Plus en contrôle grâce au paiement numérique?

Par La rédaction | 5 octobre 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Paiement avec un téléphone intelligent.
Photo : Ridofranz / iStock

L’anxiété financière est très présente chez les jeunes Canadiens depuis le début de la pandémie, ce qui les pousse à davantage recourir aux nouvelles technologies, selon un récent sondage publié par Interac.

Plus de la moitié des membres de la génération Y et des adultes de la génération Z (53 %) affirment ainsi être « plus préoccupés que jamais » quant à la gestion de leurs finances personnelles. Fermeture de succursales oblige, ils indiquent s’être rabattus sur les paiements numériques, ce qui, d’après eux, leur permet de mieux suivre leurs dépenses et d’avoir le sentiment d’être plus « en contrôle » de leur situation financière.

Le sondage révèle également que les jeunes craignent avant tout de dépasser leur capacité financière : c’est le cas de 50 % des membres de la génération Y et de 47 % des adultes de la génération Z, comparativement à 31 % des baby-boomers et à 36 % de la génération silencieuse (les personnes nées entre le milieu des années 1920 et le milieu des années 1940). Dans ce contexte, souligne Interac, « respecter leur budget est devenu une priorité », ce qui fait que la moitié des Y et des adultes de la génération Z (50 %) utilisent désormais les paiements numériques pour gérer leurs finances en temps réel.

SENTIMENT DE CONTRÔLE FINANCIER

Cet état d’esprit se reflète aussi par la façon dont ces consommateurs utilisent le service Virement Interac pour partager des factures et des coûts, en plus de tenir un registre de leurs dépenses. Par exemple, près de six adultes sur 10 de la génération Z (57 %) et la moitié des Y (50 %) ont uniquement compté sur ce service durant la pandémie pour recevoir ou rembourser de l’argent pour des achats quotidiens, comme l’épicerie. Résultat, l’ensemble des transactions de Virement Interac a enregistré une croissance de 55 % entre avril et août 2020 par rapport à la même période l’an dernier.

Le plus grand rôle du débit comme outil de gestion financière personnelle apparaît clairement, souligne Interac. En effet, le sondage montre que plus de sept Y sur 10 (72 %) et près des deux tiers des adultes de la génération Z (65 %) croient que les consommateurs devraient avoir la possibilité d’utiliser le débit, quel que soit le lieu de l’achat, qu’il s’agisse d’un paiement en ligne, d’un achat intégré dans une application ou d’un achat en magasin.

Ces répondants indiquent en outre que l’utilisation du débit les rend moins susceptibles d’acheter quelque chose dont ils n’ont pas besoin (52 % des Y et 57 % des adultes de la génération Z), ce qui leur permet de se sentir en contrôle financièrement (56 % et 48 %, respectivement). Enfin, 67 % des Y et 59 % des sondés de la génération Z assurent que le fait de mieux contrôler leurs dépenses les incite à être plus optimistes envers leur avenir financier.

VERS UNE « GESTION ÉMOTIVE » DES CLIENTS?

Planificateur financier, conseiller en sécurité financière et conseiller en gestion du patrimoine auprès de Gestion de Capital Assante, Fabien Major n’est pas étonné de cette progression rapide des paiement numériques.

« Avec la pandémie, on a sauté une étape en ce qui concerne la compilation des données, en particulier des dépenses. Et les sites Internet de cartes de crédit ou les applications qui permettent d’effectuer un suivi directement à partir de son téléphone cellulaire vont faire en sorte qu’on n’aura désormais plus besoin de classifier toutes ses dépenses. Un autre avantage de ce système est qu’il permet de voir immédiatement la façon dont on gère ses finances personnelles et de noter les postes de dépenses où il y a eu dépassement de la limite qu’on s’était fixée, par exemple en épicerie ou dans ses achats en ligne. »

Fabien Major attribue également cette avancée au fait qu’elle répond aux attentes de nombreux consommateurs : « Cela correspond à une tendance qu’on nomme “friction free”, autrement dit la suppression de tous les irritants possibles existant entre l’intention d’un consommateur et le geste qu’il doit poser pour l’accomplir. Par exemple, s’il doit sortir son calepin pour y écrire chacune de ses transactions et transférer ensuite ces informations dans un chiffrier Excel, s’il doit conserver ses reçus… Tout cela prend du temps et cause des “frictions”, d’autant plus que beaucoup de gens font de la procrastination et finissent par se retrouver au bout de quelques semaines, voire quelques mois, dans une situation où ils ont dépassé les limites de leur budget. En résumé, le recours aux transactions électroniques permet de compiler et de gérer ses finances, et donc en définitive de simplifier sa gestion budgétaire. Ça permet de voir avec précision de quelle façon l’argent qu’on dépense est utilisé. »

En raison de son succès, ce système « va certainement se généraliser assez vite, au fur et à mesure que les institutions financières développeront leurs propres outils d’intelligence artificielle [IA] », estime Fabien Major. Et les choses n’en resteront sûrement pas là, ajoute-t-il, car, en matière d’IA, la technologie permettra bientôt que les terminaux de paiement en ligne pourront « déceler les émotions dans le visage d’un client et interagir avec lui ».

Concrètement, précise le conseiller, « si quelqu’un a l’air renfrogné ou soucieux, l’interface du site Internet de sa banque pourrait par exemple changer de couleur, ou alors il pourrait y avoir une voix ou un message sur l’écran disant : “Ne vous inquiétez pas, tout va bien dans vos finances” ».

Conclusion de Fabien Major : l’avenir pourrait bien être à une certaine forme de « gestion émotive » des clients.

Le sondage a été mené en ligne par Hill+Knowlton Stratégies du 25 au 31 août auprès d’un échantillon tiré au hasard de 992 adultes répartis d’un océan à l’autre. Sa marge d’erreur est de ±3 %, 19 fois sur 20. Les tranches d’âge des sondés comprenaient : génération Z adulte (18-23 ans), Y (24-39), génération X (40-55), baby-boomers (56-74) et génération silencieuse (75+).

La rédaction