La monnaie numérique nationale, où en est-on ? 

Par Didier Bert | 3 mars 2023 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Pièces de cryptomonnaie
Photo : gopixa / istockphoto

À quoi pourrait ressembler une monnaie numérique émise par une banque centrale ? Une équipe de travail de la Banque du Canada s’est penchée sur ce sujet.

« La conception d’une monnaie numérique de banque centrale (MNBC) de détail aurait probablement un impact important sur le système bancaire d’un pays », prévient le rapport intitulé Monnaies numériques de banque centrale: Revue de la littérature et nouvelles questions, publié par la Banque du Canada.

Ce document décrit les grandes lignes de ce que serait une telle monnaie numérique nationale, destinée à un usage par le grand public. Une telle MNBC serait un nouveau type de monnaie de détail, car elle serait un actif sans figurer au passif d’un autre acteur privé, précise le rapport.

En tant qu’équivalent numérique de l’argent physique, une MNBC viendrait concurrencer les dépôts bancaires, à la fois comme moyen de paiement et comme réserve de valeur. Or, « la demande pour une MNBC pourrait être importante », prévoit le rapport de la Banque du Canada. Un sondage mené au Pays-Bas sur la demande d’une hypothétique CBDC montre que 49% des répondants souhaiteraient pouvoir ouvrir un compte chèques en MNBC, et ils sont encore plus nombreux (54 %) à se dire prêts à placer de l’argent sur un compte d’épargne en MNBC si il offre le même taux d’intérêt qu’une banque commerciale.

Au Canada, une MNBC universellement acceptée, dotée des mêmes caractéristiques que l’argent comptant pourrait prendre 19 % des parts de marché des transactions sur le point de vente, selon le rapport. Une MNBC comparable à une carte de débit pourrait prendre 22 % de ce marché. Enfin, une MNBC dotée à la fois des spécificités de l’argent comptant et des cartes de débit pourrait prendre 25 % du marché – pour une MNBC qui ne ferait pas l’objet de récompenses contrairement aux cartes de crédit.

Quel impact sur les banques ?

En venant remplacer une partie des dépôts bancaires, une MNBC pourrait bien augmenter les coûts de financement des banques, que la monnaie numérique nationale soit rémunérée ou non. Si la MNBC offrait un taux d’intérêt supérieur au taux d’équilibre, les banques pourraient voir leurs fonds disponibles se réduire, ce qui diminuerait la création de crédit. Mais les banques pourraient choisir de relever les taux d’intérêt offerts aux déposants, utilisant ensuite les fonds pour créer du crédit.

Une MNBC apporterait davantage de possibilités aux particuliers, notamment en provoquant une accélération des dépôts et des retraits. Cet aspect peut inquiéter les décideurs politiques, craignant la survenue de paniques qui pourraient fragiliser les banques, souligne le rapport.

Pourtant, une MNBC pourrait bien au contraire amortir les perturbations qui pourraient frapper  le système de paiement en cas de faillite d’une banque, en fournissant un moyen alternatif de paiement. De plus, les retraits de MNBC sont plus faciles à observer que les retraits d’argent liquide : les informations collectées pourraient aider les décideurs et les banques à gérer les perturbations. Enfin, l’arrivée d’« une MNBC pourrait également inciter les banques à revoir leurs contrats de dépôt pour les rendre plus résistants aux pannes », décrit le rapport de la Banque du Canada.

Didier Bert

Didier Bert est journaliste indépendant. Il collabore à plusieurs médias sur les thèmes de l’économie, des finances et du droit.