FATCA : une poursuite victorieuse pourrait empirer les choses

Par La rédaction | 20 août 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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L’AMF poursuit deux représentants

Deux femmes remettent actuellement en doute la constitutionnalité d’un accord entre le Canada et les États-Unis forçant l’Agence du revenu du Canada (ARC) à transmettre à l’Internal Revenue Service (IRS) américain les informations fiscales des citoyens américains résidant au Canada.

Mais un expert en droit fiscal américain soutient, dans le Financial Post, que ces individus pourraient se retrouver dans une situation pire si la poursuite s’avère victorieuse.

« Si la poursuite est remportée, ces personnes pourraient être exclues de l’accord intergouvernemental, assez modéré, pour se retrouver sous l’égide du FATCA [Foreign account tax compliance act] », indique Roy Berg, directeur en droit fiscal américain chez Moodys Gartner Tax Law, à Calgary.

Qu’est-ce que le FATCA?

Le droit fiscal américain exige que tous ceux qui sont considérés comme américains se soumettent à l’impôt américain, peu importe où ils vivent dans le monde.

Le FATCA force les institutions financières hors États-Unis à transmettre l’information financière de leurs clients considérés américains aux autorités des États-Unis. La loi pénalise celles qui omettent de le faire.

Sous l’accord intergouvernemental entre le Canada et les États-Unis, conclu en février et entré en vigueur le 1er juillet dernier, l’ARC fournira à l’IRS les informations fiscales d’environ un million d’Américains et d’individus ayant la double citoyenneté résidant au Canada.

Les institutions financières canadiennes doivent envoyer l’information à l’ARC, qui la transmettra à l’IRS.

Les États-Unis ne suivront pas

« Les plaignantes semblent croire qu’une victoire voudrait dire un retour au monde avant le FATCA, indique M. Berg. À moins que le Congrès américain ou les tribunaux américains n’invalident la loi, ça n’arrivera pas. »

Si les tribunaux canadiens déclarent l’accord intergouvernemental inconstitutionnel, cela n’affectera pas le FATCA.

Sans accord, toute banque canadienne voulant s’impliquer dans les marchés de capitaux américains devra tout de même livrer les informations financières de ses clients américains, mais directement à l’IRS au lieu de l’ARC.

Les plaignantes et les autres seraient donc soumis à la pleine force du FATCA, soutient cet expert.

« L’accord intergouvernemental soulage les banques canadiennes et leurs clients des graves morsures du FATCA, comme l’exigence que les banques ferment les comptes des clients américains récalcitrants », explique-t-il.

Si l’accord ne tient plus, les banques canadiennes pourraient avoir de la difficulté à se rapporter directement à l’IRS, notamment en raison des lois canadiennes sur la protection de la vie privée.

« Si les banques canadiennes ne se soumettent pas, tout paiement en provenance des États-Unis leur étant destiné devient sujet à une taxe de 30 %, dit M. Berg. La banque sera aussi exclue des marchés de capitaux américains et ceux qui concluent des contrats en dollars américains, comme le marché du pétrole. »

Le gouvernement fédéral n’aura probablement pas d’autre choix que d’amender la protection de la vie privée ou d’autres lois si nécessaire, ou de trouver un autre outil permettant que l’information sur les citoyens américains soit transférée, pour permettre aux banques canadiennes de fonctionner sur les marchés américains.

Ressentiment

Un mouvement au sein du Parti républicain milite pour révoquer le FATCA.

Un ressentiment considérable se fait également sentir dans le reste du monde envers ce que plusieurs considèrent comme l’exploitation d’individus ayant peu à faire avec les États-Unis, à l’exception d’une citoyenneté que plusieurs d’entre eux n’ont pas demandée et ne veulent pas vraiment.

Des poursuites contre le FATCA sont également en cours du côté américain.

Toutefois, si la poursuite canadienne réussit, mais pas les attaques directes contre le FATCA, les citoyens américains vivant au Canada pourraient perdre leur chance d’avoir… le meilleur du pire.

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La rédaction