Garder vos clients pour la vie : mission impossible?

10 mai 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Cet article est la première de deux parties sur le sujet.

Il y a quelques mois, un couple fortuné de Toronto a consulté deux firmes respectées de gestion d’avoir. Ils voulaient savoir quelle était la meilleure stratégie pour son leur portefeuille, non enregistré, d’une valeur de 2 millions de dollars. Les deux entreprises ont offert aux conjoints des boniments convaincants.

Fait à noter : le couple avait également accumulé des dettes de 1,5 million de dollars.

Entre alors en scène Rona Birenbaum, une conseillère à honoraires qui travaille pour Caring for Clients, un cabinet de Toronto. Mme Birenbaum fait alors au couple une proposition qui surprend tout le monde…

En premier lieu, elle fait prendre conscience au couple que l’intérêt de 5 % associé à sa dette de 1,5 million n’est pas déductible, à cause de la façon dont la dette a été contractée. Mme Birenbaum suggère donc au couple de rembourser d’abord sa dette, en utilisant les revenus des investissements qu’il possède déjà. Comme les deux époux se trouvent dans la tranche d’imposition la plus élevée, ils doivent, pour être en mesure de rembourser les intérêts de la dette, obtenir des revenus de placements deux fois plus élevés que les intérêts, ce qui équivaut à un rendement de 10 % sur leur portefeuille. En remboursant leur emprunt, le couple est assuré de recevoir un remboursement d’impôt de 5 %.

Ce conseil de Rona Birenbaum signifiait qu’il ne restait qu’au couple 500 000 $ à investir. Vous pouvez imaginer alors le conflit potentiel! Ce genre de conseil est un sujet de friction dans une industrie où la structure de rémunération peut rendre difficile d’assurer un service de qualité à ses clients tout en maximisant son revenu personnel.

« Offrir un service haut de gamme et des conseils de qualité peut vouloir dire créer une plus petite entreprise, qui est moins rentable qu’une plus grosse qui s’efforce constamment de maximiser les revenus, dit Mme Birenbaum. Mais le couple a considéré avoir été bien conseillé et les époux sont devenus des clients pour la vie. »

N’est-ce pas le but premier de tout conseiller que tous ses clients deviennent clients pour la vie? La compétition est rude et les types de services (du libre-service au service complet) sont nombreux. Et c’est là qu’il faut prouver sa valeur, c’est-à-dire développer une relation de confiance avec ses clients. C’est la colle qui les liera à vous pour la vie.

Le coupe qui a embauché Mme Birenbaum lui a donc demandé de lui faire un plan financier, qui comprenant aussi une analyse de ses flux monétaires, de revoir les niveaux de risques, de revoir la planification immobilière, de revoir les plans de retraite et successoraux, en plus d’investir les fameux 500 000 $.

Une technique différente La technique de Mme Birenbaum consiste à faire un peu de médiation, en plus de faire du coaching personnel et professionnel. « Si mes clients préfèrent que je me retire, je le fais. Mais la plupart du temps, ils apprécient l’objectivité et l’honnêteté », affirme-t-elle.

Lorsqu’une de ses clientes a perdu son emploi, Rona Birenbaum lui a préparé un petit discours de motivation afin de lui rappeler l’étendue de ses qualités professionnelles, et pour lui remonter le moral. Ensuite, elle l’a rencontrée afin de discuter de la façon de bien mettre à profit son réseau de contacts et d’utiliser des sites Web comme LinkedIn.

« Les clients deviennent loyaux quand ils se rendent compte que leur succès est ma priorité, dit-elle. Quand une de nos clientes vient d’accoucher, ou qu’un autre ne peut se déplacer pour une raison quelconque, il me fait plaisir de me rendre à leur domicile. Et quand nos clients ont besoin d’un expert et que je connais quelqu’un de compétent, je vais m’empresser de les mettre en contact. »

Par exemple, quand ses clients souhaitent consulter un avocat afin que ce dernier évalue la planification successorale qu’elle a fait pour eux, Mme Birenbaum les envoie voir un expert en droit successoral qui fait partie de son réseau de contacts professionnels. Elle transmet même ses instructions à l’avocat afin que la première rencontre avec ses clients soit plus productive.

