CELI : Conseiller.ca répond à vos questions

23 août 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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marigranula / 123RF

Nous avons soumis vos questions à une fiscaliste, une institution bancaire et un conseiller qui suit la question de près. Voici leurs réponses :

1. Le REER est finalement à l’abri des créanciers. Et le CELI ?

Services-conseils spécialisés, Gestion de portefeuille, Banque Nationale Groupe financier (SCS, GP, BNGF) :

Le CELI peut être donné en garantie sans conséquences fiscales ou financières alors que la mise en garantie occasionne l’imposition ou la perte de l’enregistrement du REER. Puisque le CELI peut être donné en garantie, il est donc saisissable.

Depuis 2007 de nouvelles règles ont rendu le REER à l’abri des créanciers en cas de faillite seulement. Le CELI n’a pas été ajouté à ces dispositions.

Fabien Major, MBA, conseiller en sécurité financière et fonds d’investissement, est rédacteur et administrateur du site de référence www.CELI.ca :

Non. Sauf… qu’il serait sage si, vous vous croyez à risque, de choisir des « produits réputés insaisissables ». Contrairement au REER qui est maintenant protégé contre les créanciers, le CELI et l’épargne régulière peuvent très bien se faire saisir. Il y a une exception, si vous optez pour des produits de placements émis par une compagnie d’assurance vie comme une rente, des fonds distincts ou des certificats. Ce n’est pas tout, il faudra que vous nommiez comme bénéficiaire en cas de décès, un proche parent (père, mère, épouse ou enfants). Si votre bénéficiaire n’entre pas dans cette catégorie, il faudra alors ajouter le terme « irrévocable » pour que votre bénéficiaire devienne « privilégié ». Vous aurez ainsi sécurisé votre CELI.

2. Comme les contributions non effectuées au CELI sont cumulatives, est-ce que cette accumulation débute avec la première contribution ou l’est-elle depuis l’implantation du programme en 2009 ?

SCS, GP, BNGF :

Le calcul des contributions s’effectue dès l’implantation du programme en 2009. Ainsi, pour une personne qui n’a jamais cotisé, son droit de contribution en 2010 est de 10 000 $. Évidemment, les droits se créent l’année qu’un résident canadien atteint l’âge de 18 ans.

FM, MGA :

Elle l’est depuis la création du régime. Donc, si vous n’avez jamais cotisé à un CELI, votre droit est maintenant de 10 000$. Pour vous aider à vous y retrouver, votre nouvel avis de cotisation du fédéral vous indiquera au bas (près de la ligne indiquant les cotisations inutilisées du REER) les montants qu’ils vous sont permis de cotiser à votre CELI.

Josée Jeffrey, fiscaliste et planificatrice financière, Focus Retraite & Fiscalité (JJ, FRF) :

Tout le monde est parti sur le même pied d’égalité en 2009 avec un plafond admissible de 5000 $. Même si vous n’avez pas ouvert de CELI en 2009, vos droits acquis lors de l’implantation de la nouvelle mesure sont reportés aux années ultérieures.

Vous devez produire une déclaration de revenus pour recevoir un avis de cotisation. Pour avoir droit au plafond annuel du CELI, vous n’avez pas besoin de gagner un revenu comme c’est le cas pour les REER. Par contre, vous devrez tout de même produire une déclaration de revenus.

3. Merci de nous éclairer sur les dernières modifications apportées au CELI avec la Loi de l’impôt (cotisations excédentaires, etc.)

SCS, GP, BNGF :

Le 16 octobre 2009, le ministère des Finances de Canada a annoncé des modifications techniques afin de contrer l’utilisation du CELI dans le cadre de stratagèmes de planification fiscale.

Les principales modifications sont :

  • Ne plus permettre les opérations de transfert d’actifs entre compte CELI et tout autre type de compte. Ces opérations visent les transferts de bien non monétaires en échange soit d’argent ou d’autres biens. Elles ne visent pas les retraits ou les nouvelles contributions en biens.
  • Imposition d’un taux de 100 % sur les revenus issus de cotisations excédentaires versées de façon délibérée. Cette pénalité s’ajoute à la pénalité mensuelle existante de 1% sur les cotisations excédentaires.
  • Hausse du taux d’imposition des revenus découlant de placements interdits (principalement des actions de sociétés privées) de 43,5 % à 100%.
  • Les revenus « accessoires » découlant des revenus générés par des cotisations volontaires délibérées ou des placements interdits sont imposés à un taux de 100 %.
  • Les retraits qui surviennent suite aux cotisations excédentaires, aux placements interdits ou aux placements non admissibles et tout revenu s’y rapportant ne créent pas de droits supplémentaires.

