Des services financiers par abonnement

Par La rédaction | 8 avril 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Remettre des billets de banque.
Photo : juliatim / 123RF

Le modèle de service par abonnement fait le bonheur de plusieurs entreprises à succès du commerce en ligne comme Netflix et Amazon. Voilà qu’il fait une percée dans le domaine des services financiers. Sonnera-t-il le glas des modèles d’affaires basés sur les frais liés aux actifs sous gestion (ASG)?

Selon McKinsey & Company, Amazon, Dollar Shave Club et Blue Apron, des commerces misant sur les abonnements, constituent trois des cinq sites de détaillants les plus populaires. Leurs ventes nettes ont dépassé 2,6 milliards de dollars américains en 2016. 

Toujours selon McKinsey, le marché du commerce électronique par abonnement a connu une croissance annuelle de plus de 100 % au cours des cinq dernières années. Les clients ont le plus souvent entre 25 et 44 ans et touchent des revenus se situant entre 50 000 à 100 000 dollars américains. Or, ce segment de la population a traditionnellement été mal servi par les conseillers qui se paient avec des frais sur les ASG, puisque ceux de ces clients tendent à être assez bas. 

LE VIRAGE DE CHARLES SCHWAB

Aux États-Unis, Financial-Planning rapporte que Charles Schwab, un pionnier de l’investissement à bas frais qui détient plus de 3,5 billions de dollars américains en actifs sous gestion, se tourne vers cette solution. La firme offrira désormais l’option de s’abonner à ses services de planification financière. 

Les clients qui utilisent les services de sa plateforme numérique paieront des frais fixes de 300 dollars américains, en plus de 30 dollars par mois, plutôt qu’un pourcentage de leurs actif investi. La firme soutient que cette formule lui permettra de mieux servir ses plus jeunes consommateurs, qui préfèrent payer de cette manière.

Certains se demandent si Schwab subira le même sort que Learnvest. Ce robot-conseiller avait tenté de lancer un service par abonnement, offrant des services de planification allégés aux jeunes consommateurs. Le succès n’a pas été au rendez-vous et Learnvest a finalement été racheté par Northwestern Mutual en 2015.

« Finalement, les jeunes consommateurs ne veulent pas un produit de moindre valeur », souligne Eric Roberge, un conseiller en placements de Boston. Selon lui, ils sont prêts à payer pour des services de haute qualité, mais l’industrie tarde à modifier la structure des frais, tout en faisant une petite fixation sur leur niveau.

UN OUTIL PLUS FLEXIBLE

James Gambaccini, d’Acorn Financial, en Virginie, croit que l’abonnement peut offrir plus de possibilités que les modèles basés sur les frais. Ces dernières années, l’un des défis des conseillers a été d’offrir le même niveau de service et de conseil aux clients millionnaires qu’à ceux qui ont des sommes moins importantes à investir. 

Mais tous ne sont pas de cet avis. Bien des conseillers croient que ces services attireront surtout les gens qui n’ont en tête que de payer le moins de frais possible. « Vous avez ce pour quoi vous payez, avance Ten Haagen, propriétaire d’une firme à son nom dans l’État de New York. Si vous voulez des habiletés et de l’expérience avec les marchés, vous devez être prêt à payer pour. Tout le monde essaie de réinventer la roue. »

DÉVELOPPER LES AFFAIRES

Cependant, une récente étude de Nationwide réalisée auprès de 1 700 conseillers et investisseurs individuels montre que sept conseillers sur dix s’inquiètent d’une pression à la baisse sur les frais. Des options d’abonnement pourraient leur être utiles, notamment pour servir les clients qui n’ont pas encore beaucoup d’actif sous gestion ou qui sont dans une situation particulière. 

Par exemple, à San Diego, Physician Wealth Services (PWS) offre ses services aux jeunes fraîchement diplômés des écoles de médecine. En raison des frais de scolarité élevés chez notre voisin du Sud, ces jeunes ont des centaines de milliers de dollars en dette d’études. Ils ont aussi le potentiel de devenir des clients à haute valeur nette. Mais comment leur donner un service en facturant des frais sur leur actif, alors qu’ils ont une valeur nette négative?

Kayce Kress, conseillère à PWS, explique que la plupart de ses clients ont environ 500 000 dollars américains de dette d’études et aucun plan financier pour la rembourser. Ils paient 450 dollars par mois pour un plan financier personnalisé, sans frais de départ, jusqu’à ce qu’ils aient au moins 500 000 dollars en actif investis.

D’autres firmes présentent des modèles semblables. Les coûts pour faire affaire avec Facet Wealth, à Baltimore, varient de 500 à 5 000 dollars américains par année, tout dépendant des services fournis.

LA VOIE DE L’AVENIR?

Chris Hutchins, PDG de la firme de services numériques de planification financière Grove, avance que le modèle d’abonnement est la voie de l’avenir, comme le démontrent les expériences positives d’Amazon et Netflix. Sa firme facture des frais initiaux de 560 dollars américains pour un plan financier, puis un abonnement de 65 dollars par mois. 

De leur côté, les clients n’acceptent plus nécessairement de voir les frais qu’ils paient grimper simplement parce qu’ils ont plus d’actif sous gestion. « Est-ce que les conseillers fournissent plus de services qu’avant? demande Kayce Kress. Les frais liés aux ASG vont augmenter sans égard à cela. »

Reste que l’abonnement n’est pas non plus la panacée pour le conseiller. Certains craignent que le fait de payer par mois, sans avoir à débourser un fort montant initial, ne rende les clients moins fidèles. Un conseiller risque de perdre des revenus si ses clients par abonnement le quittent régulièrement après quelques mois. « Il n’y a pas de modèle de frais parfait », admet Kayce Kress. 

De la même manière, les conseillers ne devraient pas modifier leur structure de paiement brusquement. Certains font une transition en douceur, en facturant des montants mensuels tout en continuant de faire payer à leurs clients un petit montant lié à l’ASG.

L’abonnement devient donc plus un nouvel outil qu’une solution miracle. Avez-vous songé à l’utiliser dans votre pratique?

La rédaction