Assurance : l’AMF accusée de faillir à la tâche

Par La rédaction | 20 octobre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Richard Proteau, ex-cadre de Manuvie et défenseur des consommateurs, reproche à l’Autorité des marchés financiers (AMF) de ne pas avoir été capable de faire respecter la Loi sur la distribution des produits et services financiers (LDPSF), en matière d’assurance de personnes.

Dans un courriel adressé au porte-parole de l’Autorité, Sylvain Théberge, M. Proteau reproche en effet à l’organisme d’autoréglementation de ne pas avoir fait cesser la vente d’assurances par des firmes et des agents non autorisés à exercer ces activités au Québec.

Richard Proteau souligne que les consommateurs utilisent de plus en plus Internet pour recueillir des informations et effectuer des comparaisons afin d’acheter une assurance. Il affirme également que contrairement à ce qu’on lit trop souvent, l’assurance offerte directement aux consommateurs sans l’intervention d’un intermédiaire agréé est un marché qui existe depuis plus de 40 ans et qui ne cesse d’augmenter en taille.

Pourquoi? Tout simplement parce que les assureurs eux-mêmes tentent de se passer des intermédiaires agréés, soit en vendant directement leurs produits aux consommateurs sur leur site internet, soit en passant par des intermédiaires non autorisés.

Sur ce point, le professionnel cite des entreprises telles que Canadian Tire, qui distribue les produits d’assurances de Canada-Vie, ou encore des associations universitaires et autres organisations représentant des professionnels tels que les médecins et les avocats. Selon lui, les entreprises elles-mêmes sont touchées avec leurs programmes d’assurance collective.

FAR WEST

Le projet de loi 141 a beau donner la possibilité aux assureurs de vendre leurs produits directement sur internet et donc de se passer d’un représentant agréé, M. Proteau rappelle que jusque-là, la plupart des législations canadiennes ne prévoyaient tout simplement pas cette possibilité. Elles n’ont pas voulu l’interdire pour protéger le consommateur mais parce que la vente en ligne n’était pas aussi généralisée à l’époque de la promulgation de ces lois.

Si Richard Proteau reproche donc à l’AMF de ne pas être parvenue à réguler ce marché et à faire respecter la loi, il affirme cependant que la présence d’acteurs autres que les firmes et représentants agréés permet d’obtenir une information de bien meilleure qualité que s’ils n’existaient pas.

« Nous nous attendions à trouver les informations de médiocre qualité, les fausses informations et des allégations exagérées sur les sites web exploités par des personnes non titulaires d’un permis, écrit-il dans son rapport. Au lieu de cela, nous avons constaté que les pires contrevenants sont des entreprises et des conseillers autorisés. Si l’internet est un Far West réglementaire, ajoute-t-il, les cow-boys en sont les conseillers et les entreprises autorisés ».

PAS DE GARDE-FOUS SUFFISANTS

M. Proteau précise que le client qui magasine sur internet est bien trop souvent dans le flou et qu’il lui est très difficile de savoir avec qui il traite, s’il devra passer par un intermédiaire et surtout de quel produit il s’agit. Pour appuyer ses accusations, l’étude s’attache ensuite à mettre le doigt sur les manquements de 20 compagnies d’assurances exerçant au Québec.

M. Proteau ne croit pas que l’AMF soit capable de redresser le tir. S’il avoue ne pas être « un grand fan » de la Chambre de sécurité financière (CSF) non plus, il lui reconnaît son efficacité quant à l’application de son code de déontologie. Il n’en va pas de même avec l’Autorité. Il rappelle en effet que lors d’une de ses précédentes études, portant sur les conflits d’intérêts, il en était venu à la conclusion que l’Autorité n’avait pas dressé de garde-fous suffisants pour régler la situation une fois pour toutes.

Ainsi, Richard Proteau ne voit pas d’arguments objectifs permettant de croire que l’AMF puisse assumer de nouvelles responsabilités en remplacement de la Chambre, comme cela est prévu par le projet de loi 141.

Il demande plutôt la création d’un organisme de réglementation des assurances canadiennes chargé de superviser les activités des entreprises et des représentants en activité au Canada. Il souhaite également que chacune des entreprises agréées soient obligées de divulguer très clairement quels sont leurs champs d’action, tant en matière de distribution de produits que de secteur géographique. Il demande par ailleurs à ce que les sites web non agréés n’ayant d’autres fonctions que de rabattre des clients vers les représentants agréés soient purement et simplement interdits et fermés.

Contactée par Conseiller, l’AMF a indiqué ne pas avoir de commentaires particuliers à faire, précisant que M. Proteau avait droit à son « opinion ».

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