Conseiller et materner : mission impossible?

5 octobre 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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A pregnant woman working in the office

Quand Kristine Douglas, planificatrice financière à Investment Planning Counsel, a débuté sa carrière en 2000, elle a dû composer avec un marché en forte baisse. Alors, quand elle est tombée enceinte de son premier enfant deux ans plus tard, elle ne pouvait s’offrir le luxe d’un congé de maternité. Elle était de retour au travail trois jours après son accouchement, puisque ses clients, très affectés par la récession, avaient plus besoin d’elle… que sa fille!

Elle n’aurait cependant pas pu le faire sans le support des deux hommes de sa vie, qui se sont assurés que tout se passe bien pour elle.

Son mari, Steve, un acheteur chez Sears, est devenu le premier cadre supérieur (homme) à prendre un congé de paternité. Il a d’abord pris neuf mois de congé, puis 12 autres, pour enfin réaliser qu’il ferait mieux de rester à la maison. Il a donc quitté son emploi et est devenu père au foyer.

Le père de Kristine s’est aussi impliqué. Il s’est occupé de certains de ses clients, afin qu’elle puisse avoir un horaire plus flexible. Par chance, M. Douglas connaissait la plupart des clients de sa fille, car c’étaient ses clients auparavant. Il avait en effet vendu sa clientèle à sa fille deux ans plus tôt, après qu’elle ait travaillé pour lui pendant sept ans.

En 2006, Kristine a eu une autre fille. « Je voulais être présente pour mes enfants, mais j’avais besoin de séparer la maternité de la pratique », dit-elle.

Afin de rendre cela possible, elle a transformé une partie de sa maison en bureau. La transformation a demandé de la discipline et de l’ingéniosité. Le bureau devait en tout temps avoir l’air professionnel. « Cet arrangement m’a permis de chouchouter chacune de mes filles pendant un an. Cela aurait été impossible si j’avais travaillé à l’extérieur », affirme-t-elle.

Mais, avec une clientèle sans cesse grandissante, et ses filles qui devenaient de plus en plus bruyantes en grandissant, Kristine Douglas a dû déménager son bureau dans un local situé… à trois minutes à pied de chez elle.

« Avoir son bureau à la maison signifie que la maison doit toujours avoir l’air professionnelle. Il ne peut pas avoir de jouet qui traînent ou de poussettes dans la cour avant », explique Mme Douglas.

En ayant un bureau si près de son domicile, Kristine peut aller chercher ses filles à l’école et revenir à la maison pour le dîner.

Aux autres aspirantes mamans qui jonglent avec la maternité et la pratique, Kristine Douglas conseille de faire un plan en avance « et de déterminer comment vous allez concilier les deux. »

Une transition en douceur Rosy Sandhu, une conseillère chez Edward Jones ne savait pas combien de temps elle devait consacrer à son congé de maternité. « C’est une décision très personnelle. J’avais d’abord opté pour un an, mais selon les circonstances et le bébé, j’aurais pu aussi prendre seulement six ou huit mois. »

Mais avant qu’elle ne parte en congé de maternité, sa firme a mis sur pied un programme de transition. Un autre conseiller allait s’occuper des besoins urgents de ses clients. La firme lui a assuré qu’on voulait qu’elle revienne et que son bureau et ses clients allaient attendre son retour.

Selon la directrice des ressources humaines d’Edward Jones, Veronica Ding, sa firme a une politique claire pour les congés de maternité. Les nouvelles mères peuvent prendre 18 semaines complètes, pendant lesquelles elles peuvent profiter de l’assurance-emploi. Edward Jones leur accorde également 55 % de la moyenne de leurs commissions des six derniers mois, jusqu’à ce qu’elles reviennent au travail.

Pendant cette période, un conseiller « de transition » s’occupe de la clientèle. Si le remplaçant a le droit d’accueillir de nouveaux clients, il n’a pas à rechercher activement des clients potentiels.

« Le conseiller de transition ne prend pas le relai dans un but de compétition, mais il permet simplement une continuité », explique Mme Ding.

