Contre les « verdicts » des agences de notations

Par La rédaction | 30 avril 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Alors que c’est au tour de l’Espagne d’inquiéter les marchés financiers européens et mondiaux, le rôle des agences de notations continue d’être remis en question.

Les agences de notations devraient revenir à leur rôle initial d’analystes, plutôt que de juges sans appel, plaide Thierry Philipponnat, le dirigeant de Finance Watch, un groupe de réflexion influent en Europe.

Malgré les critiques dont elles ont été l’objet dans les dernières années, les trois principales agences de notation continuent de jouer une place prépondérante dans le système financier. En Europe, Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch contrôlent d’ailleurs 95 % du marché. Dans un article pour le média spécialisé AGEFI, M. Philipponnat résume son analyse de la façon suivante : « La théorie veut que ces agences soient des acteurs privés fournissant des analyses de crédit à des agents financiers libres de les utiliser ou non. La réalité est que les notations de crédit fournies par les agences constituent aujourd’hui des verdicts incontournables ».

Selon M, Philipponnat trois raisons principales expliquent ce constat :

  • Les références aux notes des agences sont présentes explicitement dans plusieurs réglementations. C’est le cas dans certaines règles nationales, internationales ou d’organisations comme celle de la Banque centrale européenne. Un changement de note peut donc produire des effets mécaniques automatiques. La notation va par exemple déterminer le niveau de fonds propres qu’une banque doit maintenir pour tel ou tel crédit.
  • Une grande partie des investisseurs institutionnels ne font plus eux-mêmes l’analyse de crédit des émetteurs. Et surtout, ils automatisent certaines décisions d’investissement en fonction des notes octroyées. Par exemple, tel pourcentage d’un fonds sera alloué uniquement à des titres cotés AAA.
  • La codification à base de lettres utilisée par les agences (AAA, BBB, etc.) peut favoriser des effets drastiques. « Tout le système financier se retrouve simultanément à vendre un actif, provoquant ainsi une chute de la valeur de cet actif sans proportion avec l’évolution minime de l’opinion de crédit émise », souligne M. Philipponnat.

Des recommandations Le dirigeant de Finance Watch recommande plusieurs mesures concernant les agences de notation. Ces recommandations ont d’ailleurs été soumises par son organisation à un comité du Parlement européen. Toutes les références aux notations de crédit devraient être éliminées des réglementations financières, croit l’organisation. Le système de notation basé sur des lettres serait aussi remplacé par des chiffres, plus précisément par une probabilité de défaut accompagné d’un texte d’argumentation. Selon Finance Watch, ce système basé sur des probabilités permettrait notamment aux acteurs du système financier de faire des moyennes des notes données par les trois agences. Cela permettrait aussi aux agences de faire des changements plus nuancés aux notes, évitant ainsi les conséquences drastiques.

La rédaction