C-29 : Ottawa refuse de dire si la LPC s’appliquera aux banques

Par La rédaction | 6 Décembre 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Thomas Klebestreifen

Le gouvernement fédéral refuse toujours d’indiquer si le projet de loi C-29 mettra les banques à l’abri des dispositions de la Loi sur la protection du consommateur (LPC), rapporte La Presse.

Toutefois, l’instauration d’un régime fédéral de protection des consommateurs, tel que prévu par Ottawa, réduirait les chances que les institutions financières de la Belle Province continuent d’être régies par la LPC, affirment les experts en droit consultés par le quotidien montréalais.

La semaine dernière, l’Assemblée nationale du Québec a adopté à l’unanimité une motion demandant au gouvernement fédéral de retirer les dispositions du projet de loi C-29 qui remettent en question la primauté de la LPC.

« RESPECTER LA COMPÉTENCE QUÉBÉCOISE »

« Celle-ci doit continuer de s’appliquer. Les objectifs du gouvernement fédéral peuvent être atteints tout en respectant la compétence québécoise », a indiqué à La Presse le cabinet de la ministre québécoise de la Justice, Stéphanie Vallée.

De son côté, le professeur de droit constitutionnel Patrick Taillon juge que les probabilités que la Loi sur la protection du consommateur continue de s’appliquer aux banques seront réduites si le projet de loi C-29 est adopté.

« La LPC s’applique tant qu’elle ne fait pas entrave à la législation fédérale. Mais à mesure que le fédéral précise sa législation, ça réduit l’espace pour son application », explique le spécialiste.

LA LPC PROTÈGE-T-ELLE MIEUX LE CONSOMMATEUR?

En dehors de la question constitutionnelle, La Presse a également demandé à des experts lequel des régimes de protection, de la LPC ou du projet de loi C-29, était le plus avantageux pour les consommateurs. Et là, les réponses divergent.

« [Le régime fédéral est] très favorable aux consommateurs, avec l’accès aux services de base, les pratiques commerciales, l’interdiction sur les pressions indues, l’ajout de périodes d’annulation », affirme le secrétaire parlementaire aux Finances et député libéral de Saint-Maurice—Champlain, François-Philippe Champagne.

Un avis que ne partagent pas les deux professeurs en droit de la consommation consultés par le journal. Pour eux, c’est la LPC qui offre la meilleure protection aux consommateurs.

Trouvant l’initiative fédérale « scandaleuse et odieuse », le professeur de l’Université de Montréal Pierre-Claude Lafond affirme que « la LPC va plus loin dans le domaine contractuel de façon générale ».

« Je sens un certain lobbying des banques, des pressions pour ne pas respecter les lois provinciales. Les dispositions fédérales vont compliquer la vie de tout le monde. Les consommateurs ont-ils vraiment besoin de ça? », demande-t-il.

« Personne ne va assez loin, mais la LPC protège mieux les consommateurs sur plusieurs aspects », soutient pour sa part Marc Lacoursière, professeur à l’Université Laval. Autre avantage de la loi québécoise, selon lui : elle offre aux consommateurs des moyens de défense en matière de droit de rétrofacturation et de cession de contrat. Enfin, il juge que ses règles au sujet du consentement pour une carte de crédit sont également plus sévères que celles prévues par le projet de loi C-29.

Seule l’Association des banquiers canadiens appuie sans réserve le projet, estimant qu’il s’agit d’« un régime fédéral clair », qui établit « des principes de protection des consommateurs qui ne sont pas trop contraignants » et « suffisamment souples pour faciliter l’adaptation aux changements ».

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