Si une mère ne veut pas prendre les 18 semaines auxquelles elle a droit, et qu’elle préfère avoir un horaire flexible pendant quelque temps, elle peut le faire. Dans de tels cas, un conseiller d’une des succursales d’Edward Jones s’occupe des problèmes des clients qui ne demandent pas une expertise particulière. La conseillère s’occupe des autres problèmes. De cette façon, c’est elle qui empoche la totalité des commissions.

La plupart des conseillères d’Edward Jones choisissent cette deuxième option après leur congé de maternité, selon Mme Ding. « On ne compte pas les heures qu’elles font. C’est la performance et la qualité du service qui comptent », ajoute-t-elle.

Avant son congé de maternité, Rosa Sandhu s’est occupée d’envoyer des rapports à ses clients, en vue de la transition. Elle leur a envoyé des courriels et les a appelés personnellement. « En autant qu’ils sachent que quelqu’un s’occupe d’eux, tout va bien », dit-elle.

Mais, comme toutes les futures mères qui travaillent, Rosa Sandhu était inquiète. « Je me demandais comment ce serait à mon retour. » Cela faisait seulement un an qu’elle était dans le métier et elle savait qu’elle devrait recommencer à zéro. « Quelques-uns de mes prospects auront trouvé un autre conseiller pendant mon congé, pensait-elle. Je me disais que quand j’allais revenir, j’allais devoir faire beaucoup de plus de prospection. J’allais devoir cogner à beaucoup plus de portes. »

Alors que le petit Marshall n’a que trois mois, Kathleen Peace continue à voir ses clients. Elle songe même à engager une nounou afin de pouvoir retourner à plein temps au travail. D’ici là, elle continue d’aller aux réunions mensuelles de sa firme. « C’est difficile de ne plus être dans le coup pendant un an », dit-elle.

Ses clients sont totalement à l’aise avec son départ. « J’ai commencé à les préparer alors que j’étais enceinte de quatre mois. Je me suis assurée qu’ils sachent qui appeler en cas de problème. »

De l’aide S.V.P. Alors que Mesdames Douglas, Peace et Sandhu ont l’appui de leurs proches, collègues et employeurs, d’autres n’ont pas cette chance. C’est ici que Kristina Pearce entre en jeu. Elle offre aux conseillers qui doivent s’absenter pour une période plus ou moins longue de temps un remplaçant provisoire.

Mme Pearce est à la tête du Workharmony, une compagnie qui offre des solutions non traditionnelles aux employés et aux employeurs. Les employeurs ont donc accès à une banque de professionnels expérimentés, qui sont disponibles pour travailler n’importe quand.

Kristiana Pearce était autrefois analyste en placement, à la Bank of America Securities Equity Research à San Francisco. À cette époque, elle travaillait entre 60 et 80 heures par semaine. Quand elle est tombée enceinte de son premier enfant, elle a dû quitter son emploi. « C’était tout blanc, ou tout noir », résume-t-elle. Pour réintégrer le marché du travail, elle a dû trouver un autre emploi comme analyste en placement. La naissance de sa deuxième fille l’a encore forcée à démissionner. De là a germé l’idée de créer Workharmony.

« Les professionnelles doivent constamment faire des choix. Les options flexibles sont gagnantes, à la fois pour l’industrie et pour les candidates », affirme Mme Pearce.

Sa compagnie compte environ 1000 candidats (70 % sont des femmes), dont environ 20 planificateurs financiers et encore plus d’analystes financiers.

En plus de venir en aide à ceux qui souhaitent réduire leurs heures de travail, Workharmony permet aux employeurs d’embaucher des professionnels aguerris quelques heures par semaine. Ce qui coûte moins cher que de les employer à temps plein!

« Vous pouvez engager une vedette de l’industrie trois jours par semaine. L’industrie ne réalise pas qu’il y a un grands nombres de professionnels qui veulent travailler, mais en échange de plus de flexibilité », explique-t-elle.

Car selon Kathleen Peace, la beauté de la profession c’est son potentiel de flexibilité. La plupart des clients sont très occupés et ils préfèrent communiquer par téléphone ou par courriel plutôt que de se déplacer. « Mais, ajoute-t-elle, si les courriels n’existaient pas, ce serait une autre histoire! »

Ce texte est une adaptation d’un article paru sur Advisor.ca. Traduction par Anaïs Chabot.