Budget fédéral : des réactions partagées

30 mars 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Jim Flaherty a déposé jeudi son septième budget depuis qu’il occupe le poste de ministre canadien des Finances, mais son tout premier sous un gouvernement majoritaire. L’exercice n’a laissé personne indifférent. Voici quelques réactions, les unes positives, les autres négatives.

« Le gouvernement fédéral se prive de 30 G$ de revenus annuels et préfère des coupures improductives », déplore l’IRIS. Dans son budget, le ministre Flaherty reconnaît qu’il n’a aucune intention de retourner au niveau de revenus fiscaux qui précédaient la récession. Dommage, dit l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS), car, jusqu’à 2017, il se prive ainsi de revenus qui pourraient rapporter 30 milliards de dollars au trésor public. « Pour atteindre l’équilibre budgétaire il choisit plutôt de faire des économies improductives et de compter sur la consommation des ménages pourtant déjà lourdement endettés », déplore l’IRIS.

« Un budget ambitieux, mais décevant sur le plan de la simplification fiscale », estime CGA-Canada. « Les particuliers et les entreprises du Canada ont maintes fois demandé au gouvernement de simplifier les exigences relatives à la production des déclarations fiscales », rappelle l’Association des comptables généraux accrédités du Canada (CGA-Canada). Malheureusement, cette simplification essentielle ne figure pas au budget du ministre Flaherty. « Les modifications du système fiscal annoncées dans le budget sont fragmentaires et n’entraîneront pas le changement fondamental nécessaire pour doter le Canada du système fiscal efficient dont il a besoin », souligne CGA-Canada, qui trouve que le gouvernement « a raté l’occasion de mettre en place une formule gagnante ».

Sinon, CGA-Canada est heureuse de voir que le gouvernement fédéral a présenté un plan budgétaire qui permet de réduire le déficit tout en encourageant l’innovation grâce à des mécanismes tels que les partenariats industrie-université pour la recherche, et la mise en place d’un fonds de 400 millions de dollars pour appuyer la hausse des investissements de capital de risque de démarrage par le secteur privé. « Ces mesures sont un gage de croissance future », croit l’association.

« Un budget bien accueilli, malgré l’absence du RAE », dit le RJCCQ. Le Regroupement des jeunes chambres de commerce (RJCCQ) « salue la volonté du gouvernement fédéral de maintenir l’équilibre budgétaire à moyen terme ». Il accorde de bons points à Ottawa qui a choisi de poursuivre ses efforts de réduction de la dette, de mettre l’entrepreneuriat et l’innovation au premier plan.

Toutefois, le RJCCQ se dit déçu que le gouvernement fédéral n’ait pas retenu son idée d’instaurer le Régime d’accès à l’entrepreneuriat (RAE), un programme similaire au Régime d’accession à la propriété pour faciliter l’acquisition d’une première entreprise. Tel que proposé par le RJCCQ, le RAE permettrait à un entrepreneur d’utiliser son REER pour financer l’acquisition d’une première entreprise, et ce, à l’abri de l’impôt. Les montants ainsi utilisés à partir du REER devraient être remboursés sur une période de temps déterminé. « Cette mesure permettrait d’augmenter l’effet de levier potentiel des entrepreneurs à partir de leur fonds propres, et ainsi favoriser le transfert des entreprises canadiennes et québécoises », explique l’organisme.

Malgré cette absence, le RJCCQ tient à souligner l’ajout par le gouvernement fédéral de 400 millions de dollars pour des activités de capital de risque, ainsi que les 100 millions additionnels qui seront octroyés à la Banque de développement du Canada, dont une partie de l’aide bénéficie déjà à plusieurs jeunes entrepreneurs.

« Le gouvernement agit en dictateur abandonnant les aînés à leur sort », tonne le Réseau FADOQ.

Plus important organisme d’aînés au Canada, le Réseau FADOQ tire à boulets rouge sur le budget Flaherty. « Non seulement, il y a une absence totale de mesures pour favoriser la qualité de vie des aînés, mais le gouvernement restructure des programmes de manière à lourdement hypothéquer l’avenir des futurs aînés », s’insurge-t-il.

Le fait de repousser l’âge de la retraite constitue à ses yeux un geste démesuré et inéquitable. « Le gouvernement a aujourd’hui posé un geste drastique, qui pourtant n’était nullement nécessaire. En effet, selon Kevin Page, directeur du budget, malgré l’arrivée des baby-boomers à la retraite, le fédéral aura l’argent nécessaire pour verser toutes les prestations attendues, même au moment où la demande sera la plus forte », analyse le Réseau FADOQ.

