviendrez pas riche du jour au lendemain. Vous devez envisager la construction de votre entreprise sur de nombreuses années. Ça prend de la patience et de la ténacité», note-t-il. Mark Halpern est d’accord avec son collègue. Il conclut: «Si vous répondez d’abord aux besoins de vos clients, vous n’aurez jamais faim dans cette industrie. Vous connaîtrez toujours le succès.»