Des investisseurs veulent une finance verte

Par La rédaction | 13 Décembre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Plus de 200 investisseurs institutionnels ont annoncé leur intention de faire pression sur les cent entreprises qui émettent le plus de gaz à effet de serre pour lutter contre le changement climatique, rapporte Reuters.

Deux ans jour pour jour après la signature de l‘accord de Paris par 195 gouvernements de la planète, ces investisseurs, qui représentent quelque 26 000 milliards de dollars sous gestion, enjoignent à ces grands pollueurs, dont Exxon Mobil, Coal India, Gazprom et China Petroleum & Chemical Corp, de réduire leurs émissions de CO2 d’ici cinq ans.

Dans le cadre de cette opération baptisée Climate Action 100+, la Caisse des dépôts française, BNP Paribas, Pacific Investment Management, Amundi, Legal & General Investment Management, Northern Trust ou encore Aegon offrent à ces grandes compagnies de les accompagner dans leurs efforts de décarbonisation de leurs activités.

LA BANQUE MONDIALE CESSERA DE FINANCER LE PÉTROLE ET LE GAZ

Dans le même temps, une soixantaine de chefs d‘État et de gouvernement étaient attendus hier à Paris pour un sommet sur le climat destiné « à entretenir la dynamique de la COP 21 et à dégager des financements supplémentaires dans la lutte contre le réchauffement de la planète », selon Reuters. L’agence de presse précise que ce « One Planet Summit », organisé conjointement par la Banque mondiale, l’Organisation des Nations unies et la France, réunit, outre les États, de grandes entreprises, des fonds, des organisations non gouvernementales et des banques de développement.

La Banque mondiale a également profité de ce sommet sur le climat pour annoncer qu’elle cessera de soutenir l’exploration et l’exploitation de pétrole et de gaz après 2019 afin d’« aligner sur les objectifs de l’accord de Paris » les financements qu’elle accorde aux États, précise-t-elle dans un communiqué. Si de plus en plus d’acteurs financiers affichent leur volonté de se désengager du charbon, l’énergie la plus polluante, la Banque mondiale est la première banque multilatérale à prendre un tel engagement dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz, souligne l’Agence France-Presse. Celle-ci précise qu’en 2016, ses financements dans l’industrie pétrolière et gazière ont représenté près de 1,6 milliard de dollars.

À partir de l’an prochain, l’institution publiera en outre chaque année un bilan des émissions de gaz à effet de serre des projets qu’elle finance dans les secteurs les plus émetteurs, comme l’énergie. Enfin, elle généralisera la prise en compte d’un prix interne du carbone dans ses futurs investissements.

« « VERDIR » LA FINANCE VA DANS LE SENS DE L’HISTOIRE »

L’AFP se demande par ailleurs « comment « verdir » la finance et la mettre au service du climat ». La réponse? En mobilisant d’importants moyens et en favorisant l’émergence de financements spécifiques, à commencer par les obligations destinées à soutenir des investissements en faveur de la transition écologique, qui ont enregistré un vif succès cette année, notamment en Europe. « Pour 2017, les émissions mondiales de dette verte ont déjà atteint plus de 125 milliards d’euros [189 milliards de dollars canadiens], contre 90 [136 G$] en 2016 », observe Stéphane Marciel, responsable Obligations durables à la Société Générale CIB.

Si la France a donné l’exemple en début d’année en lançant une première émission verte d’un montant de sept milliards de dollars canadiens, l’analyste se dit persuadé que d’autres pays suivront « parce que c’est le sens de l’histoire ». Et ce, d’autant plus que ce type d’emprunts peut s’avérer très rentable pour les investisseurs, selon Jérôme Pellet, directeur des émissions obligataires responsables à HSBC. Interrogé par l’AFP, ce dernier estime qu’il s’agit là d’« une tendance lourde », même si ces obligations demeurent pour l’instant marginales à l’échelle du marché obligataire mondial.

L’agence de presse rappelle que les fonds privés basés sur des critères environnementaux, sociaux et gouvernementaux (ESG) sont en pleine croissance dans plusieurs pays du monde, et particulièrement en France, où quelque 361 fonds étaient commercialisés l’an dernier à la même période, soit un encours de 110 milliards d’euros (167 milliards de dollars canadiens). Selon des experts cités par l’AFP, pour rester sous la barre des deux degrés de réchauffement de la planète, les industriels devront toutefois d’abord arrêter de développer des projets d’énergies fossiles (gaz, pétrole, charbon), responsables des trois quarts des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Des groupes français investissent plus de 450 G$ pour le climat

En marge du sommet de Paris, près d’une centaine de groupes français, parmi lesquels le constructeur automobile PSA et les multinationales Areva, Orange ou Vinci, se sont engagés lundi à participer à la lutte contre le changement climatique, rapporte Reuters.

Parmi ces grandes sociétés, 60 ont pris des engagements de réduction des émissions de gaz polluants et 27 se sont dotées d‘un prix interne du CO2. Selon les signataires de cet engagement, environ 300 milliards d‘euros (plus de 450 G$ CA) auront été investis entre 2016 et 2020 en financement, en recherche et développement et en innovation.

« UN CHOIX DE BON SENS »

Cité par Reuters, le PDG de la compagnie Schneider Electric estime par exemple qu’il s’agit là d’un choix de bons sens pour nos sociétés ». Son raisonnement? « Le changement climatique a déjà des effets sur nos entreprises en créant des désastres dont les coûts et les conséquences sont élevées et créent autant d‘impondérables qui rendent la prise de décision difficile », explique Jean-Pascal Tricoire.

Enfin, souligne le dirigeant, « le défi du combat contre le changement climatique est un formidable catalyseur d’innovations ». « Ce qui est bon pour la société qui nous entoure est bon pour nos entreprises, car il est évident qu‘une entreprise qui inscrit sa stratégie dans le développement durable a plus de chances d‘exister demain que celle qui en combat les bases » conclut-il.

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