Les obligations en période de pandémie

Par La rédaction | 10 avril 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : Dmitrii Shironosov / 123RF

La crise de la COVID-19 a provoqué des fluctuations inédites sur les marchés, auxquelles n’ont pas échappé les titres à revenu fixe. Les investisseurs devront déterminer quelles stratégies ils souhaitent adopter pour profiter des bonnes occasions et diminuer leurs risques.

Phil Mesman, responsable des titres à revenu fixe chez Picton Mahoney Asset Management, a une vision intéressante de la crise et de ses répercussions sur ce type d’actifs. Picton Mahoney est un gestionnaire de portefeuille qui compte plus de 7,4 milliards d’actifs sous gestion.

LES TROIS « C »

M. Mesman décortique la crise actuelle en trois phases, les trois « C », qui permettent de mieux comprendre et expliquer les ralentissements des marchés et leurs dernières tendances. 

  • COVID-19. Cette période s’étend du 19 février au 6 mars. En guise de rappel, l’Organisation mondiale de la santé a décrété que le coronavirus était une pandémie le 11 mars. Le 19 février, on recensait environ 75 000 cas dans le monde, presque tous en Chine, selon STAT. Le 6 mars, le nombre de cas mondiaux approchait 100 000 et certains pays à l’extérieur de la Chine, notamment l’Italie et l’Iran, voyaient les cas commencer à se multiplier. C’est donc le moment où le virus émerge comme problème international. Assez rapidement, les actions baissent, mais les obligations d’État se maintiennent et le crédit surperforme.
  • Crédit. Du 9 au 17 mars. Les cas mondiaux passent de 112 000 à près de 200 000, se multiplient en Europe et apparaissent aussi en plus grande quantité aux États-Unis. En même temps, la guerre du pétrole s’intensifie entre la Russie et l’Arabie Saoudite, faisant chuter les prix du baril. On assiste à une deuxième phase de vente sur les marchés financiers.
  • Capitulation. Du 18 au 20 mars. On assiste à une vente massive de différentes obligations, alors que le secteur public s’empresse de couvrir les besoins en liquidités.

Pour Phil Mesman, il est clair que le marché des obligations post-COVID sera bien différent de celui d’avant la crise, marqué par une phase d’expansion, des rendements obligataires bas et des prix élevés. « La vigueur des marchés financiers depuis plus de 10 ans avait rendu les investisseurs un peu complaisants, mais la crise actuelle va changer cela », croit-il. 

UN TRIBUT ÉCONOMIQUE À PAYER

Il est d’avis que la répercussion de la COVID-19 sur l’économie réelle sera brutale et prolongée. Dans un tel contexte, le marché obligataire fournit des garanties que ne proposent pas les actions. En effet, le rendement est garanti… sauf en cas de faillite de l’entreprise à laquelle on a prêté. En ce sens, le plus récent programme de stimulus annoncé par la Réserve fédérale américaine (Fed) viendra en rassurer plus d’un. 

La Fed a annoncé 2 300 milliards de dollars américains de nouveaux prêts pour soutenir l’économie, destinés tout particulièrement aux entreprises et aux collectivités locales. Elle fournira notamment de l’argent frais à des sociétés dont l’activité économique a été stoppée net par la pandémie.

M. Mesman qualifie carrément ce plan, qui dépasse ses attentes, de game changer. « Cela va grandement augmenter la confiance des investisseurs envers les obligations de sociétés, avance-t-il. Ils seront rassurés quant au bilan financier des entreprises, mais aussi quant à leur capacité de rapidement procéder à des embauches et reprendre leurs activités lors de la reprise. »

FAIRE LES BONS CHOIX

Les investisseurs devront tout de même faire preuve de discernement et opter pour des obligations de sociétés dans des secteurs dont l’activité est moins susceptible de souffrir de la pandémie. M. Mesman suggère de se tourner vers des titres robustes et émetteurs de longue date, tels que les télécommunications, les médias ou la technologie et d’éviter les entreprises qui sont très dépendantes de la présence physique des consommateurs, comme les compagnies aériennes et de croisière, les chaînes de restaurant, etc. 

« Il ne faut pas se leurrer, la récession sera dure et il faudra réévaluer les stratégies au fur et à mesure, mais il y a des occasions d’achat intéressantes sur le marché obligataire », conclut-il.

La rédaction