Croissance économique ne rime pas avec performance boursière

Par André Gosselin | 4 juillet 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les rendements boursiers les plus élevés proviennent de pays à croissance modérée, explique André Gosselin, Ph. D., dondateur de la philosophie de gestion d’Orientatinon Finance.

Parmi les fausses idées sur l’économie qu’entretiennent les investisseurs dans le monde, l’une des plus solidement ancrées suppose que la croissance économique d’un pays devrait se refléter par la croissance du prix des actions cotées en Bourse.

Plus la croissance du PIB est élevée, croit-on, meilleurs sont les rendements boursiers Des données portant sur 17 pays parmi les plus développés de la planète, pour la période qui va de 1900 à 2004, montrent par exemple que l’Afrique du Sud a connu une croissance économique de seulement 1,2 % par an depuis plus d’un siècle. Cela n’a pas empêché son marché des actions de donner un rendement annuel moyen de 7%, le troisième meilleur au monde sur 105 ans d’historique boursier, derrière la Suède (7,6 %) et l’Australie (7,6 %). Le Japon, à l’autre extrémité, a vu son PIB croître de 3,6 % par an depuis 1900 (le taux le plus élevé des 17 pays); pourtant, son marché boursier n’a généré qu’un rendement annuel moyen de 4,2 %.

En 105 ans, le Canada (2,1 %), les États-Unis (2 %), l’Angleterre (1,8 %) et l’Australie (1,9 %) affichent une croissance économique moyenne qui se situe autour de 2 %, et ont pourtant des rendements boursiers parmi les plus élevés au monde (Canada : 6,1 %; États-Unis: 6,6 %; Angleterre: 5,4 %; et Australie : 7,6 %).

En comparaison avec ce groupe de quatre pays anglo-saxons, des pays comme l’Italie (2,7 %), l’Espagne (2,6 %) et la Norvège (2,6 %) ont connu une croissance économique annuelle de 25 % supérieure… et un rendement de leur marché boursier de moins de 3,6 % par an !

Quand on jette un coup d’oeil aux statistiques économiques et boursières de 53 pays importants au cours des 50 dernières années, on constate qu’il n’y a aucune corrélation significative entre la croissance du PIB et la performance boursière.

Compilés par les professeurs Elroy Dimson, Paul Marsh et Mike Staunton, de la London Business School, ces résultats ont été publiés dans le Global Investment Returns Yearbook de 2005, une publication annuelle qui fournit une mine de renseignements aux investisseurs professionnels qui recherchent un portrait historique à long terme des marchés financiers.

Pour chaque année depuis 1900, les auteurs du rapport ont classé les pays selon la croissance de leur PIB par périodes de cinq ans. Ils ont alors découvert qu’il vaut mieux investir dans les pays qui ont la plus faible croissance économique que dans ceux qui affichent la plus forte croissance. Ainsi, une stratégie de portefeuille qui consiste à investir chaque année dans les 20 % des pays qui ont la plus faible croissance du PIB a généré un rendement annuel moyen de 8 %, par rapport à seulement 5 % pour les 20 % des pays qui ont affiché la plus forte croissance de leur PIB.

Quand la même stratégie de portefeuille est appliquée à 53 pays, mais sur une plus courte période, on constate que les 20 % des pays qui ont connu la plus faible croissance du PIB au cours des cinq dernières années ont enregistré un rendement boursier annuel de 12 % en moyenne. Celui-ci est de 6% seulement pour les 20 % des pays qui ont affiché récemment la plus forte croissance du PIB.

Couverture de risque Dans leur Yearbook de 2007, Dimson et ses collègues ont choisi d’examiner, toujours à long terme, l’impact des mesures de protection du portefeuille contre les risques de correction des marchés. Ces produits dérivés, par exemple, peuvent agir comme une police d’assurance, afin de faire en sorte que votre portefeuille d’actions ne subisse jamais une baisse inférieure à – 10 %. Autrement dit, vous seriez prêt à encaisser une chute de la valeur de votre portefeuille de 10 %, et pas davantage, moyennant, bien sûr, un coût qui est souvent déterminé par le prix des options sur le marché et l’indice de volatilité.

Or, quand on applique cette règle sur le marché des actions américain, on constate que pour la période qui va de 1900 à 2006, votre police d’assurance vous aurait coûté beaucoup plus cher, en termes de gains sacrifiés, que la protection promise. Sur plus d’un siècle de statistiques annuelles, on observe que les actions américaines ont affiché un rendement moyen de 9,8 %, avec un écart-type de 19,8 %. En comparaison, votre portefeuille « protégé » vous aurait donné un rendement de seulement 6,9 %, avec un écart-type tout de même appréciable de 18,6 %.

Selon les auteurs de l’étude, les rendements des portefeuilles protégés contre les corrections s’érodent substantiellement, du moins beaucoup trop par rapport au risque contre lequel l’investisseur veut se prémunir (et le prix qu’il est prêt à payer pour courir un risque moindre).

La conclusion de cette étude est claire : les investisseurs qui ont un horizon de placement à long terme auraient intérêt à contrôler leurs risques en diversifiant leurs placements parmi un ensemble suffisant de catégories d’actifs et de marchés financiers, plutôt que d’acheter des produits structurés qui sont, en fin de compte, beaucoup moins efficients pour assumer ce rôle.

Le contenu de cette chronique a été gracieusement fourni par le cabinet Orientation Finance.

André Gosselin