Déjà millionnaires grâce au pot

Par La rédaction | 6 mars 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Alors que la légalisation de la consommation et de la vente de cannabis récréatif approche, plusieurs dizaines de Canadiens en ont déjà tiré de juteux profits. Parmi eux, quatre Québécois!

Pas moins de 77 de ces Canadiens auraient amassé des millions de dollars en l’espace de quelques mois seulement après avoir investi dans ce secteur en plein essor d’un océan à l’autre, affirme le Bureau d’enquête du Journal de Montréal

« Je savais que le pot était un bon investissement, mais personne dans le milieu ne pensait que ça rapporterait autant si rapidement », a confirmé au journal l’ex-chef des finances du Parti libéral du Canada Chuck Rifici, désormais reconverti en dirigeant du fonds d’investissement Cannabis Wheaton. Âgé de 43 ans, ce dernier est devenu l’un des piliers de l’industrie du cannabis au pays et posséderait aujourd’hui une fortune personnelle qu’il évalue lui-même à « plus de 100 millions », dont près de la moitié en actions de producteurs de marijuana, selon des documents financiers que le JdeM a pu consulter.

UNE FORTE MAJORITÉ D’ONTARIENS

Au Québec, Sébastien St-Louis, 34 ans, aurait pour sa part accumulé plus de 15 millions de dollars grâce à sa compagnie fondée en 2013, Hydropothecary, qui « pèse » actuellement quelque 660 millions à la Bourse. L’homme d‘affaires de Gatineau reconnaît cependant avoir failli faire faillite à plusieurs reprises avant d’arriver à percer dans le secteur.

Selon le Journal, les histoires d’entrepreneurs devenus millionnaires avant même que le cannabis à usage récréatif ne soit légalisé se compteraient « par dizaines » au pays. Et d’après ses calculs, la majorité d’entre eux, soit 45 sur 77 (58 %), sont originaires de l’Ontario, tandis que quatre (5 %) proviennent du Québec. Enfin, ce petit groupe est quasi exclusivement masculin, puisque seules trois femmes y figurent.

La valeur boursière des compagnies de pot a explosé en 2017 en prévision de la légalisation à venir cette année, souligne le JdeM, qui ajoute que les investisseurs attirés par ce nouveau créneau affluent « au point que l’on craint une bulle spéculative ». « Il y a des compagnies qui ne sont pas dans le cannabis, qui font juste dire qu’elles sont intéressées par l’industrie et boum, leurs actions triplent », explique dans le journal l’analyste Ken Lester, président de Lester Asset Management.

LE MONDE DE LA FINANCE DIVISÉ

Le monde de la finance demeure quant à lui divisé sur cette question. Le mois dernier, la Caisse de dépôt et placement du Québec a ainsi rappelé qu’elle n’avait aucunement l’intention d’investir dans le cannabis. « Nous avons besoin de 100 % de nos capacités. Pour l’instant, ce n’est pas une occasion pour nous », a indiqué son patron, Michael Sabia. Selon lui, la Caisse doit demeurer « vigilante » pour continuer à chercher les meilleures occasions d’investissements afin de trouver un équilibre entre la diversification et le risque. Même son de cloche du côté de Desjardins, qui a récemment annoncé n’avoir « absolument pas » l’intention de s’intéresser à ce marché.

Une prudence d’autant plus de mise que la valeur des actions des firmes de cannabis canadiennes a lourdement diminué depuis quelques semaines. Et si l’on en croit certains analystes, cette tendance devrait se poursuivre. Selon Russell Stanley, d’Echelon Wealth Partners, la forte hausse des prix de ces actions enregistrée l’an dernier ne reposait sur aucune raison fondamentale, et il n’y avait donc aucune raison non plus de croire que ces prix seraient soutenus.

Au Québec, seules la Banque TD et BMO ont pour l’instant accepté que des compagnies du secteur du cannabis ouvrent des comptes bancaires chez elles. De leur côté, la RBC et la Banque Nationale ont indiqué n’avoir aucun client qui soit lié à cette industrie. Pour l’heure, ce dossier semble d’ailleurs susciter un certain malaise au sein des principales banques canadiennes, qui disent surveiller le secteur pour attendre qu’il devienne plus mature avant d’aller éventuellement de l’avant.

Le cannabis : bientôt une réalité pour l’économie canadienne

D’un point de vue strictement économique, la prochaine légalisation du cannabis aura des répercussions, puisque que certaines activités qui relevaient auparavant du marché noir seront dorénavant reconnues officiellement au sein de l’économie canadienne, explique Desjardins dans une récente note d’analyse.

Statistique Canada a d’ailleurs déjà commencé à se préparer en publiant des données historiques sur la production de cannabis, son prix, le nombre de consommateurs et la valeur des dépenses des Canadiens pour l’achat de ce produit, ajoute l’auteur de cette note, Benoit P. Durocher, économiste principal au Mouvement.

UN MARCHÉ DE 5,7 G$ EN 2017

On constate ainsi que le nombre de « fumeurs » a augmenté au cours des dernières années, en particulier au sein de la population âgée de 25 à 64 ans, un phénomène que Statistique Canada attribue en grande partie à une consommation plus élevée à des fins médicales.

Pour 2017, l’organisme fédéral a évalué la valeur totale des dépenses des Canadiens associées au pot à près de 5,7 milliards de dollars. Même si cette somme paraît élevée, elle représente cependant à peine 0,5 % de l’ensemble des dépenses de consommation estimées pour cette année-là. En comparaison, les dépenses associées au tabac auraient par exemple atteint environ 16,5 milliards durant cette période. Conclusion de Benoit P. Durocher, l’industrie du cannabis « demeurera assez marginale avec peu d’effets directs sur l’économie canadienne ».

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