Les taux bas, un risque pour l’industrie financière

Par La rédaction | 25 novembre 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Deux poings frappant le signe du dollar qui vole en éclats.
Sergey Nivens / 123RF

S’ils restent bas trop longtemps, les taux d’intérêt pourraient affecter la rentabilité des établissements financiers, poussant ces derniers à prendre plus de risque pour trouver du rendement. 

Il s’agit là d’un des périls guettant le marché financier identifiés par la Réserve fédérale américaine (Fed) lors de son récent rapport sur la stabilité financière. Elle-même vient de baisser ses principaux taux directeurs trois fois de suite, rappelle le quotidien Les Echos. 

LA NOUVELLE NORMALITÉ

« Si les taux d’intérêt devaient rester bas pendant une période prolongée, la rentabilité des banques, des assureurs et des autres intermédiaires financiers pourrait être mise à rude épreuve et les inciter à adopter un comportement à risque, ce qui augmenterait la vulnérabilité du secteur face à des chocs ultérieurs », peut-on lire dans le rapport.

Pourtant, le président de la Fed, Jerome Powell, soutenait récemment devant le Congrès que les taux d’intérêt plus bas, une faible inflation et une croissance au ralenti était probablement la nouvelle normalité, partout dans le monde. Il avait même admis que la Fed était peut-être allée un peu trop vite avec ses hausses de taux entre décembre 2015 et décembre 2018. 

La combinaison des bas taux et du haut niveau d’endettement des entreprises non financières pourrait représenter un risque financier, au même titre qu’un éventuel Brexit dur et les tensions commerciales internationales. 

LES CRYPTOS, UN POTENTIEL DÉSTABILISANT 

La Fed garde aussi un œil sur le développement des monnaies virtuelles, notamment le Libra de Facebook. Les initiateurs de ce type de projets tentent de réduire la volatilité des cryptomonnaies en les adossant à un panier d’actifs.

« La possibilité pour un système de paiement de monnaie virtuelle stable d’atteindre rapidement une échelle mondiale pose des défis importants et introduit des risques en matière de stabilité financière, de politique monétaire, de garde-fous contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, ainsi que de protection des consommateurs et des investisseurs », soutient la Fed. Cette dernière en appelle à une réglementation rigoureuse. 

REVIVRE 2000 ET 2008

Loin de pousser à la panique, la Fed soutient que les risques mondiaux sont pour l’instant contenus. 

Les professeurs de finance Georges Hübner et Roland Gillet n’en sont toutefois pas aussi convaincus. Au moment où les marchés d’actions, notamment aux États-Unis, connaissent de fortes hausses (plus de 20 % de progression en 2019), ils lancent un avertissement, repris dans le quotidien belge L’Écho. 

Selon eux, nous serions en train de commettre les mêmes erreurs qu’avant la crise de 2000, notamment en surestimant les perspectives de bénéfices des entreprises au moment où l’économie montre pourtant des signes de ralentissement. « À l’époque, il y avait aussi un excédent de liquidités qui s’investissait dans des actions avec des perspectives soi-disant énormes », souligne Georges Hübner, professeur de finance à HEC Liège.

On se souvient de la suite. La bulle des valeurs internet sur le Nasdaq a éclaté, faisant aussi exploser bien des portefeuilles. « Les mêmes causes ont eu des effets encore plus violents et plus systémiques en 2008, rappelle le professeur. On a l’impression que les gens n’apprennent jamais. »

UN RÉVEIL BRUTAL

Quant à lui, Roland Gillet, professeur de la Sorbonne et de l’Université libre de Bruxelles s’inquiète de la montée générale de l’endettement, alimentée par le faible coût de l’argent. 

Il croit que les injections de liquidité des banques centrales pourraient soutenir la hausse des marchés encore un temps, mais que le niveau d’endettement augmente les probabilités d’une déconvenue future, qui pourrait être assez violente. 

Un investisseur averti en vaut deux!

La rédaction