Cinquième partie – Pseudonymes et paradis fiscaux : la Chambre est muette

Par Didier Bert | 7 mai 2013 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le conseiller doit-il refuser tout client utilisant un pseudonyme, ou souhaitant investir dans un paradis fiscal? Interrogée sur ces questions, la Chambre de la sécurité financière refuse de se prononcer en entrevue.

Conseiller.ca a sollicité la CSF pour savoir ce qu’elle espérait de son appel contre son comité de discipline dans le dossier Marcoux. Le comité a relaxé Michel Marcoux sur sept chefs d’accusation relatifs à un manquement aux règles de déontologie. La CSF accuse M. Marcoux d’avoir su qu’il participait à ce qui pouvait être un stratagème d’évitement fiscal, en utilisant des pseudonymes pour ouvrir des comptes pour des clients actifs aux Bahamas.

Bruno Leblanc, coordonnateur-analyste aux relations publiques de la Chambre de la sécurité financière, nous a répondu par courriel : « Comme c’est son habitude, la CSF ne commente aucune affaire qui concerne un dossier disciplinaire en cours devant son Comité de discipline ou un autre tribunal. »

Conseiller.ca a alors demandé à la CSF de se prononcer, plus largement, sur le comportement que devrait adopter un conseiller dans les situations suivantes :

  • Quelle réponse donner à un client qui veut utiliser un pseudonyme?
  • Quelle réponse donner à un client qui veut placer son argent dans un paradis fiscal?

Voici la réponse que nous a envoyée M. Leblanc par courriel :

« Les règles de déontologie et de conduite des affaires que nos membres doivent observer se trouvent dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers, la Loi sur les valeurs mobilières et leurs règlements. Les questions que vous évoquez peuvent également toucher d’autres législations, telles que la Loi de l’impôt sur le revenu. Je vous réfère donc aux lois et règlements applicables.

Vous comprendrez que, dans la conduite des affaires courantes au sein de l’industrie, chaque cas demeure un cas d’espèce. Ultimement, et à la lumière de la conduite du conseiller en cause, c’est au Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière ou à un autre tribunal, le cas échéant, de statuer à savoir si une faute déontologique a été commise par l’utilisation de prête-noms ou de paradis fiscaux.

Par ces courts commentaires, vous comprendrez que la Chambre ne pourra répondre à votre demande d’entrevue à ce moment-ci. »

La position du comité de discipline telle que mentionnée dans son jugement contre Michel Marcoux

Extrait de la décision du comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (CSF) en date du 7 août 2012 sur la plainte disciplinaire portée par Caroline Champagne, syndique de la CSF, contre Michel Marcoux :

« Certes les représentants ont la responsabilité de s’assurer que leurs activités professionnelles s’exercent de façon à favoriser la confiance des consommateurs et à protéger l’intégrité de l’industrie et très certainement comme l’invoque la plaignante, ils ne peuvent simplement fermer les yeux lorsque les clients souhaitent recourir à leurs services pour faciliter la poursuite d’objectifs illicites ou illégaux. (…)

En conclusion, la transparence financière a d’énormes mérites et est certes très utile, notamment dans le combat contre le crime organisé ou le terrorisme, mais si un consommateur ne souhaite pas révéler ses informations personnelles ou financières ou partie de celles-ci et qu’il prend des moyens à cet effet il n’agit pas nécessairement alors illégalement. Un tel comportement peut certes donner ouverture à des vérifications par l’autorité compétente mais il ne crée pas de présomption d’illégalité ou de malhonnêteté. »

Didier Bert

Didier Bert est journaliste indépendant. Il collabore à plusieurs médias sur les thèmes de l’économie, des finances et du droit.