De belles occasions s’offrent aux jeunes conseillers

Par Ronald McKenzie | 27 juillet 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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La relève dans l’industrie des services financiers a beau être clairsemée, elle n’en est pas moins dynamique. Les jeunes conseillers que nous avons rencontrés affichent une belle ambition et savent tirer profit de leurs qualités.

Prenons Mathieu Marcil, 34 ans, quatre années de pratique seulement. En mai prochain, il célébrera ses deux années à titre de directeur de la division de Brossard, sur la couronne sud de Montréal, du Groupe Investors. Il est parvenu à ce poste à force de travail et d’innovation. Pourtant, il a commencé comme nombre de jeunes conseillers chez Investors : on l’a jumelé à un professionnel d’expérience qu’il assistait dans son travail et de qui il hériterait la clientèle.

Chemin faisant, Mathieu Marcil a eu une idée lumineuse : aider les clients à épargner pratiquement les yeux fermés. « J’ai développé une stratégie qui optimise l’utilisation du CELI avec la durée maximale permise pour l’amortissement hypothécaire. Ça s’appelle le “CELIpothèque” et ça marche », explique le jeune homme, lauréat 2011 du Prix de la relève de la Chambre de la sécurité financière.

Ça marche tellement que toute sa force de vente offre maintenant le CELIpothèque à la clientèle. En deux ans, l’actif sous gestion de la division est passé de 50 à 110 millions de dollars. Quant à Mathieu Marcil, il a pris soin de faire breveter son idée.

Acheter un bloc d’affaires Lorsqu’il est parti à son compte, il y a une dizaine d’années, Martin Bernard avait un rêve : posséder un jour un centre financier complet. Sur place, des conseillers autonomes en assurance et en placement, un comptable, un notaire et un fiscaliste répondraient à tous les besoins des clients. Son rêve s’est-il concrétisé? « Ça s’en vient. J’ai mon réseau de spécialistes. Reste à les regrouper dans un endroit », dit Martin Bernard, 43 ans, de son bureau de Saint-Hyacinthe.

Mais, dans l’intervalle, le président de Gestion Financière Martin Bernard doit faire rouler son entreprise. Dès le début, il a choisi de développer sa clientèle en achetant les blocs d’affaires de professionnels qui partent à la retraite ou qui changent de métier. « Avant de devenir conseiller autonome, j’étais directeur de succursale en fonds d’investissement pour le Groupe Financier Multi Courtage. Je connaissais de nombreux représentants avec qui j’ai tissé des liens de confiance », dit Martin Bernard.

Ces précieux contacts et le bouche à oreille lui ont permis de cibler des conseillers désireux de se départir de leur clientèle. Au fil des années, il a conclu 14 acquisitions de blocs d’affaires. Des petits (50 clients) et des gros (jusqu’à 400 clients). Mais attention : Martin Bernard n’achète pas les yeux fermés. « C’est le vendeur que j’évalue principalement. Pourquoi cède-t-il sa clientèle? Quand a-t-il rencontré ses clients la dernière fois? À quelle fréquence les voit-il? Ces derniers sont-ils jeunes ou retraités? » Et ainsi de suite.

Martin Bernard ne veut pas faire la fine bouche. C’est une question de business. Il veut être à l’aise avec les méthodes du conseiller-vendeur. Il privilégiera celui qui cherche d’abord à répondre aux besoins de ses clients, car c’est ce qu’il prône en tant que professionnel. Au contraire, il évitera celui qui a une « approche produits » ou qui pousse des concepts. « C’est facile d’acheter une clientèle et ensuite la voir quitter le bateau à la première occasion parce qu’on chambarde les structures financières », prévient-il.

Et ça se vend combien, une clientèle? Martin Bernard se garde bien de lancer des prix. Cependant, il est admis que le coût d’un portefeuille d’assurances peut équivaloir à la valeur comptable des renouvellements des 30 prochains mois. Pour la clientèle « placement », c’est plus compliqué, car davantage de facteurs pèsent dans la balance. Par exemple, ces clients sont-ils en phase d’accumulation ou de décaissement? Quels genres de produits préfèrent-ils? Combien de clients risque-t-on de perdre durant la transition? Tout considéré, un bloc d’affaires en placement peut se vendre de quatre à cinq fois les revenus générés.

Pas de recette magique L’acquisition d’une clientèle existante sera couronnée de succès seulement si l’acheteur est capable de lire entre les lignes et s’il réussit à se méfier des premières impressions. En effet, un conseiller désireux de se départir de son bloc d’affaires mettra en œuvre ses talents de vendeur pour séduire un éventuel acheteur. « Les conseillers d’expérience ont un discours structuré, sont sympathiques et se présentent bien. Ces qualités peuvent facilement impressionner un nouveau venu », dit Nathalie Desjardins, coach stratégique pour professionnels en assurance et en services financiers à la firme La Clef du succès.

Il faut donc gratter le vernis afin de faire apparaître la réalité profonde. « Les conseillers qui ont de belles clientèles sont ceux qui ont fait preuve de discipline au fil du temps. Or, cela n’est pas inscrit sur leur visage », illustre Nathalie Desjardins.

Il n’y a donc pas de recette magique. Pour estimer à sa juste valeur le potentiel commercial d’une clientèle, il faut travailler avec celle-ci en s’associant avec le vendeur. Ainsi, le futur acheteur pourra analyser les méthodes de travail du vendeur au jour le jour et voir si la « marchandise » vaut le coût. L’ennui, c’est que ce processus peut s’étendre sur quelques années. Le conseiller-acheteur doit donc s’armer de patience.

Une fois que les deux parties se seront entendues sur la qualité et le prix du bloc d’affaires, il convient de conclure la transaction. Curieusement, la signature de contrats en bonne et due forme ne semble pas la règle. Dans la division de Mathieu Marcil, par exemple, le transfert des clientèles s’effectue graduellement sans que l’on couche d’entente sur papier. « Je vais rendre ça plus officiel dans quelques années », promet-il.

Au contraire, pour Martin Bernard, toute transaction doit s’accompagner d’un contrat. « Il faut inclure des clauses de protection, les éléments de conformité à respecter, des zones de non-concurrence, etc. », fait-il remarquer. Ainsi, l’acheteur peut se protéger contre le départ d’une partie de la clientèle en retenant, pendant un certain temps, une marge de 10 % à 15 % du coût de la transaction. Si aucune perte n’est constatée durant le délai, la marge est remise au vendeur.

La deuxième partie de cet article sera publiée la semaine prochaine.

Cet article est tiré de l’édition d’avril du magazine Conseiller. Consultez-le en format PDF.

Ronald McKenzie