FM, MGA :

En octobre 2009, le ministre du Revenu national a dû resserrer les critères et règles du CELI. Des spéculateurs avaient réussi assez habilement, à contourner le plafond de 5 000 $ ou encore à faire des transferts maintenant jugés illégaux. Ne vous avisez plus de dépasser la limite de cotisation. En plus des frais de 1 % par mois, tous les gains attribués à ces surplus seront imposés à 100 %, donc il n’y a plus aucun avantage à fracasser volontairement la limite.

Quant aux transferts entre REER et CELI, ce n’est plus possible. De fins renards avaient joué sur les écarts des actions de croissance (penny stocks) et réalisaient des échanges au profit du CELI lors de baisses planifiées. Lorsque les actions remontaient, ils gonflaient leur CELI parfois à des centaines de millier s de dollars. En revendant les titres, la croissance devenait non imposable. Le stratagème a été éventé sur des forums de day traders et la porte a été refermée par le ministre des Finances.

JJ, FRF :

Le fédéral est venu mettre un point final aux planifications abusives avec ces nouvelles règles.

Les modifications apportées le 16 octobre 2009 visent donc à appliquer les règles anti-évitement du CELI aux opérations de transfert d’actif et à tout revenu que l’on peut raisonnablement leur attribuer ou aux cotisations excédentaires délibérées, aux placements interdits et aux placements non admissibles. De plus, tout retrait effectué sur ces transactions ne viendra plus créer de nouveaux droits de cotisations au CELI.

L’Agence du revenu du Canada évaluera toutes les transactions de ce genre effectuées avant la date des modifications afin de déterminer si un impôt de pénalité peut s’appliquer.

4. Est-ce que le CELI fait partie ou non du patrimoine familial ?

SCS, GP, BNGF :

Les spécialistes s’entendent pour dire que le CELI ne fait pas partie du patrimoine familial.

FM, MGA :

Non, mais remarquerez que cela pourrait changer. On a de la jurisprudence à aller chercher, soit des années de causes et de litiges impliquant le CELI. Ainsi, on pourrait très bien attaquer le bien-fondé d’un mari qui a volontairement privilégié les cotisations à son CELI au détriment du REER, sachant qu’il pourrait divorcer sous peu.

JJ, FRF :

Contrairement au REER, Le CELI ne fait pas partie du patrimoine familial. Toutefois, il peut faire partie des acquêts pour les gens mariés sous le régime de la société d’acquêts, selon la provenance des fonds. Rappelons qu’un bien propre ne fait pas partie des acquêts.

Qu’est-ce qu’un bien propre ? Au niveau des placements, un bien propre est détenu au moment du mariage ou de l’union civile ainsi que les biens reçus par voie de succession ou donation. Les revenus de placements générés sur un bien propre fera partie des acquêts, sauf s’il y avait une indication contraire dans une clause testamentaire d’un bien reçu d’une sucession.En cas de rupture d’une union, le CELI pourra servir à régler certaines dettes de partage entre les conjoints. L’argent du CELI peut être transféré directement dans le CELI de l’ex-conjoint sans affecter les droits de cotisation de celui qui les recevra. Ce genre de transaction n’est pas toujours à l’avantage de l’auteur du transfert vu qu’il n’y aura aucune création de nouveaux droits, l’année suivant

5. Est-il préférable de prendre son CELI dans du revenu fixe ou un placement qui rapporte du gain en capital ou du revenu de dividendes ?

SCS, GP, BNGF :

Comme les titres de croissance offrent habituellement un rendement supérieur aux titres à revenus fixes, certaines personnes préfèrent, dans leur CELI, investir dans des titres de croissance plutôt que des titres à revenus fixes afin de pouvoir effectuer des retraits plus importants à l’abri de l’impôt. Nous ne partageons pas cette approche.

