Budget Leitao : régime minceur pour le Québec

Par La Presse Canadienne | 4 juin 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le Québec vit au-dessus de ses moyens et le moment est venu de reprendre le contrôle des finances publiques, soutient le gouvernement Couillard dans son premier budget déposé mercredi par le ministre des Finances, Carlos Leitao.

Québec souhaite y arriver en appliquant les freins à la croissance de ses dépenses, notamment en imposant un régime minceur à l’appareil de l’État et par un gel complet de l’embauche au cours des deux prochaines années.

Mais les contribuables ne seront pas épargnés pour autant. Malgré les promesses électorales libérales de renoncer à toute hausse de taxes et d’impôts, donc du fardeau fiscal, le gouvernement choisit de demander aux Québécois de débourser davantage au moment d’acheter de l’alcool ou des cigarettes. La taxe sur le tabac augmente de 4 $ par cartouche de 200 cigarettes. Les taxes sur l’alcool sont revues à la hausse : 0,05 $ de plus par bouteille de bière et 0,24 $ par bouteille de vin. Par contre, au restaurant et dans les bars, la taxe sera revue à la baisse : 0,07 $ de moins la bouteille de bière et 0,92 $ la bouteille de vin.

Pour tout savoir sur les mesures fiscales

  • Comme à chaque présentation de budget provincial et fédéral, l’équipe du Centre québécois de formation en fiscalité (CQFF) a colligé l’essentiel de l’information technique concernant le budget provincial du 4 juin 2014, telle que mise en forme par les diverses sources œuvrant dans le secteur de la fiscalité, par exemple l’APFF et certains cabinets professionnels. Vous trouverez toute cette information en cliquant ici.
  • Le CQFF propose également aux internautes intéressés le lien vers le document technique sur les mesures fiscales publié par le gouvernement du Québec en marge du budget
  • De son côté, la firme Raymond Chabot Grant Thornton met à la disposition des particuliers et propriétaires d’entreprise son résumé fiscal.

Une situation sérieuse

Aux prises avec un contexte budgétaire difficile et une baisse de revenus dans les coffres de l’État, le gouvernement Couillard maintient quand même son engagement à mettre un terme à la spirale des déficits en 2015-2016. Mais d’ici là, pour l’année en cours, le déficit dépassera de 600 millions de dollars la cible fixée par le gouvernement précédent (1,75 milliard de dollars) pour atteindre finalement 2,35 milliards de dollars. « La situation est sérieuse », a reconnu d’emblée le ministre des Finances, en conférence de presse.

Québec mise sur un contrôle serré des dépenses gouvernementales, le gel de l’embauche et les retraites à venir dans la fonction publique pour retrouver une certaine marge de manœuvre budgétaire à plus ou moins court terme.

La croissance des dépenses est plafonnée à 1,8 % en 2014-2015 et à une moyenne de 2,1 % de 2015 à 2019, soit largement inférieure à la moyenne des années passées et des prévisions jugées « prudentes et conservatrices », selon le ministre Leitao.

Celle des salaires des fonctionnaires devra être à l’avenant. Québec prévient d’avance les syndicats du secteur public que les prochaines négociations salariales, qui s’annoncent houleuses, devront tenir compte de ces paramètres. Les conventions collectives viennent à échéance en 2015. Québec tient aussi pour acquis dans son budget que les médecins vont accepter d’étaler leurs hausses de rémunération à venir sur un grand nombre d’années, contrairement à ce qui avait été convenu au moment de la signature de la convention. Mais les négociations avec eux ne sont toujours pas conclues.

L’appareil d’État touché de plein fouet

Pendant ce temps, Québec impose un régime minceur à l’appareil de l’État : divers engagements pris par le gouvernement précédent seront réévalués, reportés à plus tard, voire reniés, les directions régionales du ministère de l’Éducation seront abolies, le programme de remboursement de la procréation assistée sera réévalué et on promet de rationaliser les budgets des bureaux du Québec à l’étranger.

L’abolition graduelle de la taxe-santé promise par les libéraux ne deviendra réalité qu’en fin de mandat, si des surplus garnissent enfin les coffres de l’État. « On ne peut pas continuer avec des programmes qui sont financés à crédit », tranche le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, qui s’est engagé une fois de plus à remettre en question « ce qui est moins prioritaire » dans l’éventail des services gouvernementaux.

Le gouvernement maintient sa décision d’annuler la hausse de 2 $ par jour des frais de garde à 7 $ décrétée par le gouvernement précédent. Le tarif quotidien sera plutôt indexé à 7,30 $ le 1er octobre. Québec créera aussi un total de 6300 places cette année.

Le développement économique sera stimulé par une série de mesures : relance du Plan Nord et de l’industrie forestière, appui aux PME manufacturières (réduction de 8 à 4 % du taux d’imposition), mise en place de la Stratégie maritime, investissement dans les infrastructures (90,3 milliards d’ici 10 ans, dont 11,5 milliards de dollars cette année). Parallèlement, Québec révise à la baisse plusieurs mesures fiscales, dont la réduction de 20 % des crédits d’impôts, destinées aux entreprises. Le total des dépenses de l’État en 2014-2015 atteindra 74,2 milliards.

Les fonds de travailleurs touchés

Ottawa l’avait fait dans le cadre de son budget 2013. C’est maintenant au tour de Québec d’imposer un plafond aux émissions des fonds de travailleurs (Fonds de solidarité FTQ et Fondaction de la CSN) afin de réduire les coûts des crédits d’impôt accordés aux épargnants québécois, rapporte l’Agence QMI.

Le gouvernement Couillard limite ainsi les parts que pourra émettre le Fonds FTQ à 650 millions de dollars, et celles du Fondaction à 200 millions pour 2014-2015. Le gouvernement prévoie ainsi économiser 18 millions en 2014 et 15 millions l’année prochaine.

« En proposant de plafonner l’émission des actions, le gouvernement réduira la capacité du Fonds de solidarité FTQ d’investir dans les PME. Considérant les objectifs du gouvernement en matière de création d’emplois, de développement économique et de soutien aux PME, cette proposition est surprenante, d’autant plus que les partis représentés à l’Assemblée nationale ont unanimement réaffirmé leur appui aux fonds de travailleurs en mars 2013, et que cette proposition n’a pas été soulevée pendant la récente campagne électorale. D’ailleurs, le gouvernement lui-même reconnaît dans le budget que “les fonds fiscalisés sont des outils essentiels à la chaîne de financement” », réagit Robert Parizeau, président du conseil d’administration du Fonds de solidarité FTQ.

Par ailleurs, le droit accordé à Capital régional et coopératif Desjardins d’émettre pour 150 millions de dollars d’actions est reporté d’un an.

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