Divulgation des commissions : Industrielle Alliance veut aller plus loin

Par Didier Bert | 27 novembre 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Industrielle Alliance se dit prête à envisager la divulgation des frais des fonds distincts auprès de ses assurés… à condition de ne pas s’arrêter aux seules commissions. De son côté, l’Autorité des marchés financiers (AMF) préfère attendre la mise en œuvre de la divulgation des commissions de suivi intégrées par les courtiers en valeurs mobilières avant d’aller plus loin.

Divulguer tous les frais des fonds distincts? Pourquoi pas! Cette proposition étonnante vient de Bruno Michaud, vice-président principal, Administration et ventes chez Industrielle Alliance. Il a lancé l’idée pendant un atelier sur l’harmonisation de l’encadrement de l’offre des fonds communs et des fonds distincts lors du Rendez-vous avec l’Autorité, le 10 novembre dernier.

À partir du 15 juillet 2016, les courtiers et les négociants en valeurs mobilières devront révéler les commissions de suivi intégrées qu’ils perçoivent. Mais cette obligation ne s’applique pas aux fonds distincts distribués par les assureurs.

La divulgation des commissions de suivi intégrées risque d’engendrer des effets néfastes, selon le vice-président d’Industrielle Alliance.

« Si j’étais dans une institution de dépôt intégrée, en étant propriétaire de ma compagnie de fonds communs, distribués par mes employés en succursale qui sont payés en salaires, je serais capable de développer une gamme de fonds sans commission, illustre Bruno Michaud. Pourtant, je ferais payer la même chose aux clients. »

Certains clients se retrouveront alors avec un état de compte sur lequel ne figurera aucune commission, puisque celle-ci sera intégrée à d’autres frais, dénonce M. Michaud, tandis que les clients d’autres distributeurs verront apparaître les commissions de suivi intégrées, sans payer plus cher, au final.

« Je suis tout à fait ouvert pour discuter de divulgation, résume M. Michaud. Mais je dis à l’AMF que je serai prêt à discuter le jour où on divulguera 100 % des frais. »

Pourquoi cette divulgation plus large n’est-elle pas encore à l’ordre du jour?

« Je ne le sais pas, mais on aurait dû prendre le temps de faire comme il faut, plutôt que divulguer seulement la moitié ou le quart des frais qui sont facturés aux clients », répond Bruno Michaud.

L’AMF surprise, mais réservée

L’AMF préfère attendre la mise en œuvre de la divulgation des commissions avant d’explorer la voie proposée par M. Michaud.

« C’est la première fois que l’industrie nous propose d’aller plus loin que ce qu’on fait », s’étonne Louise Gauthier, directrice des pratiques de distribution et des OAR à l’AMF.

Selon elle, il est trop tôt pour affirmer que la divulgation des commissions entraînera les conséquences néfastes annoncées par M. Michaud.

« Il faut laisser vivre la réforme avant de conclure que c’est suffisant ou pas, prévient-elle. On est parti de très peu et cela a pris du temps. »

Mais il n’est pas souhaitable que l’industrie bancaire soit favorisée en transformant les commissions de suivi en salaires, précise Mme Gauthier. « C’est quelque chose qu’on va suivre de près. »

Les régulateurs seront vigilants

Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) restent neutres quant à la forme de rémunération, a souligné Louise Gauthier.

« Ce que nous voulons, c’est que le conflit d’intérêts soit géré. Maintenant si les craintes de M. Michaud se matérialisent, cela va nous interpeller. L’important pour nous, c’est que les consommateurs soient bien servis, que les choses soient faites en toute transparence à leur égard. »

L’intervention de Bruno Michaud survient alors que le Conseil canadien des responsables de la réglementation d’assurance (CCRRA) s’apprête à former un groupe de travail pour examiner la réglementation des fonds distincts. Le CCRRA regroupe l’Autorité des marchés financiers, la Commission des services financiers de l’Ontario et les surintendants des assurances des autres provinces canadiennes. Le mandat de ce groupe de travail pourrait inclure la divulgation des frais des fonds distincts, confie Louise Gauthier.

Ce que dit le plan stratégique 2014-2017 du CCRRA

« Pour réaliser nos priorités stratégiques, nous collaborerons avec des intervenants afin d’entreprendre ou de poursuivre les initiatives suivantes au cours des trois prochaines années : […] Documentation financière : Se pencher sur les messages et les méthodes de diffusion afin d’aider les consommateurs à faire des choix avisés en matière d’assurance. Fonds distincts : Examiner le contexte réglementaire et évaluer la pertinence d’un arbitrage réglementaire potentiel. »

Source: http://www.ccir-ccrra.org/fr//about/CCIR%20Strategic%20Plan%202014-17%20FR.pdf


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Didier Bert

Didier Bert est journaliste indépendant. Il collabore à plusieurs médias sur les thèmes de l’économie, des finances et du droit.