La retraite de la génération X

Par Jean-François Venne | 5 mars 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Tirelire en forme de cochon sur laquelle est posée une étiquette portant le mot "retraite".
Photo : belchonock / 123RF

Certains imaginent la génération X endettée et prise entre des Tanguy et des parents en perte d’autonomie. Le portrait réel est moins dramatique, mais de judicieux conseils sont requis pour réussir leur dernière étape vers la retraite.

Les membres du Breakfast Club, maintenant âgés entre 39 et 54 ans, sont-ils condamnés à une maigre retraite? Pas nécessairement, selon Jean-François Therrien, actuaire en chef du Régime de rentes du Québec. « En fait, certaines études révèlent un haut degré de sensibilisation et de préparation pour une bonne partie de ces Québécois », note-t-il.

En 2017, un sondage de Retraite Québec montrait que près de 87 % des travailleurs âgés entre 35 et 54 ans touchant un revenu supérieur à 25 000 dollars savaient d’où proviendra leur argent après la fin de leur vie active. Plus de 70 % s’affirmaient convaincus d’avoir des revenus suffisants et 63,2 % jugeaient qu’ils épargnaient assez.

« Leur situation reste assez encourageante, mais on voit quand même plus d’un tiers des Québécois de 35-54 ans qui ne croient pas épargner suffisamment pour la retraite. »

– Jean-François Therrien

Par ailleurs, l’Enquête sur la sécurité financière 2016 de Statistique Canada indique que 432 000 Québécois âgés de 45 à 54 ans possédaient des REER, un compte de retraite immobilisé (CRI) ou un outil d’épargne semblable, avec une moyenne d’accumulation de 127 000 dollars. Quelque 383 000 individus bénéficiaient d’un régime de pension agréé de l’employeur. Côté CELI, 243 000 Québécois de ce groupe d’âge en détenaient un en 2016 et il contenait en moyenne 23 000 dollars.

« Leur situation reste assez encourageante, mais on voit quand même plus d’un tiers des Québécois de 35-54 ans qui ne croient pas épargner suffisamment pour la retraite », précise Jean-François Therrien.

FAIRE LE POINT

« Les actifs des gens de ce groupe d’âge qui arrivent dans mon bureau sont souvent un peu éparpillés, explique Fernand Loiselle, planificateur financier à IG Gestion de patrimoine. Ils possèdent des REER, un CELI, peut-être un régime de retraite d’un employeur actuel ou ancien et ils ne savent pas si cela suffira à leur procurer une bonne retraite. »

« Les actifs des gens de ce groupe d’âge qui arrivent dans mon bureau sont souvent un peu éparpillés. »

– Fernand Loiselle

Le conseiller commence donc par bien analyser leur situation financière globale, incluant les revenus, les dépenses, les dettes, l’épargne, l’assurance et des éléments fréquemment négligés, comme le testament ou le mandat de protection. « Parfois, le premier exercice à réaliser s’avère aussi simple que d’établir un budget, afin qu’ils prennent conscience de leur niveau de dépenses », poursuit M. Loiselle.

Il ajoute que la persistance des bas taux d’intérêt et la qualité des rendements sur les marchés financiers depuis plusieurs années ont engendré de mauvaises habitudes. Les gens ne sont pas préparés à un revirement de situation. Or, pour une personne dans la quarantaine ou la cinquantaine, se retrouver écrasée sous les dettes en raison d’une remontée des taux au moment où les gains boursiers chuteraient pourrait avoir des conséquences dangereuses. Ils se verraient incapables de cotiser à leur épargne-retraite, à un moment où l’argent déjà mis de côté générerait moins de croissance que prévu.

Il est donc important pour eux de réduire dès maintenant leur endettement et de contrôler leurs dépenses pour se laisser une marge de manœuvre. Avoir une vraie stratégie d’épargne permet aussi de miser sur des investissements diversifiés tant dans leur nature (croissance c. protection du revenu) que géographiquement, nécessaire pour absorber des coups durs sur le marché.

VUE D’ENSEMBLE

Lysanne Gagnon, planificatrice financière à Robert Gagnon inc., soutient que les X arrivent à un moment de leur vie où ils doivent passer à la vitesse supérieure pour maximiser leur épargne-retraite. Cela commence en planifiant. « La retraite ne doit plus représenter une perspective lointaine pour eux, mais plutôt un projet, et ils doivent s’armer d’un plan concret », affirme-t-elle.

C’est d’autant plus vrai que plusieurs stratégies peu ou mal connues peuvent donner des résultats intéressants. On peut penser à l’usage des sommes décaissées d’un régime enregistré d’épargne-études (REEE), que l’enfant n’utilise pas entièrement. Ou encore au prêt REER pour combler des droits de cotisation non utilisés. « C’est toutefois un outil à manier avec prudence, ajoute Lysanne Gagnon. Il faut rembourser ces prêts assez rapidement. » Il faut en effet éviter que l’intérêt payé sur cette somme ne vienne rogner le profit des investissements ou le remboursement d’impôt.

« La retraite ne doit plus représenter une perspective lointaine pour eux, mais plutôt un projet, et ils doivent s’armer d’un plan concret. »

– Lysanne Gagnon

D’autres conseils sont parfois plus simples. Par exemple, à ceux qui se précipitent pour rembourser leur hypothèque, Lysanne Gagnon suggère plutôt de continuer à maximiser leur épargne. « Avec de bas taux d’intérêt et des rendements boursiers intéressants, optimiser les investissements devient plus profitable », croit-elle.

Les X ne gèrent pas tous bien leurs besoins en matière d’assurance, pourtant cruciaux. Une assurance vie peut aider la succession à payer l’impôt sur le gain en capital réalisé sur un bien immobilier ou une entreprise lors d’un décès. Elle peut également soutenir le revenu du survivant si celui-ci perd, en tout ou en partie, les prestations du régime de retraite de l’ex-employeur du défunt. Les gens doivent aussi détenir un testament en règle et désigner les bons bénéficiaires, surtout dans le cas d’une famille recomposée.

« Il y a beaucoup de détails à régler en vue de la retraite qui doivent être planifiés », conclut Lysanne Gagnon.

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EN CHIFFRES

En moyenne, les Québécois de 45 à 54 ans ont 37 200 dollars de dettes sur des marges de crédit, 19 800 dollars en prêts automobile et 6 300 dollars sur des cartes de crédit. (Source : Statistique Canada)

• 54,6 % des travailleurs de 35 à 54 ans au Québec ont déjà calculé ou fait calculer ce qu’ils doivent épargner chaque année pour obtenir un revenu convenable à la retraite.

• 47,8 % ont rencontré un spécialiste pour planifier leur retraite.

• 30 % ont utilisé un outil de calcul en ligne pour planifier financièrement leur retraite.

(Source : Retraite Québec)

Jean-François Venne