« L’avocat va nous dire s’il y a d’autres recommandations auxquelles nous n’avions pas pensé initialement, explique-t-elle. Nous leur demandons aussi de voir les ébauches des documents avant que les clients ne les signent. Nous nous assurons ainsi que toutes les recommandations de notre plan financier ont bien été prises en compte. De cette manière, le client est vraiment confiant, puisque plusieurs experts ont révisé la documentation avant qu’il appose sa signature. »

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L’importance du réseau de contacts Votre cercle professionnel peut permettre de vous assurer de la fidélité de vos clients. Référer ses clients à d’autres conseillers professionnels a permis à Sandra Glaze d’améliorer ses relations avec ses clients. Mme Glaze, qui travaille chez Armstrong & Quaile, une compagnie de Waterloo (Ontario), sait qu’elle offre un service haut de gamme à ses clients quand elle demande l’avis d’un autre expert.

Elle travaille d’ailleurs en partenariat avec une banque de la municipalité, en ce qui concerne les prêts d’investissement et les hypothèques.

« Ils ne s’approprient pas mes clients », dit-elle, en ajoutant qu’elle ne reçoit aucune compensation financière de la banque pour les clients qu’elle lui réfère. Elle demande seulement l’avis de l’institution sur la meilleure stratégie pour ses clients. « Ainsi, mes clients peuvent comparer les taux de ma banque et ceux de d’autres banques et ils peuvent mieux négocier par la suite, ajoute-t-elle. Je mets des outils à leur disposition afin qu’ils puissent prendre la décision qui leur convient le mieux. »

Mme Glaze travaille aussi de pair avec les comptables de ses clients, surtout pendant la période de l’impôt. « Je leur demande toujours la permission avant de travailler avec d’autres conseillers. En travaillant avec eux, on améliore le service qu’on leur offre. »

Mme Glaze parle de son travail à un rythme si rapide que sa passion et son énergie sont palpables. Elle parle de ses clients comme s’ils étaient des membres de sa famille. Plusieurs d’entre eux sont ses clients depuis le début de sa carrière, en 1996. Elle maîtrise la dimension financière de sa pratique, mais ses clients lui disent aussi qu’elle est sensible au côté humain.

Deux de ses clients, par exemple, sont des sœurs âgées de 75 et 85 ans, qui aiment acheter des poupées dans les ventes de garage, leur confectionner des vêtements et les envoyer aux enfants des pays en voie de développemente. Elles se sont récemment acheté un ordinateur afin d’avoir un accès en ligne à leurs comptes bancaires. Le premier appel qu’elles ont fait à la suite de cet achat a été destiné à Mme Glaze, qui s’est déplacée chez elles pour les aider à apprivoiser le programme. « Ces deux dames m’appellent pour de petites choses : “Devrais-je acheter un fauteuil inclinable?”, “Devrais-je faire installer une clôture?” », dit-elle.

Sandra Glaze croit que ses clients lui ont été envoyés pour une raison particulière, alors elle ne base pas ses choix de clients sur la taille du portefeuille. « Je sais que les deux sœurs n’ont pas beaucoup d’argent en trop. Alors j’ai engagé pour elles quelqu’un pour s’occuper de leurs impôts. »à

Alors que ce genre d’attitude va trop loin pour certains conseillers, Sandra Glaze affirme qu’elle considère surtout ses clients comme des êtres humains. « Est-ce que je dépasse les bornes? Je m’en fous, parce que c’est moi qui doit vivre avec les conséquences des conseils que je donne. La gestion des risques joue un rôle principal quand je suggère quelque chose à mes clients, dit-elle. Un client ne va jamais dire à son conseiller : “ Arrête, tu me fais faire trop d’argent ”. Je fais une différence dans la vie de mes clients, tout comme le fait une infirmière ou un médecin. »

Ce texte est une adaptation d’un article paru sur le site Advisor.ca. Traduction par Anaïs Chabot