Cette stratégie comporte certains désavantages, notamment :

  • En investissant des titres de croissance dans le CELI, la composante à revenus fixes du portefeuille peut se retrouver dans les placements non enregistrés avec un traitement fiscal désavantageux.
  • Si les titres de croissance génèrent des pertes en capital, lesdites pertes ne peuvent être utilisées à l’encontre de gains en capital passés ou futurs.

Bref, nous favorisons de placer les titres à revenus fixes d’abord dans le REER, ensuite dans le CELI, alors que nous préconisons l’investissement des titres de croissance dans le portefeuille non enregistré.

En outre, l’investissement dans des titres américains n’est pas recommandé. Contrairement au REER, le CELI n’est pas reconnu comme un régime à imposition différée aux États-Unis de sorte qu’une retenue à la source est prélevée sur les revenus (autres que les intérêts). Cette retenue n’est pas récupérable dans les impôts canadiens.

FM, MGA :

Pour ma part, tant et aussi longtemps que les taux d’épargne des CPG et comptes bancaires à haut rendement d’atteindront pas les 4% ou 5%, je préfère les oublier. Ce ne sont pas des mauvais produits, mais le niveau d’économie d’impôt évité devient du gaspillage d’espace CELI. A la limite, pour des projets à moyen terme ou pour les investisseurs assez frileux, je suggère les fonds d’obligations court terme. Ils peuvent aisément dépasser en rendement les 4% et ne sont pas aussi risqués que les fonds d’obligations qui détiennent des titres ayant des échéances de plus de 3 ans.

Les placements en actions ordinaires, à dividendes et ou actions privilégiées ont un potentiel de gain supérieur, donc l’économie d’impôt le sera aussi. SI on n’a pas besoin à court terme des épargnes de son CELI, c’est là un très bon véhicule pour faire un peu de spéculation avec des fonds sectoriels. Ainsi, une mise de 5000 $ qui double en 2 ans ou 3 ans vous laisserait un gros gain non imposable entre les mains !

JJ, FRF :

La majorité des épargnants ont cotisé au CELI avec leur épargne à terme. Étant donné que le taux d’intérêt de ces types de placement est très faible, le plein potentiel du CELI n’est pas utilisé à bon escient. Ainsi, pour les profils moins conservateurs, il est préférable d’inclure des placements qui génèreront des rendements plus élevés pour bien profiter de l’abri fiscal du CELI. Toutefois, vous devez savoir que les pertes en capital ne sont pas déductibles dans un CELI.

6. Avec quelle personne autre que moi (dans ma famille) je peux investir dans un CELI ? Par exemple : mon fils. Merci de la réponse.

FM, MGA :

Tous ceux qui sont résidents canadiens et âgés de plus de 18 ans peuvent détenir un CELI. Pour augmenter vos montants admissibles, vous pouvez ainsi faire des dons à vos enfants majeurs. Ils pourront se constituer de l’épargne libre d’impôt… Quelle belle preuve d’amour !

JJ, FRF :

A priori, vous seul pouvez investir dans votre CELI. Il n’existe pas de CELI de conjoint comme c’est le cas pour le REER de conjoint.

Vous pouvez donner de l’argent à votre conjoint ou tout autre membre de votre famille afin qu’il contribue à leur CELI, sans dépasser les plafonds admissibles car les règles d’attribution pourront s’appliquer sur les cotisations excédentaires du titulaire du CELI qui a bénéficié de votre bonne grâce.

Un membre de la famille admissible à ce genre de transaction comprent un enfant majeur et même un parent.

Les revenus générés à l’intérieur du CELI sont non imposables, conséquemment, les règles d’attribution ne s’appliquent tant et aussi longtemps que les fonds y demeurent. Des changements ont été apportés à l’article 74.5(12) LIR pour tenir compte des dispositions du CELI face aux règles d’attribution entre les conjoints fiscaux.

Surveillez les retraits du CELI de ces dons d’argent. Si les sommes sont réinvesties dans d’autres placements non enregistrés, vous pourriez vous faire attribuer ces revenus par l’application du paragraphe 74.1 (1) LIR.

L’équipe de Conseiller.ca tient à remercier chaleureusement Banque Nationale Groupe financier, Josée Jeffrey et Fabien Major de leur précieuse collaboration.