À qui appartiennent vos commissions et vos clients ?

11 juin 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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La Cour supérieure du Québec a rejeté en novembre 2013 la requête des courtiers immobiliers qui réclamaient que les commissions auxquelles ils ont droit soient exclues de la faillite de l’agence Sutton-Royal inc.

« Les requérants cherchent à se faire déclarer seuls et uniques propriétaires des commissions versées par des acheteurs directement à l’agence Groupe Sutton-Royal inc. débitrice-faillie en l’instance », peut-on lire dans le jugement.

Ce dernier fait la distinction entre un employé subordonné à son employeur et un travailleur autonome. Parallèlement, il fait la différence entre un contrat d’agence immobilière commun à tous les courtiers, et celui d’un travailleur autonome, qui s’apparente à un contrat d’entreprise.

Le courtier (travailleur autonome) bénéficie ainsi d’une indépendance quasi absolue; il n’existe entre l’agence et lui aucun lien de subordination. La Cour Supérieure du Québec explique : « il en découle que les rétributions qui sont le produit de la prestation de services des courtiers (travailleurs autonomes) ne doivent pas être considérées comme un salaire, mais plutôt comme le prix convenu (généralement un % d’un prix de vente) pour réaliser un contrat ».

Les courtiers ne possèdent donc aucun contrôle ni droit sur les commissions déposées au compte bancaire de l’agence. De plus, le processus de traçabilité que les requérants cherchent à prouver est inapplicable selon la Cour supérieure, puisque lesdites commissions ne sont redevables qu’à l’agence.

Selon la Cour, les sommes déposées au compte bancaire de la Sutton-Royal inc. à la banque BMO sont des biens de créance du failli et font partie de son patrimoine, lequel constitue le gage commun des créanciers. Les courtiers sont, in fine, considérés comme des créanciers ordinaires de la Sutton-Royal inc.

Devons-nous nous inquiéter?

Pourquoi devons-nous nous inquiéter, nous, les travailleurs autonomes? Parce que ce genre de situation constitue une menace qui met en danger notre survie financière, notre famille et notre retraite.

La faillite d’un agent général ou d’un cabinet de valeurs mobilières peut survenir à l’improviste, sans intervention ni participation de votre part, hors de votre cercle d’affaires et hors de votre contrôle.

Aujourd’hui, ce jugement met en relief nos grandes faiblesses. Tous les cabinets de valeurs mobilières et les agents généraux qui négocient des fonds communs, des valeurs mobilières, des contrats de plans et de Bourses, des fonds distincts, etc., ne peuvent vous garantir que vous serez payé et que vous maintiendrez et conserverez votre achalandage d’affaires (vos clients) en cas de faillite. Cette décision de la Cour supérieure du Québec, transposable à notre domaine, vous enseigne que vos clients et vos commissions appartiennent au cabinet. Vous êtes considéré comme un créancier ordinaire et risquez donc d’être dépossédé des deux.

Voilà pourquoi il y a un besoin urgent d’établir un contrat de gré à gré collectif qui vous garantira la propriété de vos clients et vous offrira la possibilité de faire déposer vos commissions dans un compte distinct en fiducie.

Nous pouvons y arriver ensemble avec notre association professionnelle, le RICIFQ.

Flavio Vani est conseiller en assurance, en rentes collectives et en sécurité financière, Assurance et produits financiers Vani. Il est aussi président du RICIFQ. On peut le suivre sur Twitter à @flaviusvani.