Fiscalité : que proposent les partis?

Par Julie Perreault | 19 septembre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : 123rf

À quoi doivent s’attendre les Québécois en matière de fiscalité au lendemain des élections générales du 1er octobre? Des baisses d’impôt pour les particuliers? Une révision des crédits d’impôt pour les entreprises? À l’invitation de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke, les quatre principaux partis en lice ont croisé le fer mercredi dans le cadre d’un débat tenu à Longueuil. Voici ce qu’ils ont proposé.

PARTI LIBÉRAL DU QUÉBEC

Questionné à savoir si son parti avait l’intention de diminuer le fardeau fiscal dans la province, Carlos Leitao a expliqué qu’il étudiera la possibilité de réduire les impôts des particuliers seulement si son gouvernement parvenait à dégager un surplus budgétaire. « Nous n’allons pas mettre en péril le financement des services publics pour accorder des baisses d’impôt, mais nous pourrions réduire le fardeau fiscal des Québécois si nous disposons de la marge de manœuvre budgétaire nécessaire. Nous l’avons d’ailleurs fait lors de notre premier mandat », a-t-il dit.

Du côté des entreprises, le Parti libéral s’engage à diminuer « le plus possible » la taxe sur la masse salariale, « qui est très dommageable pour les entreprises » et qui ralentit les investissements dans la province, selon M. Leitao. « Le Québec est en Amérique du Nord, nous devons ajuster notre fiscalité selon des paramètres nord-américains. Le fardeau fiscal des entreprises québécoises est déjà très élevé », a-t-il affirmé, en réponse à l’un de ses opposants favorables à une révision à la hausse du taux d’imposition des grandes entreprises.

Pour augmenter les revenus de l’État et financer ses promesses électorales, le PLQ mise en grande partie sur une croissance économique plus forte que prévue.

PARTI QUÉBÉCOIS

« Nous n’avons pas l’intention d’augmenter ou de diminuer les impôts », a de son côté soutenu Alain Therrien, du Parti québécois. La formation politique entend plutôt augmenter les revenus de la province en favorisant une « plus grande équité fiscale ». Comment? En taxant tous les biens et services achetés en ligne. « Nos détaillants sont actuellement victimes de concurrence déloyale de la part de grandes entreprises étrangères », se désole-t-il.

Rappelons qu’en juin, l’Assemblée nationale a adopté une loi pour contraindre certaines entreprises, dont Netflix et Spotify, à s’inscrire auprès de Revenu Québec et à percevoir la TVQ auprès de leurs clients québécois. Le PQ estime que cette mesure devrait s’appliquer également aux biens tangibles. En s’assurant de capter toutes les taxes sur les biens tangibles achetés en ligne, le parti estime pouvoir récupérer 158 M$ par année.

Alain Therrien explique aussi que son parti mettrait en œuvre des mesures pour empêcher le détournement de revenus générés par certaines entreprises en sol québécois, comme Google. De telles stratégies permettent à ces entreprises de réduire leur facture fiscale. « Il faut que les entreprises soient imposées selon les bénéfices réalisées dans chaque pays », affirme-t-il.

COALITION AVENIR QUÉBEC

Pour la CAQ, la fiscalité des entreprises est un outil pour augmenter la productivité du Québec. « Avec la réforme adoptée récemment aux États-Unis, le Québec a perdu son avantage fiscal, déplore Éric Girard, de la Coalition avenir Québec. Avant même le débat sur la renégociation de l’ALENA, les investissements dans la province étaient en danger. Il y a urgence d’agir pour alléger le fardeau fiscal de nos entreprises. »

S’inspirant de la réforme américaine, la CAQ propose d’introduire une déduction pour amortissement accéléré, qui permet aux entreprises de déduire 100 % de leur investissement en capital la première année. « Il s’agit d’une mesure bien plus efficace que les crédits d’impôt pour encourager les entreprises à investir », assure Éric Girard.

En ce qui concerne les particuliers, la CAQ soutient que lors de sa quatrième année de mandat, les familles québécoises disposeront de 1,7 G$ supplémentaire au total grâce à une baisse de la taxe scolaire et à une bonification des allocations familiales.

Pour augmenter les revenus gouvernementaux, le parti mise notamment sur un programme d’attrition dans l’administration publique, une meilleure gestion informatique de l’État, le versement de dividendes plus élevés par les sociétés d’État et une croissance économique plus vigoureuse que prévue.

QUÉBEC SOLIDAIRE

La stratégie fiscale de Québec solidaire diffère sensiblement de celles de ses trois principaux opposants. Pour financer ses nombreuses promesses électorales, telles qu’un régime public d’assurance dentaire et la gratuité scolaire, la formation politique entend amorcer une vaste réforme fiscale des entreprises et des particuliers.

Québec solidaire compte d’abord augmenter à dix le nombre de paliers d’imposition pour les particuliers. Tous les contribuables ayant un revenu de moins de 80 000 $ paieraient moins d’impôt qu’aujourd’hui, assure le parti.

« Nous ferons aussi un grand ménage des crédits d’impôt et réviserons les paramètres de déductions fiscales pour mettre fin à des traitements fiscaux avantageux injustifiés », indique Simon Tremblay-Pépin. Parmi les crédits d’impôt qui seraient abolis figurent la déduction pour frais financiers, qui permet aux investisseurs de déduire de leur revenu les frais payés pour la gestion de leurs placements. Québec solidaire établirait également à 100 % le taux d’inclusion pour les gains en capital. Un gouvernement solidaire hausserait aussi le taux d’imposition des grandes entreprises, mais ne toucherait pas à celui des PME.

Des 12 G$ de revenus supplémentaires que le parti souhaite rapatrier dans les coffres de l’État, la moitié proviendrait de la réforme de la fiscalité, alors que l’autre moitié proviendrait d’économies réalisées notamment sur la rémunération des médecins spécialistes et l’achat de médicaments.

Julie Perreault