Le Canada veut s’attaquer au blanchiment d’argent

Par La rédaction | 17 juin 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Évasion fiscale
Photo : lightwise / 123RF

Le ministre canadien des Finances, Bill Morneau, et son collègue de la Sécurité frontalière et de la Réduction du crime organisé, l’ancien policier Bill Blair, ont récemment rencontré des homologues provinciaux à Vancouver pour organiser la lutte contre les crimes financiers au pays.

« Le gouvernement est déterminé à utiliser les outils qui sont à sa disposition pour détecter, arrêter et poursuivre les activités de blanchiment d’argent, a soutenu Bill Morneau, par voie de communiqué. Mais il ne peut y parvenir seul. Toutes les parties concernées – les entreprises, les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral – doivent maintenant unir leurs forces et discuter des mesures que nous pouvons prendre pour mieux protéger les Canadiens et lutter contre le blanchiment d’argent. »

Le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes étaient notamment à l’ordre du jour de cette rencontre, qui a permis de dégager un consensus sur certains points. Le gouvernement entend faciliter l’identification des propriétaires et des biens possédés en améliorant la transparence de la propriété effective. Des consultations provinciales et territoriales auront bientôt lieu en vue d’établir un registre public de propriétés effectives. 

UN NÉCESSAIRE REGISTRE PUBLIC

En mai dernier, un rapport de l’Institut C.D. Howe suggérait déjà de créer un registre public des bénéficiaires effectifs des sociétés, des fiducies et des biens immobiliers. Celui-ci devait notamment permettre des échanges d’informations avec d’autres pays. Certaines informations sensibles, tels que les numéros de passeport et les adresses résidentielles complètes, seraient protégées et accessibles uniquement aux autorités. De plus, seules les informations concernant les propriétés des bénéficiaires seraient touchées, et non les informations financières ou celles portant sur les opérations commerciales. Selon l’Institut, entre 100 et 130 milliards de dollars sont blanchis au Canada chaque année.

Le registre faciliterait notamment la vie des enquêteurs en assurant une meilleure disponibilité et une meilleure intégrité des informations sur les véritables ayants droit. Les enquêteurs pourraient aussi bénéficier de plus de moyens financiers.

Le gouvernement a en effet annoncé, à l’issue de la rencontre, l’octroi d’un montant pouvant atteindre 10 millions de dollars à la Gendarmerie royale du Canada (GRC), en plus des sommes déjà engagées dans le budget de 2019. Il s’agit de l’aider à investir dans une infrastructure de gestion et de technologie de l’information et dans des outils numériques en vue de s’attaquer aux crimes financiers complexes.

MESURES BUDGÉTAIRES

Le budget 2019 prévoyait un investissement dans la GRC de 68,9 millions de dollars sur cinq ans, suivi de 20 millions de dollars par année par la suite afin de soutenir les enquêtes sur la criminalité financière. L’Agence du revenu du Canada (ARC) avait reçu, elle, un montant de 50 millions de dollars sur cinq ans pour mettre sur pied quatre nouvelles équipes d’audit immobilier. Le secteur immobilier canadien, notamment en Colombie-Britannique, a souvent été pointé du doigt pour sa vulnérabilité au blanchiment d’argent. 

Le plus récent budget comportait d’ailleurs aussi un financement de 16,9 millions de dollars sur cinq ans et 1,9 million par la suite pour augmenter la capacité opérationnelle du Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada. Celui lui permettra d’effectuer un plus grand nombre d’examens de conformité et d’appliquer plus strictement la loi dans le secteur de l’immobilier.

UN NOUVEAU GROUPE DE TRAVAIL

En plus d’augmenter la collaboration entre les secteurs gouvernementaux et d’élaborer des pratiques exemplaires de lutte contre le blanchiment d’argent, le gouvernement fédéral s’est engagé lors de la rencontre de Vancouver à mettre sur pied un groupe de travail avec la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada. Le groupe aura pour tâche de discuter des risques inhérents au blanchiment d’argent et à d’autres activités illicites qui peuvent survenir dans l’exercice du droit. Le groupe de travail tiendra sa première réunion dans le courant du mois.

« Ce nouvel effort de collaboration aidera à mieux comprendre les risques possibles dans le cadre de l’exercice du droit, ainsi qu’à établir des pratiques exemplaires en matière de réglementation par les ordres professionnels de juristes, a indiqué la Fédération, par voie de communiqué. Il s’agit d’un effort collectif visant à rendre le Régime canadien de LRPC-FAT [Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, NDLR] encore plus solide et à protéger l’intégrité du système juridique et du système financier du Canada. » 

La Fédération s’est également prononcée en faveur de la proposition du gouvernement fédéral de déterminer la faisabilité d’un registre national des bénéficiaires effectifs. Par deux fois, en mars et en mai 2018, la Fédération avait réclamé ce registre et déploré son absence des initiatives du Canada pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes.

La rédaction