Des conseils pour éviter les poursuites

9 novembre 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
5 minutes de lecture
Statue of Lady Justice (gerechtigkeitsbrunnen) in downtown Frankfurt, Germany. Note to the inspector: The statue was erected in the 19th century and the copyright has expired (public domain).

Lors d’une causerie qu’elle prononçait récemment à Toronto, la juriste Ruth Mercer a mis en garde les conseillers contre les poursuites dont ils peuvent être l’objet.

D’entrée de jeu, elle a souligné que les tribunaux ont un préjugé favorable vis-à-vis des consommateurs lorsque doit être tranché un litige relatif à la prestation de services financiers. À la barre, un conseiller qui montre la moindre hésitation sur le fonctionnement d’un produit financier a toutes les chances d’être débouté. « Assurez-vous de bien connaître ce que vous vendez à vos clients », a conseillé Ruth Mercer.

Elle a indiqué que la négligence est la plainte que formulent les clients le plus couramment, et ce, tant dans le secteur du placement que celui de l’assurance de personnes. Dans bien des cas, les conseillers seront tenus responsables de ne pas avoir pris toutes les dispositions nécessaires avant d’émettre une recommandation. C’est que, dans l’esprit du tribunal, les clients lésés sont tous victimes de mauvaises recommandations qui se sont transformées en résultats négatifs.

Haro sur la négligence professionnelle La négligence professionnelle sera immanquablement invoquée dans le cas où un conseiller émet des recommandations dans un domaine où il n’a pas une compétence reconnue. « N’hésitez jamais à diriger vos clients vers des spécialistes, car vos opinions hypothétiques peuvent vous coûter cher », a prévenu Ruth Mercer. On pourrait également accuser de négligence professionnelle les conseillers qui tardent à investir l’argent de leurs clients. En effet, les procureurs des épargnants qui s’estiment lésés auront tôt fait de démontrer que la procrastination a entraîné des frais supplémentaires et une perte de rendement pour leurs clients. « Dès que ceux-ci vous font parvenir leurs instructions de placement, exécutez-les sur-le-champ », dit Ruth Mercer.

Enfin, dans les situations où un client doit remplacer une police d’assurance vie par une autre, les conseillers doivent vérifier que le nouveau contrat est en vigueur avant de faire annuler la police originelle. Autrement, ce client pourrait se retrouver sans protection ni d’un côté (sa première assurance n’est plus effective) ni de l’autre (le nouvel assureur refuse de le couvrir). La porte est alors grande ouverte pour une accusation de négligence.

Les vertus du KYC Ruth Mercer revient sur un sujet mille fois débattu, mais qui mérite d’être revisité, soit l’obligation légale pour les conseillers de bien connaître leurs clients (ou know your client ou KYC). Elle fait deux constats :

1. Les documents de poursuite font presque toujours état d’opinions diamétralement opposées. Les clients prétendument lésés affirment avoir dit blanc durant leurs rencontres avec leurs conseillers, alors que ceux-ci jurent qu’ils ont dit noir ! Si un tribunal doit trancher, les conseillers partent avec deux prises contre eux.

2. De nombreux clients qu’elle a représentés ont déclaré être des investisseurs prudents. Or, les formulaires KYC indiquent que leur tolérance au risque est élevée.

Dans leur poursuite, les clients clament souvent être préoccupés d’abord par la protection de leur capital, note Ruth Mercer. La perspective de connaître de bons rendements est accessoire. « Je suis persuadée que ce n’est pas ce qu’ils ont dit à leurs conseillers, car les notes que ceux-ci ont prises durant les rencontres signalent le contraire », constate la juriste.

Voilà pourquoi il est capital de toujours conserver les notes écrites lors des rendez-vous avec les clients. Certes, il faut consigner le plus de détails possible, mais il faut porter une attention particulière aux attentes qu’expriment les clients. Ce sera très utile quand viendra le temps de demander une indemnisation à son assureur en responsabilité professionnelle, par exemple.

À ce propos d’assurance de responsabilité professionnelle, Ruth Mercer exhorte les conseillers à ne pas traîner lorsque survient une difficulté avec un client. « Communiquez avec votre courtier séance tenante, même si vous ne savez pas si vous allez être poursuivi. Vous pourrez discuter du problème avec une personne au fait de ces situations, et elle pourra vous donner des conseils pertinents », a expliqué la conférencière.

Les conseillers qui réagissent rapidement font jouer le temps en leur faveur. Ils peuvent poser des questions aux éventuels témoins, évaluer l’étendue financière des dégâts et préparer leur défense.

Et puis, les conseillers doivent savoir qu’ils demeurent innocents jusqu’à preuve du contraire, dit Ruth Mercer. Entre temps, ils doivent tenir leur langue. Si une poursuite leur est signifiée, en aucun cas doivent-ils parler à la partie adverse tant qu’ils n’ont pas quelqu’un qui s’occupe de les défendre. Dans ces situations compliquées, où les conseillers ne sont pas favorisés par les tribunaux, le silence est d’or.