Une récession imminente, vraiment?

Par Maxime Bilodeau | 7 novembre 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Deux poings frappant le signe du dollar qui vole en éclats.
Sergey Nivens / 123RF

Après plus de dix ans de croissance record aux États-Unis, les risques d’un ralentissement économique sont plus que jamais nombreux. Doit-on vraiment s’en inquiéter?

Les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, la croissance jamais vue de l’économie américaine et l’endettement galopant des ménages sont autant de signes qui font craindre l’arrivée imminente d’une récession. Les experts ne s’entendent pourtant pas tous sur la question, nuance Patrice Denis, vice-président et gestionnaire de comptes à Pimco Canada.

« Quand on compare les indicateurs actuels à ceux des autres fins de cycle d’expansion, on se console. À mon avis, les risques de récession à court terme sont assez faibles », a-t-il souligné à l’occasion du 7e colloque annuel Retraite, investissement institutionnel et finances personnelles du Cercle finance du Québec, qui s’est tenu mardi à Québec.

Selon l’expert, la santé économique mondiale actuelle est plutôt bonne. « La confiance des investisseurs est au rendez-vous, les taux de défauts de paiement sont faibles et les conjonctures financière et économique sont quand même assez favorables », énumère-t-il.

DES STABILISATEURS FINANCIERS

Jean-Pierre Cadorette, vice-président et gestionnaire de portefeuille à RBC, évoque pour sa part une pause assez récente dans la dégradation économique mondiale. « En septembre dernier, je vous aurais parlé du protectionnisme en hausse et d’une sortie de la zone euro potentiellement désordonnée du Royaume-Uni. Depuis, on note néanmoins certains progrès, particulièrement du côté des relations commerciales entre les États-Unis et la Chine », indique-t-il.

Les assouplissements des banques centrales ne sont pas étrangers à la situation. « Elles jouent très bien leur rôle de stabilisateur financier. Dès le début de l’année, en Chine, en Europe et en Nouvelle-Zélande, les banques centrales ont fait un changement à 180 degrés en abaissant activement leurs taux directeurs », dit-il, ajoutant qu’il s’attendait à voir la Banque du Canada faire de même sous peu.

Alex Bellefleur, économiste en chef et stratège à Placements Mackenzie, abonde dans le même sens et se dit même « positif » face aux prochains mois. Il cite entre autres le faible taux d’inflation de 1,5 % qui prévaut aux États-Unis depuis dix ans comme preuve qu’une récession n’est pas à nos portes, bien au contraire.

« Le faible taux d’inflation, soit de 50 points de base par année en deçà de la cible de 2 % de la Réserve fédérale américaine, est une caractéristique de début de cycle. […] Je pense que la Fed, en 2020, pourrait encore abaisser ses taux d’intérêt, non pas pour des raisons de croissance, mais bien d’inflation », analyse-t-il, ajoutant que l’assouplissement quantitatif pourrait aussi faire son retour l’an prochain.

PLACER SES BILLES

Les trois experts ont ensuite dévoilé leurs préférences de placement pour des portefeuilles institutionnels sur un horizon de 12 à 18 mois. Patrice Denis suggère de se tourner vers des obligations américaines. « Le taux de rendement de dix ans est de 1,7 % et on bénéficie de la protection des banques centrales, ce qui représente un actif sûr quand les marchés ont de la difficulté », précise-t-il.

Jean-Pierre Cadorette conseille pour sa part d’opter pour des actions des marchés émergents. « Le différentiel de croissance dans les marchés émergents va aller en s’améliorant selon le Fonds monétaire international. Il y a une forte corrélation entre ce différentiel et celui des pays développés », pense-t-il.

Le vote d’Alex Bellefleur va aussi aux actions des marchés émergents. « Historiquement, ces marchés bénéficient de politiques monétaires souples, comme celles que la Fed va vraisemblablement mettre en place. C’est encore plus vrai si le dollar américain baisse », conclut-il.

Maxime Bilodeau