Devant l’AMF, un témoin est obligé de témoigner

Par Fabrice Tremblay | 25 juillet 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Une décision récente de la Cour d’appel du Québec est venue rappeler qu’une personne assignée comme témoin dans une enquête de l’AMF est obligée de répondre aux enquêteurs de l’AMF.

Dans sa décision Autorité des marchés financiers c. Fournier, la Cour d’appel renverse la décision des deux juges de premières instances, qui avaient acquitté Gilbert Fournier de l’infraction d’avoir refusé de témoigner. L’AMF poursuivait M. Fournier pour ne pas avoir répondu à des questions de l’enquêteur de l’AMF, sur les conseils de son avocat.

Le jugement reprend le détail de l’échange à l’origine des poursuites : « M. Gaetan Paul, enquêteur de l’AMF : — Monsieur Fournier, est-ce que vous détenez présentement un compte de courtage? Me Stéphane Davignon : — Je vais m’objecter à cette question-là large comme ça, je ne vois pas la pertinence. M. Gaetan Paul , — Parce que, Maître, vous ne pouvez pas vous objecter, c’est ça qu’est le problème, c’est que vous ne pouvez pas faire aucune objection, je ne peux pas retenir votre objection, monsieur doit répondre à la question. »

Cette assignation du témoin intervenait dans le cadre d’une enquête de l’AMF sur M. Martin Tremblay, et les compagnies Dominion Investments Ltd. et Dominion Investments (Nassau) Ltd. « L’enquête porte sur les activités de courtier ou de conseiller et sur les transactions effectuées par les dirigeants, les employés, les représentants et les mandataires de ces sociétés », peut-on lire dans le jugement. Les questions de droit en jeu Pour que la Cour d’appel accepte d’entendre une cause comme celle-ci, il faut qu’elle identifie préalablement des questions de droit qui méritent d’être débattues. « La Cour d’appel s’est penchée sur la question de savoir si un avocat peut formuler des objections lors d’une enquête de l’AMF et si ces objections peuvent justifier le refus d’une personne légalement assignée de témoigner », explique l’avocate Elisa Clavier du bureau de Gowlings à Montréal, sur le blogue du Comité Recherche et Législation de l’Association du Jeune Barreau de Montréal (blogueducrl.com).

Dans sa décision, la Cour d’appel accueil l’appel de l’AMF et déclare l’intimé coupable. « Après avoir décrit les objectifs et pouvoirs de l’AMF, l’honorable juge Dufresne explique que bien qu’une personne assignée puisse être assistée par un avocat, ce dernier ne peut pas formuler des objections », résume Me Clavier.

La décision rédigée par le juge Jacques Dufresne précise que : « Si son avocat l’a mal conseillé et si les questions étaient validement posées, l’intimé ne peut prétendre avoir fait preuve de diligence raisonnable. En somme, le fait qu’il ait suivi les conseils de son avocat ne peut en soi constituer une défense de diligence raisonnable ».

C’est la Loi sur les Valeurs mobilières du Québec qui prévoit que refuser de témoigner au cours d’une enquête constitue une infraction.

Fabrice Tremblay