Valeurs mobilières : ouverture du fédéral?

Par La Presse Canadienne | 21 mai 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Carlos Leitao, ministre des Finances du Québec

Québec discerne une « ouverture » du fédéral dans le long contentieux qui les oppose au sujet du projet de commission pancanadienne des valeurs mobilières.

Le ministre des Finances du Québec, Carlos Leitao, a dit sentir qu’il pouvait dialoguer avec son homologue fédéral, Joe Oliver, au sortir de leur premier entretien ensemble, mardi matin, à Québec. En outre, M. Leitao ne s’est pas montré tout à fait insensible à ses arguments non plus.

Le projet du gouvernement Harper est une véritable pomme de discorde entre Ottawa et Québec. Le fédéral tient avec acharnement à mettre sur pied une commission pancanadienne des valeurs mobilières, même si la Cour suprême l’a débouté en 2011 dans son intention unilatérale, en rappelant que la réglementation des valeurs mobilières est une compétence des provinces. Pour sa part, le Québec a toujours défendu son droit le plus strict de réglementer seul le champ des valeurs mobilières, avec l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Ottawa a néanmoins présenté un nouveau projet en 2013, avec l’appui de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, un projet qui serait plus coopératif avec les provinces, selon le fédéral. Toutefois, le Québec a de nouveau signifié son opposition et le précédent gouvernement Marois était même prêt à exercer des recours judiciaires.

Ouverture et souplesse?

Mardi matin, Joe Oliver a tenté de démontrer le bien-fondé du projet fédéral à M. Leitao, qui a rappelé la position du Québec. C’est le compte-rendu qu’il en a fait dans un point de presse mardi après-midi.

« Il a réitéré l’intention du gouvernement fédéral et moi, j’ai répété la position du Québec », a dit M. Leitao dans les corridors du parlement. Mais au-delà, le ministre québécois a détecté chez son homologue de l’ouverture et de la souplesse sur cet enjeu délicat.

« J’ai senti un peu… un sens qu’on peut se parler, a-t-il ajouté, avec prudence. Il n’y a pas de fermeture d’esprit, pas de “take it or leave it” (à prendre ou à laisser). »

M. Leitao est même allé un peu plus loin en parlant de « solution » et ne s’est pas montré tout à fait insensible aux arguments de M. Oliver, puisqu’il a en quelque sorte évoqué un des motifs invoqués par le fédéral pour intervenir dans le domaine des valeurs mobilières: le gouvernement Harper plaide en effet qu’en raison de la mondialisation des échanges, le Canada doit disposer d’un seul régime réglementaire pour favoriser les investissements, et non de 13 systèmes séparés, un pour chaque province et territoire.

« Dans un cadre d’ouverture, essayer de trouver une solution qui permettrait au Canada de respecter ses engagements internationaux », a-t-il poursuivi. Joe Oliver avait pour sa part confié au Globe and Mail qu’il voyait une « occasion historique » avec le Québec de développer des politiques économiques à la grandeur du pays, à la suite de l’élection du nouveau gouvernement libéral de Philippe Couillard.

Le fédéral a indiqué que sa nouvelle commission gérera une seule liste de règlements et sera dirigée par un conseil d’administration indépendant. Ottawa a déjà précisé que le siège social serait à Toronto, mais fait valoir que ses dirigeants proviendront de partout au pays.

Au Québec, non seulement le gouvernement, mais aussi le milieu des affaires, souhaitent garder l’expertise exclusive des valeurs mobilières ici, parce que le secteur financier représente 160 000 emplois et 6,2% du PIB québécois, selon les données évoquées par un regroupement d’acteurs économiques de la région de Montréal.

De même, ce regroupement formé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, la grappe Finance Montréal et le Centre financier international Montréal fait valoir que le système de régulation des valeurs mobilières fonctionne déjà bien au Canada: en 2006, l’OCDE a classé le Canada au deuxième rang mondial pour la qualité de sa réglementation des valeurs mobilières, tandis qu’en 2008, la Banque mondiale a classé le Canada au cinquième rang mondial pour ce qui est de la protection des investisseurs, rappelle-t-il.

La Presse Canadienne