Il ajoute : « M. Flaherty se targue que cette mesure permettra aux générations futures de profiter de la Sécurité de la vieillesse, or il n’en est rien, puisque celles-ci se verront amputées de plus de 6500 $ par année pendant deux ans, soit près de 13 000 $. »

Un autre dossier phare du Réseau FADOQ est la protection des régimes complémentaires de retraite en cas de faillite de l’employeur. « Encore une fois, le gouvernement a fait la sourde oreille en ne proposant aucune mesure faisant des retraités des créanciers prioritaires au même titre que les salaires des travailleurs », déplore l’organisme.

Commentant la mesure relative à la « proactivité de l’inscription » à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti, le Réseau FADOQ se demande de quoi il retourne. « Est-ce qu’il s’agit de l’inscription automatique revendiquée par le Réseau FADOQ depuis trois ans? Aucune information n’a été mentionnée à cet effet. »

« La FCEI accorde une note de B au budget ». La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) est heureuse de constater que le budget comporte 8 des 12 priorités identifiées par les PME. Cependant, l’organisme patronal estime que le gouvernement fédéral a franchi « de bien petits pas pour s’attaquer aux dépenses, au déficit ainsi qu’à la rémunération globale et aux pensions du secteur public ».

En matière d’assurance-emploi, les PME seront heureuses de constater que le crédit d’assurance-emploi pour l’embauche a été renouvelé pour 2012. « La prolongation de ce crédit permet d’atténuer l’effet de cette hausse sur les PME et les aide à soutenir la relance du Canada en créant des emplois », indique la FCEI.

En ce qui concerne la viabilité des régimes de retraite des députés et de la fonction publique fédérale, la FCEI se réjouit que le gouvernement se soit engagé à accroître la contribution des fonctionnaires à leur régime de retraite et que des mesures aient été prises pour décourager la retraite anticipée.

Pour ce qui est de la sécurité de vieillesse, la FCEI rappelle qu’elle soutient les mesures de bonification de la sécurité de vieillesse pour les travailleurs expérimentés qui demeurent en emploi plus longtemps. Par conséquent, elle s’inquiète du fait que l’âge d’admission à ce programme sera haussé à 67 ans. « Tant que les députés et les fonctionnaires ne prennent pas leur retraite à 65 ans, on ne doit pas augmenter l’âge auquel le reste de la population canadienne peut bénéficier des prestations du Programme de sécurité de la vieillesse », conclut la FCEI.

« Un budget de continuité axé sur la croissance économique et l’emploi », reconnaît le CPQ. Le budget 2012 du gouvernement fédéral contient un «ensemble de mesures propices» au développement économique et à l’emploi au Canada, déclare le Conseil du patronat du Québec (CPQ). Il apprécie le fait que les objectifs du plan de retour à l’équilibre budgétaire devraient être atteints, que les déficits prévus pour cette année et les trois prochaines années seront plus faibles que prévu et que les compressions budgétaires, étalées sur trois ans, « ne sont pas catastrophiques ».

Le CPQ accueille favorablement les changements annoncés au programme de l’assurance-emploi qui visent notamment à encourager davantage les chômeurs à travailler et à favoriser leur jumelage avec les emplois disponibles. Toutefois, le CPQ aurait souhaité que le gouvernement révise la portion des coûts de l’assurance-emploi défrayée respectivement par les employeurs et les travailleurs, et qu’il reconsidère la possibilité de recommencer lui-même à contribuer au régime.

Pour ce qui est de l’âge de la retraite, le CPQ juge que le prolongement de la vie active des travailleurs « est inéluctable alors que la situation démographique au Canada et ailleurs au monde a radicalement changé depuis l’instauration de la plupart des régimes publics de pensions de vieillesse ». Le changement de l’âge d’admissibilité à la sécurité de la vieillesse s’inscrit résolument dans cette tendance, ajoute-t-il. « Le fait qu’il soit graduel et annoncé à l’avance donne du temps aux travailleurs de se préparer, mais il aurait sans doute été souhaitable qu’un débat national précède l’annonce d’une mesure aussi importante », nuance-t-il. D’autant plus que cette mesure ne touchera principalement que les personnes âgées aujourd’hui de 53 ans et moins « alors que les baby-boomers y échapperont ».