On ne peut plus investir comme avant…

20 novembre 2009 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le chroniqueur financier américain Jeffrey Kosnett affirme que la crise financière de l’an dernier a changé à tout jamais la manière avec laquelle on doit concevoir l’investissement. En sept points, il explique pourquoi.

1. Les actions ne sont plus un actif incontournable L’effondrement boursier de 2008 avait été précédé d’une poussée des cours sans précédent, rappelle Jeffrey Kosnett. Il était donc logique que la correction qui a suivi soit également d’une ampleur inégalée. Maintenant qu’un calme bien relatif semble être installé, que peut-on conclure ? Que n’est plus valable la doctrine voulant que le risque inhérent aux actions soit, un jour, récompensé par un rendement supérieur à ce que rapportent les autres produits financiers.

Pour Jeffrey Kosnett, les investisseurs d’aujourd’hui ne sont plus loyaux à l’égard des entreprises. Une mauvaise nouvelle provoquera une descente aux enfers des cours, même si cette nouvelle négative est somme toute anodine. De plus, la facilité avec laquelle nous pouvons acheter et vendre des actions favorise une exubérance du nombre de transactions. Une rumeur répandue sur Internet incitera les investisseurs à se débarrasser des actions d’une entreprise sans égard à son chiffre d’affaires et à sa rentabilité. On liquide d’abord, on analyse après. Cette mentalité se traduit par une sainte horreur de perdre de l’argent, au lieu d’éprouver de la joie à en gagner. Résultat : on juge avec sévérité les actions qui produisent des revenus prévisibles, et on passe à côté de véritables occasions de placement.

2. La diversification n’est plus ce qu’elle était Lors de l’éclatement de la bulle des technos en 2000, les investisseurs désemparés ont pu se tourner vers les fiducies de placements immobiliers, les actions internationales et les titres générateurs de dividendes. La crise de 2008 a changé cette donne, car tous les secteurs, sauf les bons du Trésor américains, ont reculé en même temps. Des observateurs ont même proclamé la mort de la diversification. Jeffrey Kosnett ne partage pas cet avis, mais il note qu’il faut diversifier différemment maintenant. Des instruments novateurs sont accessibles aux investisseurs : obligations mondiales, fonds de produits de base, fonds de denrées alimentaires, fonds immobiliers mondiaux, etc. Il ne faut pas hésiter à les utiliser.

3. Respectez les liquidités Jeffrey Kosnett dit qu’il est faux de prétendre que les liquidités ne rapportent rien. Non seulement une réserve de comptant permet-elle de mettre la main sur les belles occasions de placement que les marchés irrationnels ont l’habitude de créer, mais elle permet aussi d’éliminer les dettes qui portent un taux d’intérêt élevé. Certes, les produits d’épargne à capital garanti ne paient pas beaucoup ces temps-ci, mais n’oublions pas que la seule direction que peuvent emprunter les taux d’intérêt, c’est vers le haut.

4. La réglementation, un miroir aux alouettes ? Les scandales financiers des dernières années ont plongé les autorités réglementaires dans l’embarras. Afin de se refaire une image auprès du public, elles ont décidé de resserrer les lois et les règlements. L’avalanche de mesures contribuera peut-être à rassurer le public et à éviter des fraudes à la Madoff ou à la Norbourg, mais elle n’empêchera pas les marchés de s’écrouler.

Toutes les chutes boursières ont la même origine : une réaction démesurée des investisseurs incapables de gérer leurs émotions. Aucune réglementation au monde ne peut endiguer ce phénomène universel condamné à se répéter. Et puis, même si le Canada et les États-Unis mettaient sur pied des organismes de réglementation terriblement efficaces, que pourraient–ils faire si les fraudeurs décidaient d’opérer à partir de la Russie ou de la Chine ?, demande Jeffrey Kosnett.

5. Pas avant 100 ans… Des observateurs ont comparé la crise de 2008 à une inondation d’une puissance qu’on n’a jamais vue de mémoire d’homme. Ils ont laissé entendre que rien de tel ne se reproduira avant 100 ans. Vraiment ? Jeffrey Kosnett n’en est pas si sûr et met en garde les investisseurs contre une nouvelle crise financière de grande ampleur.

« Le ratio de la dette mondiale par rapport au produit intérieur brut de la planète est à un sommet presque historique. Or, ce sont souvent les problèmes d’insolvabilité qui causent l’effondrement des marchés », note le chroniqueur. Rien de nouveau sous le soleil, donc. Toutefois, à la différence d’hier, les outils technologiques d’aujourd’hui font circuler l’information à la vitesse de l’éclair. Ce mélange d’ingrédients a le potentiel de transformer une crise financière en une panique planétaire, dit Jeffrey Kosnett.

6. Les investisseurs doivent penser aux produits de base L’année 2009 aura été celle du prix de l’or, qui franchit record après record. Mais c’est aussi le cas du cacao, du café, du cuivre et même des flancs de porc (pork bellies). Les investisseurs avisés auront donc intérêt à compléter leurs portefeuilles d’actions et d’obligations à l’aide de marchandises réelles. On trouve déjà quelques produits financiers axés sur les denrées alimentaires. Au Canada, la firme Horizons BetaPro offre le FNB BetaPro S&P Agribusiness North America. Ce n’est qu’une question de temps avant que ces produits soient commercialisés à grande échelle.

7. Les obligations auront la cote Jeffrey Kosnett constate que les investisseurs se procurent de plus en plus d’obligations. Non seulement sont-elles moins volatiles que les actions, ce qui plaît aux épargnants échaudés par la Bourse, mais aussi parce que les courtiers ont amélioré leur offre de produits. Aux titres traditionnels émis par les gouvernements s’ajoutent maintenant les obligations émises par les entreprises, les institutions et les municipalités.

Avant, seuls les professionnels du placement savaient où les trouver. Aujourd’hui, elles sont accessibles chez tous les courtiers en ligne. Un nombre croissant d’investisseurs apprécient les obligations. En effet, il est possible de les négocier à profit. Mais quand les conditions sont désavantageuses, il suffit de les conserver jusqu’à leur échéance sans subir de perte. Voilà qui fait réfléchir les épargnants pour qui la sécurité du capital est un aspect primordial de leur stratégie de placement.