PCU : une avalanche de remboursements volontaires

Par La rédaction | 5 octobre 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Remboursement
Photo : IvelinRadkov / iStock

Les contribuables d’un océan à l’autre ont renvoyé 830 000 versements de Prestation canadienne d’urgence (PCU) à l’Agence du revenu du Canada, rapporte Radio-Canada.

Dans un texte mis en ligne dimanche sur son site web, la chaîne de télévision précise que cette donnée provient de documents que l’agence fédérale a fait parvenir à CBC News. Ceux-ci montrent que les remboursements sont composés de versements de la PCU et de la Prestation canadienne d’urgence pour les étudiants (PCUE). Ils révèlent en outre que les contribuables canadiens ont déposé quelque 20 000 dénonciations anonymes dans le cadre d’un programme du gouvernement fédéral invitant les citoyens à signaler les cas de fraude à la PCU, à la PCUE et à la Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC). Autant de dénonciations qui entraîneront des « enquêtes approfondies » de la part de ses services, promet le gouvernement.

« Il y a plusieurs raisons pour lesquelles des remboursements volontaires ont été effectués. Si les demandeurs ont demandé par erreur un paiement de PCU à la fois à Service Canada et à l’ARC pour la même période, si un demandeur s’est rendu compte par la suite qu’il n’était pas admissible à la prestation, ou si un demandeur est retourné au travail plus tôt que prévu », explique un porte-parole de l’ARC, Christopher Doody, dans un courriel envoyé à Radio-Canada. L’agence indique néanmoins être dans l’incapacité de chiffrer le montant total qui lui a été remboursé, car cet argent est placé dans un compte général, où se trouvent d’autres remboursements sans lien avec les programmes d’urgence instaurés au printemps.

TROP DE MESSAGES CONTRADICTOIRES

Face au niveau très élevé de remboursements, l’opposition accuse Ottawa d’avoir eu une communication erratique dans ce dossier. « Pendant la pandémie, les libéraux ont continuellement envoyé des messages contradictoires aux Canadiens qui demandaient des prestations d’urgence. Cela a semé la confusion chez de nombreuses personnes qui ne savaient pas si elles étaient admissibles ou non. Il était important que le gouvernement Trudeau communique correctement ces avantages. Malheureusement, il ne l’a pas fait et a laissé les Canadiens dans le flou », dénonce le député conservateur Philip Lawrence.

Avocat en droit du travail basé à Toronto, Lluc Cerda abonde dans le même sens, estimant qu’il s’agit là d’un nombre « énorme » de remboursements, en grande partie dû au manque de clarté des informations diffusées par le gouvernement fédéral. D’après le juriste, il était d’ailleurs quasiment impossible de parler à un agent des centres d’appels de l’ARC ou de Service Canada durant les premières semaines qui ont suivi la mise en place du programme. Pire, plusieurs personnes ayant malgré tout réussi à parler avec un employé de l’Agence auraient reçu des informations contradictoires, affirme l’avocat. « La manière dont le plan a été mis en place, de manière précipitée, ce qui était justifié vu les circonstances, a causé beaucoup de confusion. Je pense que c’est en grande partie pourquoi il y a aujourd’hui autant de remboursements », estime Lluc Cerda.

Conscient du problème, le gouvernement fédéral a décidé de mettre fin à la PCU à compter du 3 octobre pour la remplacer par une série de nouvelles prestations, annonce Service Canada sur son site web. Dans un communiqué diffusé lundi, Ottawa reconnaît que « de nombreuses personnes subissent toujours les effets de la COVID-19 et ont besoin d’un soutien financier temporaire », ce qui a conduit les pouvoirs publics à mettre sur pied « trois nouvelles prestations » qui seront administrées par l’ARC : la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE), la Prestation canadienne de maladie pour la relance économique (PCMRE) et la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants (PCREPA). Concrètement, les personnes admissibles pourront réclamer ces prestations en ligne au moyen du portail Mon dossier de l’ARC ou par téléphone grâce au service téléphonique automatisé de l’Agence. À noter que les demandes seront acceptées seulement à partir du 12 octobre.

DES PROGRAMMES PLUS AGILES ET PLUS FLEXIBLES

Afin que les prestations de la relance « offrent un soutien plus ciblé aux personnes qui en ont encore besoin », l’ARC indique que le processus de demande comprend de nouveaux éléments, dont les suivants :

  • des périodes d’admissibilité plus courtes – une semaine pour la PCMRE et la PCREPA, et deux semaines pour la PCRE;
  • des périodes rétroactives – les personnes devront présenter leurs demandes après la fin des périodes concernées;
  • une retenue d’impôt à la source de 10 %;
  • un délai de réception de paiement de trois à cinq jours pour les versements effectués par dépôt direct, et de 10 à 12 jours pour ceux faits par chèque et envoyés par la poste.

Dans certains cas, le gouvernement demandera en outre aux contribuables de lui fournir « des renseignements supplémentaires afin de pouvoir vérifier leur admissibilité avant de traiter leur demande ». Ce sera le cas, par exemple, si les dossiers de l’ARC mentionnent qu’un demandeur n’a pas gagné le montant minimum de 5 000 dollars requis pour être admissible. Dans cette hypothèse, l’Agence pourrait alors lui demander de fournir des documents pour justifier sa demande. « Tout comme la PCU, les personnes qui auront reçu des paiements de prestations, mais qui ultérieurement auront été jugées inadmissibles, devront rembourser ces montants », prévient l’ARC.

« Depuis le début de la pandémie, l’Agence fournit un soutien financier essentiel partout au pays. Elle mettra en œuvre les nouvelles prestations de la relance grâce à un processus de demande rapide et facile ainsi qu’à des mesures de sécurité additionnelles. Les Canadiens peuvent toujours compter sur elle pour leur fournir le soutien dont ils ont besoin pour rester en sécurité et en santé en ces temps difficiles », commente dans un communiqué la ministre du Revenu national, Diane Lebouthillier.

« Bien que de nombreuses personnes aient pu retourner au bureau, il y en a toujours qui ne peuvent revenir sur le marché du travail en raison du COVID-19. Notre gouvernement continuera de faire ce qu’il faut pour que les Canadiens soient soutenus pendant la prochaine phase de la reprise. C’est pourquoi nous sommes en train de passer à des programmes plus agiles et plus flexibles qui les aideront et nous assureront d’être en mesure de réagir rapidement à toute nouvelle perturbation du marché du travail due à la pandémie en cours », ajoute Carla Qualtrough, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées.

La rédaction