L’art de communiquer avec ses clients au 21e siècle

3 mars 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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De nombreux investisseurs ont remis en question le travail de leur conseiller à la suite de l’effondrement des marchés de 2008. Mais la plupart d’entre eux ont choisi de demeurer en relation d’affaires avec eux. Cependant, ils souhaitent revoir la façon de travailler ensemble, constate Dan Richards, président de la firme de communication financière Strategic Imperatives.

Dans ce contexte, les conseillers doivent repenser le contenu des informations qu’ils doivent livrer à leurs clients et les moyens avec lesquels ils les leur transmettent.

Pour ce qui est du contenu, Dan Richards fait remarquer que les investisseurs sont nettement plus curieux et critiques que par le passé. Certes, la crise de 2008 les a rendus sceptiques à l’égard de l’industrie des services financiers, mais la tendance lourde était déjà en mouvement depuis l’arrivée d’Internet. Les documents qu’il fallait aller chercher chez son courtier hier sont maintenant accessibles instantanément sur le Web, et ce, sans frais.

Comme de nombreux investisseurs sont des baby-boomers habitués à s’opposer à l’autorité, le fait qu’ils soient mieux informés de la chose financière les rend encore plus rebelles. Ils posent davantage de questions, n’hésitent pas à demander une deuxième opinion et veulent être de plus en plus impliqués dans la prise de décision. Ils s’insurgent contre le jargon de la finance et exigent que l’industrie fasse preuve de transparence pour ce qui est frais. Les conseillers doivent donc être en mesure de justifier chacune des recommandations qu’ils formulent.

«Au bout du compte, on arrive au même résultat qu’avant, mais le processus est plus long», dit Dan Richards.

Cette longueur du processus, les investisseurs veulent la contrebalancer lorsqu’ils reçoivent l’information. On est en présence d’un drôle de paradoxe. D’un côté, les clients demandent plus d’informations que jamais, mais, de l’autre, ils disent ne pas avoir le temps de lire le matériel qu’on leur envoie.

Pour confronter ce problème, un conseiller astucieux a tenté l’expérience suivante. À ses clients qui souhaitaient en apprendre davantage sur Warren Buffet, il leur a envoyé une série d’articles de journaux sur le légendaire investisseur américain. Ses clients se sont dits satisfaits des renseignements qu’ils ont reçus. Ensuite, il leur a fait parvenir par courriel la vidéo d’une entrevue que Warren Buffet a accordée à la chaîne américaine CNBC. Ses clients ont adoré et en ont redemandé!

«La puissance de la vidéo réside dans le fait qu’elle combine deux éléments, l’image et le son. Le spectateur ressent un double impact», explique Dan Richards. Évidemment, il n’y a rien de neuf là-dedans. Depuis des lustres, les spécialistes des communications étudient l’attrait qu’exercent le cinéma et la télévision sur les personnes. Après tout, le septième art est apparu au début du 20e siècle, la télévision plusieurs années plus tard. «Mais songez que la presse écrite est née dans les années 1700», fait remarquer Dan Richards. On a donc affaire à un moyen de communication plus que mature !

À sa clientèle composée de professionnels des services financiers, Dan Richards propose 250 vidéos d’entrevues avec des gestionnaires vedettes et des experts de la finance. L’une d’elle consiste en une entrevue avec David Foot, cet économiste de l’Université de Toronto qui a coécrit le best-seller Entre le boom et l’écho. David Foot y bat en brèche la thèse de l’auteur américain Harry Dent selon laquelle la démographie aux États-Unis entraînerait à terme un krach boursier.

L’automne dernier, un conseiller a raconté à Dan Richards comment cette vidéo avait réussi à infléchir la décision injustifiée d’un de ses gros clients. Ce dernier avait lu justement le livre alarmiste de Harry Dent. Pris de panique, il a demandé à ce conseiller de liquider tous ses investissements et de placer tout son capital dans des liquidités.

Convaincu que son client faisait fausse route, il a tenté de lui faire changer d’idée. Il l’a supplié de visionner la vidéo de David Foot. À contrecœur, le client a fini par acquiescer. En écoutant David Foot, il s’est rendu compte que sa première décision était erronée et que son conseiller avait raison: la liquidation de son portefeuille était une bêtise.

Si cet investisseur a changé d’idée, c’est qu’il a vu et entendu les arguments de David Foot. «Si je lui avais envoyé un article écrit par David Foot, je suis certain que l’impact aurait été très différent», explique ce conseiller.

Dan Richards dit qu’il existe encore des milliers d’investisseurs qui assimilent l’information financière par le truchement de la lecture. Mais leur nombre diminue inexorablement. Les conseillers doivent donc en tenir compte et adapter leurs moyens de communication en conséquence. Ils profiteront ainsi de la vague qu’apportent les nouvelles technologies au lieu de ramer à contre-courant dans un combat perdu d’avance.