Affaire Amaya : il s’agirait d’un délit d’initiés

Par La rédaction | 16 Décembre 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Une ou des personnes ayant participé aux négociations menant à l’émission du nouveau titre d’Amaya auraient profité d’informations privilégiées.

Les firmes qui composaient le syndicat d’émetteurs pour les titres boursiers et obligataires (Canaccord, Cormark, Desjardins Marché des capitaux, Deutsche Bank et Manuvie) devaient maintenir la pleine confidentialité avant l’appel public à l’épargne. Or, cette confidentialité aurait été brisée.

« Cette histoire en est une de délit d’initiés », estime une source très au courant du dossier qui désire conserver l’anonymat.

Manuvie est donc sous enquête des autorités réglementaires parce qu’elle fait partie du syndicat d’émetteurs responsables de l’émission des obligations d’Amaya. Comme toutes les firmes parties prenantes, Manuvie figure parmi les initiés soumis aux règles de confidentialité. Il s’agit d’une procédure normale.

Information coulée et dénonciation

Selon notre source, il y a de fortes probabilités qu’un de ces émetteurs ait coulé de l’information sur la transaction puisque l’émission des titres d’Amaya était très discutée parmi les courtiers du milieu, avant même que les titres ne soient mis en marché.

« Un des preneurs fermes, furieux de constater l’ampleur des spéculations sur Amaya chez les concurrents, se serait plaint que l’entente de confidentialité ait été transgressée », dit notre source. Puisque les courtiers qui ont participé aux négociations sont interdits de transactions sur les titres en question, on comprend qu’une des firmes ait décidé de dénoncer le présumé bris de confidentialité, déclenchant immédiatement les enquêtes conjointes de l’AMF et de la GRC.

310 options put dès le jeudi soir

Qui plus est, jeudi soir dernier, l’équipe de Conseiller a consulté un terminal de Bloomberg pour constater que 310 options put ont été prises sur Amaya le jeudi 11 décembre. Par comparaison, cinq contrats d’options seulement ont été enregistrés sur la période de huit jours précédant la nouvelle de l’enquête. Ce fort volume d’options put sur le titre d’Amaya semble indiquer que certains courtiers détenaient encore une fois des informations privilégiées puisque la descente de l’AMF a eu lieu le mercredi 10 décembre, mais n’a été rendue publique que jeudi en soirée.

Une prime surdimensionnée

Rappelons que, le 12 juin dernier, Amaya annonçait qu’elle se portait acquéreur d’Oldford Group Limited, la société détenant les marques PokerStars et Full Tilt Poker.

La coût de la transaction s’est monté à 4,9 G $US. Canaccord Genuity a été le preneur ferme qui a fourni le financement nécessaire à Amaya pour compléter l’acquisition conjointement avec Cormark Securities et Desjardins Marché des capitaux. Canaccord et Deutsche Bank étaient les principaux conseillers.

Il s’agit de la seconde plus importante transaction de l’histoire de Canaccord selon les documents déposés au régulateur.

Canaccord et les autres émetteurs se sont entendus pour acheter les titres d’Amaya au sein d’un investissement privé pour ensuite les écouler sur le marché.

Le cours des actions ordinaires d’Amaya a été établi à 20 dollars, alors que celui des actions privilégiées l’a été à 24 dollars. Sur les 30 jours précédant l’acquisition, le cours moyen de Amaya affichait 9,59 $. Dans son message aux actionnaires, la compagnie a souligné avoir convenu de hausser le coût d’achat initial de l’action ordinaire d’une prime de 108,5 % par rapport au cours moyen. Il s’agissait également d’une prime de 66,4 % par rapport au cours du titre d’Amaya, qui était de 12,02 $ à la fermeture le 11 juin dernier, soit une journée avant l’annonce de la mégatransaction.

« La prime sur Amaya est énorme, et cela est plutôt rare », indique un avocat en valeurs mobilières qui a parlé à nos collègues d’Advisor.ca sous le couvert de l’anonymat.

« Il est plus courant dans ce genre de transaction d’achat de constater un escompte de la valeur au marché du titre, pas une prime de cette ampleur! », ajoute l’avocat consulté.

Habituellement, les émetteurs escomptent entre 2 % et 10 % par rapport au cours moyen du titre lorsqu’ils établissent un cours de lancement pour une transaction de ce genre. L’escompte reflète alors le fait que l’émetteur revendra les titres au marché avec une prime.

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