Aidez vos clients à préparer leurs finances avant de quitter un emploi

Par Carole Le Hirez | 17 Décembre 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Après deux ans de télétravail, certains employés n’ont pas envie de retrouver le rythme « métro-boulot-dodo ». Ils décident de démissionner pour trouver un meilleur équilibre entre vie professionnelle et privée. Comment les aider à réaliser leur projet sans mettre en péril leur avenir financier ?

Le nombre de démissions a augmenté de 20% au Canada en 2020-2021 par rapport à 2019, selon le Guide salarial 2022 de Robert Half. Et plusieurs observateurs prédisent que la perspective du retour au bureau en présentiel pourrait accentuer ce phénomène.

Les raisons qui motivent ces démissions varient. La conciliation travail-famille, le manque de support de l’employeur, le nombre d’emplois disponibles, la volonté de s’épanouir au travail sont autant d’éléments déclencheurs, selon l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA).

« Il y a des cessations volontaires, concertées ou forcées. La préparation financière peut varier selon le portrait socio-économique du travailleur ainsi que les opportunités ou contraintes chez son employeur », indique Gaétan Veillette, planificateur financier chez IG Gestion de patrimoine.

RÉVISER L’ÉQUILIBRE BUDGÉTAIRE

« Il faut mettre en place une stratégie qui limitera les impacts à court et à long terme », affirme André Lacasse. Le plan de match consiste à revoir plusieurs aspects essentiels du plan financier, en commençant par établir les sources de dépenses et de revenus à la lumière de la nouvelle situation. Il conseille de réduire au besoin certaines dépenses non essentielles qui n’affectent pas le quotidien et de passer en revue les sources de revenus.

« Le client possède-t-il un coussin pour soutenir ses besoins pendant au moins quatre mois si cela ne fonctionne pas chez le nouvel employeur ? », illustre André Buteau, planificateur financier chez Financière Liberté 55. Dans le cas contraire, le CELI peut-être un bon outil pour bâtir un fonds d’urgence.

ANALYSER LES BESOINS EN ASSURANCE COLLECTIVE

L’invalidité et les maladies graves sont les deux risques les plus élevés avant 60 ans, rappelle le planificateur. Le fait de bénéficier ou pas de protections d’assurance qui couvrent ces deux dangers chez le nouvel employeur peut changer la donne. En cas d’absence de ces couvertures, vos clients pourraient avoir avantage à se procurer des assurances supplémentaires.

Gaetan Veillette conseille pour sa part aux clients de réclamer les médicaments et les soins requis, et couverts par le programme d’assurance collective, par exemplaire des soins dentaires ou de nouvelles lunettes, avant la cessation d’emploi.

« On pourrait également évaluer l’opportunité de convertir la protection de l’assurance collective en police d’assurance personnelle dans les 30 jours après la cessation d’emploi. Néanmoins, la prime d’assurance découlant d’une telle conversion pourrait s’avérer plus élevée que de demander une nouvelle police d’assurance vie, surtout si le travailleur se perçoit comme ayant une santé normale », indique Gaétan Veillette.

REVOIR LE PLAN DE RETRAITE 

L’ancien employeur offrait-il un régime de retraite ou cotisait-il dans un REER collectif ? C’est un élément à considérer dans le plan de retraite si le nouvel employeur n’est pas aussi généreux, souligne André Lacasse. Même chose si le client passe d’un régime à prestations déterminées à un régime à cotisation déterminée. Il devra remplacer ces régimes par son propre plan d’épargne, par exemple en effectuant des versements réguliers dans un REER ou un CELI.

Si les clients peuvent anticiper leur décision de démissionner, ils auront le temps de mieux se préparer financièrement, souligne André Buteau. Il leur déconseille donc de sauter dans le vide sans avoir de nouvel emploi. « Ils ne devraient pas avoir à toucher à leurs REER ou à leurs autres fonds », ajoute-t-il. Il suggère plutôt de prioriser les retraits dans le CELI pour le décaissement, car ils ne sont pas imposés.

Dans tous les cas, l’expert recommande éviter de puiser dans le bas de laine des clients afin de ne pas compromettre l’effet des intérêts composés. « Cela vient affecter la retraite à court et à long terme. Plus on est éloigné de l’âge de la retraite au moment des retraits, plus on risque de creuser un trou important qu’il sera difficile de combler par la suite », précise André Buteau.

FINANCER UNE PAUSE PROFESSIONNELLE

Si un client n’a pas un autre emploi en vue, il pourrait profiter du régime d’encouragement à l’éducation permanente (REEP) pour retourner aux études. Ce régime fonctionne sur le même principe que le régime d’accession à la propriété (RAP) avec une limite de 10 000 $ pour retirer des fonds du REER sans payer d’impôt.

« Dans le cas où un client souhaiterait faire une pause professionnelle de quelques mois, la priorité sera de s’assurer qu’il disposera des liquidités suffisantes durant cette période afin de ne pas s’enliser dans les dettes. Le conseiller pourrait également revoir la stratégie de placements pour dégager plus de liquidités », suggère André Lacasse.

Pour jouer un rôle proactif, les conseillers devraient recommander à leurs clients d’épargner en vue d’une cessation d’emploi, ainsi que d’établir une marge de crédit bancaire ou marge de crédit hypothécaire, estime Gaétan Veillette.

Dans tous les cas, le rôle du conseiller consiste à ne pas porter de jugement sur les décisions du client, mais plutôt à l’aiguiller vers les solutions appropriées pour l’aider à assurer sa sécurité financière.

Carole LeHirez

Carole Le Hirez

Carole Le Hirez est journaliste pour Finance et Investissement et Conseiller.ca. Auparavant, elle a notamment écrit pour Les Affaires.