De la cohésion certes, mais de la cohérence surtout, M. Grégoire!

Par Flavio Vani | 4 août 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Dans une lettre ouverte que nous avons publiée mardi, le Conseil des professionnels en services financiers (CDPSF) invitait les conseillers à faire front commun face au « montant pharaonique » de la facture réglementaire. La réplique du président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF), Flavio Vani, ne s’est pas fait attendre trop longtemps. La voici reproduite intégralement.

Dans une lettre ouverte intitulée « Unissons-nous et réduisons la facture! » publiée le 1er août dernier, Mario Grégoire réclame que les conseillers fassent front commun dans le cadre de la révision de la loi 188. Le conseil d’administration de l’APCSF était tout à fait d’accord avec cette approche. En juin 2015, Flavio Vani et Michael Luciani, respectivement président et vice-président de l’APCSF, vous ont approché pour réaliser un mémoire commun à présenter au ministre Leitão. Michael Luciani m’a par la suite fait savoir que vous aviez plutôt décidé de travailler de concert avec des dirigeants d’agents généraux.

Résultat : nous avons encore chacun travaillé en silo. J’ignore qui de votre côté a rédigé le mémoire du CDPSF, mais vous l’avez signé conjointement avec 18 dirigeants d’agents généraux. Du nôtre, nous avons consulté nos membres en les invitant à nous faire parvenir leurs idées par courriel ou en personne lors de consultations en salle.

Sept membres et administrateurs de l’APCSF ont bénévolement travaillé à la rédaction du mémoire. J’ai fait partie de cette équipe en coordonnant son travail et en rédigeant une portion importante du document. J’avais comme objectif de bien refléter les enjeux du conseiller et de la conseillère d’aujourd’hui et de celle ou celui qui, nous l’espérons, prendra la relève demain. Je crois que compte tenu des moyens disponibles, nous avons atteint notre objectif.

Le résultat est que nos deux organismes sont d’accord sur le fait qu’il faut interdire la vente d’assurance sans représentant, que ce soit par internet ou via d’autres canaux de distribution comme les banques, caisses et commerces, notamment des concessionnaires automobiles. Nos arguments diffèrent un peu, mais ils auraient facilement pu former un ensemble cohérent dans un document conjoint. Il s’agit certes là d’un rendez-vous manqué. La suite des choses permettra peut-être au lecteur de voir qui en est responsable.

Les moyens proposés par nos deux organismes diffèrent beaucoup quand il s’agit d’allègement réglementaire. Le CDPSF inscrit en toutes lettres dans la page 23 de son mémoire :

« D’abord, le double encadrement n’est pas en soi un exemple de lourdeur réglementaire. Par exemple, le Mouvement Desjardins doit répondre de ses actes envers 88 entités réglementaires, lesquelles surveillent l’ensemble des activités bancaires, financières et d’assurance, ainsi que les représentants offrant des produits et services financiers et d’assurance de personnes ou de dommage. »

En fait, le CDPSF aborde davantage le double encadrement dans son mémoire en précisant les chevauchements entre l’ACFM (MFDA) et l’AMF. Aucune réelle remise en question du modèle québécois.

Par contre, nous pouvons lire à la fin du mémoire que ses amis les agents généraux proposent d’ajouter une couche à notre réglementation. « Nous sommes plutôt d’avis qu’il faudrait commencer par formaliser le rôle des agents généraux, lesquels seraient reconnus à titre de cabinets gestionnaires, responsables notamment de l’encadrement des représentants d’assurance. » Certes, les agents généraux sont des partenaires importants pour nous les conseillers. Mais pensez juste à la dernière fois où vous avez négocié votre rémunération avec l’un d’entre eux pour concevoir que nos intérêts peuvent parfois diverger. Le mémoire du CDPSF défend qui exactement? Les distributeurs ou les conseillers?

Mais voilà que plus d’un an plus tard, Mario Grégoire, son président, s’insurge du coût de la facture réglementaire. Il s’indigne que les conseillers paient selon lui plus de 5 000 $ par année pour maintenir leur droit de pratiquer au Québec… Sur ce point, nous sommes d’accord avec lui. Mais pourquoi n’a-t-il pas dénoncé cela dans son mémoire déposé au ministre des Finances il y a moins d’un an? Comment compte-t-il diminuer le coût du droit de notre pratique tout en défendant le statu quo concernant les structures réglementaires de notre industrie? Que retiendront nos élus de Québec? Le mémoire qu’il a déposé au ministre Leitão ou ce qu’il a écrit dans sa lettre ouverte parue au beau milieu de l’été? Avec son approche, je ne parierais pas beaucoup sur la diminution du coût de notre droit de pratique.

L’APCSF a apporté dans son mémoire une solution concrète à ce problème. Nous demandons que la Chambre de la sécurité financière soit dissoute et remplacée par « l’Ordre professionnel des conseillers en services financiers ». Ainsi, ce seront nous, les conseillers, qui décideront du coût de notre droit de pratique. Nous pourrons alors suivre la logique qui prévaut dans plusieurs ordres professionnels : un seul droit de pratique plutôt que le cumul de frais avec le nombre de permis.

Finis également les duplications de formations continues et les prix monopolistiques de certaines d’entre elles. L’Institut québécois de planification financière (IQPF) serait intégré à l’ordre professionnel, rendant plus accessible une formation supérieure pour les conseillers.

Notre nouvel ordre professionnel pourrait créer son propre régime d’autoassurance en matière d’assurance responsabilité et serait en fait davantage en mesure de bien le gérer, connaissant bien notre pratique et le dossier des conseillers membres, et donc d’évaluer le risque de chacun. L’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) a d’ailleurs créé son propre fonds d’assurance sans sélection de risque annuelle, qui devrait être retenu par le législateur.

Flavio Vani Président Association professionnelle des conseillers en services financiers

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