La Suède maintient l’argent liquide

Par La rédaction | 13 juillet 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Paiement avec un téléphone intelligent.
Photo : Ridofranz / iStock

La Suède a longtemps fait figure de pionnière dans le monde en matière de paiement dématérialisé, mais elle vient de décider de changer de cap et entend conserver l’usage de l’argent liquide, rapportent Les Echos.

Alors que le royaume scandinave se préparait depuis de longues années à la disparition de l’argent comptant, son gouvernement a opéré un spectaculaire revirement en adoptant, il y a quelques mois, une loi contraignant les banques à « assurer l’approvisionnement d’un niveau suffisant de services pour obtenir de l’argent liquide », explique le quotidien économique.

La raison? « Le pays est allé trop vite et s’est fait peur », estime le journal, qui rappelle que celui-ci avait accueilli dès 2012 un service de paiement instantané électronique. Mis au point par les banques suédoises, ce système baptisé Swish avait alors « été adopté naturellement dans un pays confiant envers ses autorités, ouvert à l’innovation technologique et où l’accès à Internet est quasi total », notent Les Echos. Aujourd’hui, ce sont quatre transactions sur cinq qui sont réalisées électroniquement, selon la Riksbank, la banque centrale suédoise. Au point que le royaume semblait promis à devenir entièrement « cashless » d’ici à 2030.

RISQUES DE PARALYSIE DE L’ÉCONOMIE EN CAS DE PANNE

À rebours de cette tendance lourde, l’État suédois a toutefois décidé le 1er janvier dernier de promulguer une nouvelle loi obligeant les institutions financières du pays à offrir au public un stock important d’argent liquide. Sous la pression d’une partie de l’opinion publique, le gouvernement a en effet dû accepter d’instaurer un cadre réglementaire destiné à protéger les personnes les plus vulnérables et celles n’ayant pas la possibilité d’accéder à des systèmes de paiements numériques, comme les handicapés, les ménages à faible revenus ou les résidents installés dans des zones reculées.

Baptisé « Kontantupproret » (« rébellion pour le maintien de l’argent liquide »), un mouvement populaire s’était créé en 2015. Au fil des ans, celui-ci avait réussi à démontrer que les paiements électroniques ne convenaient pas forcément aux personnes âgées, ni aux aveugles ou aux malvoyants, ni encore aux immigrants fraîchement arrivés, et qu’ils contribuaient donc à la marginalisation de ces populations. Dans le même temps, certains observateurs avaient mis en avant le fait que, en cas de cyberattaque ou de panne d’électricité généralisée, l’économie, et au-delà l’ensemble de la société suédoise, risquaient d’être paralysées.

Analysant les raisons à l’origine de cette volte-face du gouvernement suédois, Les Echos relèvent que l’évolution programmée du royaume vers une société sans cash a été « particulièrement rapide ». En termes de valeur, le montant d’argent liquide en circulation y a en effet été divisé par deux entre 2007 et 2018. Résultat : en 2016, seules 15 % des transactions commerciales s’y étaient réglées en espèces, comparativement à 40 % six ans auparavant. « Environ 60 % des agences bancaires de Suède n’ont plus de services pour distribuer des espèces », indiquait d’ailleurs récemment dans la presse suédoise Niklas Arvidsson, chercheur à l’Institut royal de technologie de Stockholm et auteur de l’ouvrage Construire une société sans espèces.

La rédaction